Il est ainsi des odeurs parfois ravivées et qui nous font remonter à l’enfance. Des odeurs, pas seulement des parfums. Oui, bien sûr, la glycine sur la terrasse et les thuyas sont de superbes senteurs. Mais…
Par exemple, l’odeur âcre du fer rouillé. Elle était liée à une petite cave de la maison familiale, celle où d’une part était versé le charbon par le soupirail et d’autre part étaient rangées les boîtes de clous, de vis, d’écrous.
L’odeur du « savon noir » utilisé pour le nettoyage du trottoir, le plus souvent le vendredi matin ; une odeur que je sentais sur le chemin de l’école, mais aussi devant chez moi, lorsque j’avais congé. Je me souviens d’une indignation de ma mère, assez bourgeoise, qui nettoyait les pavés et qu’un livreur avait pris naturellement pour la femme de ménage !
L’odeur des mandarines (on n’en recevait peu à d’autres périodes de l’année) sur les assiettes le matin de la Saint-Nicolas. Même si l’on y trouvait des pépins, son acidité était plus douce dans la bouche et dans les narines.
L’odeur (le parfum) des feux de feuilles et de branchages dans les jardins.
L’odeur des feuilles séchées d’eucalyptus, que l’instituteur avait brûlées dans une vasque un matin pour assainir l’atmosphère.
L’odeur du désinfectant (créoline) que les chefs venaient verser dans les « feuillées » des camps scouts.
L’odeur provenant certains jours d’une savonnerie de la rue voisine (Tranoy), qui ne ressemblait à rien d’autre et écœurait très vite.
L’odeur des épices (je ne connaissais pas encore les noms, mais les couleurs étaient belles : jaune, rouge, brun, beige…) entreposées dans des hautes boites rouges à couvercles dans l’épicerie Malfait qui s’ouvrait au coin de la rue de l’école. Un mélange d’odeurs sucrées, salées, inédites.
« L’argent n’a pas d’odeur, mais la pauvreté en a une » écrit Paul Léautaud !