Pour Benoit Mercier, président du directoire de la Caisse d’épargne de Lorraine, il va falloir « offrir le meilleur de l’humain - avec des rendez-vous à forte valeur ajoutée - et du digital – à partir de toutes ces innovations qui rendent la banque plus facile, plus fluide, plus simple - à nos clients ». Encore faut-il que cette aspiration soit réellement articulée autour du client et non pas seulement autour de l’adaptation des besoins du client aux produits que la banque souhaite vendre. Axel Reinaud, directeur associé senior au Boston Consulting Group, est lui aussi affirmatif : « La banque du futur ne sera pas une banque désincarnée, accessible dans le cloud uniquement ». Pour lui, la banque de demain doit être "bionique" et non un "pure player" de la banque en ligne. Elle pourra même, par ce biais, améliorer la rentabilité de ses capitaux propres de 8 à 10 points.
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La digitalisation au service de la croissance
Si nous prenons l’exemple du Mobile Money en Afrique, nous avons là affaire à une idée nouvelle sur des vieilles technologies. Et ce qui est sûr, c’est que le vrai changement sera dans la technologie qui généralisera le paiement instantané, seul domaine privé aujourd’hui d’instantanéité en matière de transmission financière. Aujourd’hui, avec le smartphone, les consommateurs sont habitués à une notion d’immédiateté dans la plupart de leurs échanges, et parfois dans leurs actions. Les utilisateurs de l’application Lydia expérimentent aujourd’hui à petite échelle la possibilité de payer un autre utilisateur de la solution mobile en temps réel avec son smartphone. Un premier pas est déjà fait et sera rapidement emboité par la mise en place de la Directive sur les services de paiement (DSP2), qui prévoit l’introduction de services de paiement instantané. Les banques traditionnelles tentent de créer cette instantanéité sur les plateformes de paiement locales existantes mais, même si elles y arrivent, cela règlera le problème des paiements locaux mais pas celui des paiements internationaux. Dans chaque pays, les acteurs des paiements essaient de se mettre d’accord, en s’appuyant sur les consortiums existants, pour mettre en place de nouveaux standards. Mais cela se complique avec les paiements transfrontaliers du fait du recours obligatoire à des messageries obsolètes. In fine, les paiements ne sont jamais que des messages standardisés basés sur la confiance entre l’émetteur et le récipiendaire. Le système fonctionne remarquablement bien dans le domaine des paiements par carte où une très grande automatisation et l’instauration de normes standards permettent l’instantanéité de la confiance : le commerçant donne ainsi la marchandise au client en ayant l’assurance que son compte sera crédité à la fin de la journée. Dans le contexte d’une transaction par carte, le banquier émetteur connait le porteur de la carte et l’origine des fonds. Il peut ainsi déduire la destination par la nature de la transaction effectuée. Le banquier acquéreur de la transaction connait la destination des fonds (le commerçant), le rational pour la transaction (l’achat des biens de son client commerçant) et se repose sur l’émetteur de la carte quant à l’origine des fonds. Ces paiements internationaux de compte à compte reposent toujours aujourd’hui sur les principes établis par les banquiers nord européens de la Hanse à la fin du Moyen-Âge. La connaissance personnelle du banquier et la reconnaissance de son sceau étaient suffisantes pour qu’un autre banquier avance des fonds à un client du premier.
Alors, tant que nous n’avons pas la possibilité de prouver que la personne qui reçoit le paiement est la bonne, l’appareil reste encore un véritable mirage technologique. Ne perdons pas de vue que nous sommes dans un rapport de contrôle des fonds destiné à s’assurer notamment que nous ne sommes pas dans une situation de blanchiment, de financement du terrorisme, de fraude, etc. Bref, il faut une identification forte pour valider la notion d’« acceptance ». Aujourd’hui c’est la responsabilité du banquier et, assurément, un numéro de téléphone à lui seul ne peut suffire. Il va falloir créer un nouveau standard type « swift ».
Et, clairement, nous pouvons voir dans la blockchain une réalisation possible de cette perspective. La chaine de blocs est actuellement le seul moyen de renforcer la sécurité tout en garantissant la sécurité de l’information. La récente alliance entre la première banque américaine JP Morgan Chase et Microsoft, accompagné d’une trentaine d’autres acteurs (Santander, ING, Intel, Accenture, le prétrolier BP, etc.) autour du développement de standards d’utilisation de la blockchain Ethereum, est un signal très fort envoyé en ce sens à l’univers bancaire. C’est sans aucun doute là que se fera la prochaine « vraie » révolution bancaire.
A propos de l'auteur : Sylvain Pignet est président exécutif de Ditto by Travelex.