Une passion, peut-être commune, qui sait ? Depuis mon plus jeune âge, je suis un collectionneur invétéré. Surement un héritage transmis de ma mère ? Plaisir de constituer des collections, de rechercher la rareté, ou tout simplement la beauté. Avec le temps, j’ai également appris à conserver des souvenirs, un passé. Le mien, celui de ma famille. De gens qui de plus en plus, ne sont plus.
Collectionner quelque chose peut prêter à sourire. Mon père par exemple, ne comprend pas vraiment cette manie de garder, d’entasser parfois. Mais je ne peux me défaire des choses, et je m’attache. J’ai commencé à l’âge de six ans à collectionner les cartes-postales. Imaginez, aujourd’hui j’en ai quarante. Ce sont 34 années conservées dans des boites, dans lesquelles se trouvent des images, de photos, des écrits. Je me souviens alors tout jeune, ma grand-mère faisait ses tiroirs, tout comme mon arrière-grand-mère, ainsi que leurs amies. Malheureusement, du fait de mon jeune âge alors, je n’ai pas conservé correctement tous ces trésors.
Des trésors ? Tout simplement, par le fait que ces cartes-postales émanaient pour la plupart de ma famille. Un arrière-grand-père paternel que je n’ai connu, puisque que décédé un mois avant ma naissance. Des cartes écrites par mon grand-père alors qu’il effectuait son tour de France, jeune homme qu’il était. Des cartes rédigées pendant des moments sombres, tragiques de notre histoire. Je pense à la Première Guerre Mondiale, puis à la Seconde Guerre Mondiale. Là même, où ma grand-mère était à l’abri (quoi que) sur l’île d’Oléron, et qu’elle écrivait à sa famille en Seine et Marne.
Il est sûr qu’à l’âge de six ans, je ne pouvais comprendre la valeur symbolique et sentimentale de ces cartes, ces écrits. Je regardais les images, et je devais probablement m’arrêter sur des cartes-postales en couleurs, des cartes-postales humoristiques et non pas sur des photos en noir et blanc. Pourtant les plus recherchées.
Avec le temps, j’ai appris à classer, à différencier, à apprécier toutes ces cartes-postales. Ô bien entendu, j’ai encore une grand part de ces archives familiales. Plutôt du côté de ma famille paternelle. J’avoue que parfois, lorsque je me replonge dans une boite, et que je ressors ces cartes, les larmes me coulent. Si les personnes citées précédemment étaient pour la plupart disparues (arrières grands parents, grands oncles et tantes). Aujourd’hui, j’ai plus de mal à relire des cartes de mes grands-mères (mes grands-pères écrivaient beaucoup moins). Ou encore des cartes-postales adressées par ma mère alors que j’étais en classe de neige. Maman, qui s’en est allée dans un monde trop lointain à l’été 2014. Des mots écrits par des personnes venues de tous les horizons. Lorsque je travaillais dans le monde des voyages, il n’était pas rare qu’un client m’envoie une carte expédiée depuis des horizons lointains, y compris à l’autre bout du monde. Relire aujourd’hui ces petits messages, manuscrits sur un petit carton avec un paysage au recto. Me laisse un brin nostalgique, d’une époque pourtant pas si lointaine. Lorsque, j’étais ce jeune homme qui s’investissait et se pliait aux exigences, aux attentes de voyageurs qui confiaient, et ce n’est pas rien, la concrétisation dans bien des cas… d’un rêve. Oui, un voyage à l’autre bout du monde, on n’en fait pas tous les jours. Pour certains, c’est même une étape unique dans une vie. Alors imaginez, que l’on vous confie les clefs de ce rêve. Dès le départ vous ne vendez que de l’abstrait. Un voyage se conçoit en écoutant son interlocuteur, ses envies, ses désirs, ses attentes. Il m’appartenait de concrétiser, ce que l’on pourrait appeler un rêve.
Alors, oui j’étais content de recevoir une carte-postale anodine, mais toujours avec le plaisir de découvrir ce qui avait marqué mon interlocuteur. Le choix d’une carte-postale reposant sur le visuel, reflète secrètement ce qu’on apprécie de cet endroit. Les paroles notées au verso, sont parfois laconiques, ou alors la place ne suffit pas. Lire le bonheur, les remerciements… j’adorais, et j’aime encore à les relire. La vie m’a imposée, l’épreuve de la maladie et de ne plus pouvoir me déplacer aussi facilement qu’auparavant. Si aujourd’hui beaucoup découvrent que le net révolutionne l’économie, l’entreprise du monde des voyages fut l’un de premiers concerné Nous pouvons aisément dire dès l’an 2000. Nombreuses sont les agences en ville qui baissèrent le rideau, face à internet. Donc outre la maladie, un secteur de proximité sur le déclin. Puis, ce n’est pas ma volonté actuelle, d’être enfermée huit heures par jour sur un plateau à traiter par correspondance. Passons.
