Si le début, la musique de Perfume Genius a été reconnue et ses deux premiers albums salués par la critique, c’est avec Too Bright, son troisième album studio, publié en 2014, que l’artiste américain a enfin réussi à imposer son nom de façon pérenne. On sait notamment, depuis, qu’un certain Michael Stipe a même été jusqu’à réinterprété l’une des chansons de Mike Hadreas (de son vrai nom). De même, rappelons qu’Adrian Utley et John Parish ont fait partie des musiciens qui ont aidé Perfume Genius a concocté son précédent album, qui a été entièrement arrangé, mixé et produit par Utley. Dernière chose : déjà, au synthé et au piano, un certain Alan Wyffels était crédité… lui qui, aujourd’hui, sur le quatrième album de son compagnon, joue un rôle prépondérant, comme en attestent les paroles de certaines chansons du nouvel album.
Tout cela pour en arriver à No Shape. Davantage que son prédécesseur, qui lui-même accentuait le trait, ce nouvel opus de Perfume Genius n’est absolument pas immédiat, bien au contraire. Il ne s’agit pas d’hermétisme, non. Si ses deux tout premiers albums étaient, eux, bien plus accessibles car plus directs, plus intimes, plus aisés (si le terme peut être utilisé pour qualifier sa musique), Too Bright voyait l’Américain évoluer dans des ambiances plus nuancées, glacées et rugueuses à la fois, les diverses écoutes permettant d’arriver à un cœur plus chaleureux, plus réconfortant. No Shape accentue donc cet effort qui est demandé à l’auditeur. Heureusement, le visuel choisi semble de suite vouloir nous rassurer : oui, ce nouvel album ne sera pas tout de suite facile, mais en prenant le temps nécessaire il viendra assurément se caler aux côtés de ses œuvres précédentes.
Alors, qu’en est-il des chansons ? Dès « Otherside » on se sent rassurés, Mike Hadreas semblant en début d’album bien plus serein qu’habituellement. D’ailleurs, on va très vite se sentir très à l’aise dans ce No Shape. Les douze chansons suivantes auront bon alterner les sonorités, les tempos, les ambiances, les humeurs, le voyage proposé est tout à fait aisé et ne demande, en fin de compte, aucun effort pour arriver à son terme. Grâce à sa voix ; aux divers instruments, classiques ou plus électriques. « Choir » est, à ce titre, bouleversant de lyrisme.
Nul doute que l’album requiert bien plus d’écoutes encore, voire des temps de repos pour se révéler entièrement. L’humilité évidente de Perfume Genius, mêlée d’une apparente absence de pudeur, font de cette discographie aux quatre albums un univers déjà très singulier. Ce quatrième opus sera probablement, encore une fois, inconnu du grand public. Alors réjouissons-nous de faire partie d’un cercle d’initiés bien chanceux. Ceux qui voient des similitudes entre Mark Hollis ou son groupe Talk Talk et Perfume Genius exagèrent certes ; dans le même temps, il est presque impossible de trouver des descendants dignes au groupe culte anglais, et je dois bien avouer que Perfume Genius doit faire partie des (très) rares qui mériteraient cette comparaison.
(in heepro.wordpress.com, le 29/05/2017)
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