Bien sûr, les 911 milliards d'euros de crédits accordés globalement aux entreprises en 2016, qui permettent notamment de répondre à 90% des demandes de crédit d'investissement des PME, paraissent justifier les protestations des banques quand elles se voient reprocher d'être trop prudentes. Même le taux logiquement plus faible de satisfaction des besoins des TPE, à 82% au premier trimestre 2017, reste plutôt flatteur et devrait leur donner les moyens d'envisager sereinement leur développement.
Malheureusement, le tableau est beaucoup plus sombre en matière de financement de trésorerie : si les PME obtiennent les crédits qu'elles sollicitent dans plus de 80% des cas, plus d'une demande sur trois émanant d'une petite structure est rejetée. Or il est question là de la survie de ces acteurs qui, avant d'envisager une quelconque expansion, doivent commencer par stabiliser leur fonctionnement. Rappelons qu'un quart des défaillances d'entreprises seraient dues à des retards de paiement…
Comme le souligne un article du Figaro Économie, une des principales raisons de la défiance des banques vis-à-vis des TPE est la perception (raisonnable) d'un risque élevé, qui peut lui-même être attribué au fait (anormal) qu'elles ne connaissent pas ces clients. La relation étroite qui existait autrefois entre entrepreneurs et conseillers a plus ou moins disparu, entraînant directement la perte d'une source essentielle d'information (et d'empathie) qui transforme désormais le demandeur de crédit en un dossier anonyme.
À l'origine du phénomène, la transition vers la banque à distance – que ce soit avec les automates, les centres d'appel, les services en ligne, les applications mobiles… – affecte la fréquentation des agences, donc les opportunités de contacts et d'établissement d'une confiance mutuelle. S'enchaîne ensuite un effet boule de neige, avec la fermeture des agences presque désaffectées et l'augmentation du nombre de clients attribués aux conseillers, qui conduit à son tour à une déliquescence de la maîtrise des dossiers…
Il n'y a pourtant pas de fatalité ! Aujourd'hui, la connaissance des PME peut emprunter des voies nouvelles, plus « digitales », accompagnant l'évolution des comportements. Les exemples de solutions ne manquent pas : quand des startups telles qu'Estimeo ou Early Metrics (qui a récemment signé un partenariat avec LCL) sont capables d'évaluer la fiabilité de jeunes entreprises, les banques devraient être en mesure, avec les masses de données auxquelles elles ont accès, de tout savoir sur leurs clients…
L'enjeu est d'autant plus important que les petites structures ne disposent pas de beaucoup d'alternatives quand elles souhaitent financer leur trésorerie, même parmi les acteurs émergents (on peut citer Finexkap pour l'affacturage ; quant au crowdfunding, il devrait en principe être réservé à l'investissement). Alors, quand les banques se mettront-elles à faire entrer leurs processus de connaissance client dans l'ère digitale ?