Toujours au fil des âges, mais très tôt, j’ai apprécié de conserver les cartes-postales de ma ville d’enfance vers laquelle je suis revenue. Une ville de la région parisienne, et je m’amuse à remontrer le temps en cartes-postales. Un avant et un après, voir les transformations. Impliqué énormément de la vie de société locale, et achetant des anciennes cartes-postales ou modernes sur des sites internet comme, Delcampe ou Ebay, des cartes à l’unité ou en lots. Il est amusant parfois de retrouver des écrits par des personnes que j’ai pu connaître. Une carte qui revient comme à la maison, sans que cela ne soit son expéditeur d’origine et encore moins le destinataire. Un sourire alors se dessine sur mon visage, amusé et parfois ému, qu’un petit bout carton puisse ainsi illumine mon visage.
Tout cela il faut le comprendre, le vivre pleinement, cela ne s’explique pas…
J’ai également énormément de cartes, écrites par moi-même selon les lieux, les pays où je suis allé. Des courriers adressés à mes parents, à mes grands-parents ou à des amis. Encore une fois, la nostalgie s’installe. Entre ces voyages de l’autre côté de l’Atlantique. Mon expérience étudiante à New-York, ou encore un autre voyage fou amoureux. Seul moi finalement, en relisant ces mots, arrive à comprendre le fond de ce que je voulais exprimer. Des souvenirs de vacances, d’une enfance heureuse à l’île de Ré, l’insouciance.
Puis les thématiques s’installent. Depuis quelques années, je me plais à collectionner les cartes-postales reprenant les recettes de cuisines, les cartes d’un vieux Paris, les cartes-postales liées à la SNCF et à la RATP. Les supports mettant en avant bistrots, et marchés. Des animations toutes simples, mais avec une expression de vie, dégageant quelque chose. Je ne recherche pas la valeur, mais uniquement un plaisir des yeux, et de la lecture. J’avoue que c’est encore mieux lorsqu’un timbre de collection orne la carte. D’ailleurs quel sacrilège, lorsqu’on me remet un lot, et que je découvre des cartes-postale dont les timbres ont été décollés.
Aujourd’hui, la carte-postale se perd. Là où y encore quelques années, les librairies étaient des boutiques courantes, elles disparaissent définitivement de nos villes. Même sur les lieux touristiques, la carte-postale se fait désormais discrète. Bien qu’il s’en écoule plusieurs millions d’exemplaires tous les ans. La Tour-Eiffel se vendant surement toujours aussi bien, même si cette dernière n’est pas la carte-postale la plus vendue sur Paris. Puisque la table d’un bistrot, avec son café crème et croissant est la plus recherchée par tous les touristes.
L’avènement d’un monde allant vers le tout numérique, élimine le support papier. Un danger car qui conservera sur les années, les décennies et plus… SMS, emails et autres messages via Facebook ? Personne ou presque. Si bien, que la carte-postale revient à la mode et d’usage sous sa forme la plus classique, mais également en profitant cette fois de la révolution internet et numérique. Il est si facile aujourd’hui de créer nos propres cartes via le site internet Helloprint par exemple. Tout le monde se plait à photographier tout et n’importe quoi finalement, à tous les instants. Bien souvent de très beaux clichés en ressortent, et peuvent être immortalisés en cartes-postales. Un paysage de vacances, une scène de vie en ville, nos animaux de compagnie, un moment en famille… il ne restera qu’à créer et choisir le support, le format, et à procéder à l’édition.
Ainsi, il appartient à chacun d’entre nous de perdurer ce plaisir d’écrire, de partager des clichés, des moments de notre vie. Je peux vous assurer, qu’un jour vous apprécierez de revoir ces instants, ces images, de lire et relire. Puis d’autres, que vous ne connaîtrez peut-être apprendront de vous, de nous… finalement nous entrerons dans l’histoire en faisant l’histoire. Je suis sûr et certain, que mon neveu né quelques mois après que sa grand-mère nous eut quitté, sera heureux un jour de tenir dans ses mains ces cartes, puis de lire ces petits-mots. Je ne manque pas malgré ses deux ans, de lui en envoyer depuis Paris vers la Réunion, de quoi entamer une jolie et merveilleuse collection.
D’ailleurs, n’hésitez pas à m’adresser une carte-postale de chez vous, de vos vacances et mieux si vous aviez une recette de cuisine ? Vous feriez un heureux !
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