Par deux fois cette semaine j’ai reçu indirectement des nouvelles de Robert PENTIER, notre cher Professeur d’Histoire du Lycée CARNOT
Tout d’abord le Rotary Club de FORT DE FRANCE SUD dont Bobosse fut le Président en 1989-1990.
Publié par JR sur août 04, 2016Et puis le Scrutateur dans une de ses envolées lyriques dont il a le secret et dans laquelle il indique comment le cher Professeur terrassait la « mornitude »:
J’ai depuis longtemps été passionné par l’histoire de l’Egypte antique. Disons dès la classe de sixième au lycée Carnot ( de Pointe-à-Pitre ). Non à cause du cours, le professeur, scolaire comme il n’est pas possible, ânonnait sur les sujets les plus grandioses là où il aurait fallu fulgurer, – sans négliger la précision de l’historien, – et, exalter sinon la fameuse « objectivité », du moins l’honnêteté critique, mise à la portée d’élèves de sixième. Cette « mortitude » lente ( comme dirait Ségolène ) fut d’ailleurs l’habit gris de tous les profs d’histoire que j’ai connus jusqu’en classe terminale ( comprise ), à UNE exception près.
Cette exception s’appela M. Pentier ( dit Bobosse! par des générations d’élèves ). Dans le vieux Carnot de ce temps là, l’étanchéité était loin d’être « absolue » d’une salle de classe à une autre.
Il m’arrivait d’être au cours, disons ( au hasard ) de mathématiques, et d’avoir l’esprit, non pas dans la cuisine ( comme Gargantua de Rabelais ) mais au cours voisin, de Bobosse.
Ce dernier non seulement connaissait son affaire, mais était doué d’un talent réel d’acteur et d’une éloquence sans pareille. Je rêvais du jour où je pourrais passer les cours d’histoire sans me décrocher les mâchoires, ou à dormir les yeux ouverts, comme je ( et quelques autres ) j’avais appris à le faire.
Ce jour vint. C’était en classe de seconde. Le programme, alors, faisait la part belle à la révolution française. Le mois d’octobre fut radieux. J’écoutais, je rêvais, je pensais, je ré-flé-chi-ssais. J’étais heureux.
Je me souviens encore du cours sur la nuit du quatre août ( 1789 ) date de la fameuse abolition des privilèges, de la conclusion de l’historien conteur : « Tout cela s’acheva dans une embrassade aussi générale qu’hypocrite. Tous arboraient un sourire dont toutes les teintes du jaune, signifiaient, plus ou moins, la valeur réelle de leur contrition » intérieure. La conclusion avait été précédée d’un récit, où je voulais voir l’influence du grand Bossuet, que nous étudiions alors en littérature, sur dans le récit professoral, et dans son rythme « Ô nuit! Nuit effrayante, Nuit redoutable, où retentit tout à coup cette effrayante nouvelle » : l’exemption d’impôts, c’est fini, c’est fini les mecs!
Hélas, début novembre, une autre nouvelle tomba, non moins épouvantable, Bobosse n’est pas mort, mais il part vers un autre port. Il était nommé Censeur au lycée Gerville-Réache à Basse Terre, avant de poursuivre une brillante carrière, dans l’enseignement et dans la politique.
La classe retomba dans sa « mornitude » ( Ségo ).
Avec ces quelques photos, une petite pensée pour Simone son épouse.
Robert et Simone PENTIER