Prix François Billetdoux : Sélection 2017

Par Stephanie Tranchant @plaisir_de_lire

Prix François Billetdoux : Sélection 2017

Remis lors de la fête des Grands prix de la Scam, le 23 juin, et doté de 5.000 €, ce Prix est attribué à l’auteur d’une œuvre littéraire publiée entre mars 2016 et février 2017, en langue française, évoquant l’univers de la littérature, de la photographie, du cinéma, de la radio, du journalisme ou de la télévision.

Le jury, présidé par Michèle Kahn et composé des membres de la commission de l’écrit Pascal Ory, Colette Fellous, Catherine Clément, Laura Alcoba, Benoit Peeters, Pascal Boille, Olivier Weber, Nedim Gürsel, Antoine Perraud, a sélectionné les ouvrages suivants : 
Le Titanic fera naufrage de Pierre Bayard ( Éditions de Minuit)

A l'image du romancier américain Morgan Robertson, qui raconta le naufrage du Titanic avec quatorze années d'avance, les créateurs semblent disposer d'un accès privilégié vers l'avenir, qui leur permet d'anticiper les guerres, les dictatures ou les catastrophes naturelles. Prendre la mesure de cette capacité prémonitoire ne devrait pas seulement inciter à leur confier des responsabilités politiques et à les associer aux recherches de la science, mais aussi à remettre en cause notre lecture des oeuvres ainsi que notre représentation de l'histoire littéraire et artistique.


Vie prolongée d’Arthur Rimbaud de Thierry Beinstingel ( Éditions Fayard)

A la suite d’une confusion, c’est avec la dépouille d’un inconnu qu’Isabelle Rimbaud fait le trajet de Marseille à Charleville.
Déjouant les pronostics des médecins, Arthur, lui, se remet.
Et ce sont les journaux qui lui apprennent sa mort…
Jadis poète, naguère marchand, Jean-Nicolas-Arthur Rimbaud sera-t-il capable de s’inventer un troisième destin ?
Relancé dans la tourmente de l’histoire, de l’affaire Dreyfus aux tranchées de la Première Guerre mondiale ; assistant stupéfait à l’élaboration de son propre mythe, à la construction de sa légende littéraire, celui qui écrivit « Je est un autre » avait-il imaginé à quel point cette phrase se révélerait prophétique ?


Sauve qui peut (la révolution) de Thierry Froger ( Éditions Actes Sud)

Juin 1988. En vue des festivités commémoratives de l'année suivante, la très officielle Mission du Bicentenaire de la Révolution française du ministère de la Culture contacte Jean-Luc Godard pour lui proposer de réfléchir à un film autour de 1789. Roman fleuve, roman cascade, Sauve qui peut (la révolution) raconte le travail buissonnier de JLG sur ce projet de plus en plus improbable, qu'il intitule bientôt Quatre-vingt-treize et demi. C'est l'occasion pour le cinéaste de renouer avec l'ami Jacques, perdu de vue depuis leurs communes années Mao, devenu entre-temps historien, opportunément spécialiste de la période. Sous prétexte de consultations pseudo-scientifiques, le dialogue reprend entre les deux hommes. Le cinéaste musarde, découvre le charme bucolique de l'île de la Loire sur laquelle Jacques vit seul avec sa fille Rose, et fait connaissance avec la demoiselle qui n'a pas vingt ans. Et Jacques confie à Godard les affres de la grande impasse qui l'occupe, les aléas du grand livre dans lequel il se noie : une vie de Danton très... alternative. Le sens (giratoire) de l'histoire, l'agonie du cinéma, l'espérance de vie des révolutions et le vieillissement des révolutionnaires sont quelques-uns des motifs qui animent cette fugue grisante, poignée de déroutes magnifiques dont Thierry Froger nous fait à la fois captifs consentants et complices ravis, dans un geste joyeusement blasphématoire, d'une audace, d'une liberté et d'une maîtrise rares.


Le roman impossible de Thierry Hesse ( Éditions de l’Olivier)

" Chaque matin, au réveil, mon visage me brûlait et je courais me regarder dans un miroir. J'allais réduire ma vie sociale, les soirées avec les amis et les sorties en ville ; je me cacherais des autres et des lieux fréquentés ; j'apparaîtrais à mes élèves dissimulé derrière des verres fumés et un foulard ; j'affligerais ma famille. C'était le visage de l'effroi. La mort de Malik Oussekine, dont je voulais faire un roman, me plongeait à présent dans la peur. J'y voyais une noirceur et une violence prémonitoire que je n'avais encore jamais éprouvées dans l'écriture d'un livre. Une noirceur bien réelle, menaçante, embrasée par les tragédies d'aujourd'hui. "
Le Roman impossible est la confession captivante de Samuel Richard, dont la vocation d'écrivain est soudain mise à mal. Parviendra-t-il à écrire le livre qui l'obsède depuis des années, un roman total, un roman de l'accomplissement ?


Dans l’existence de cette vie-là de Caroline Hoctan ( Éditions Fayard)

Et si notre existence n’était pas déterminée par nos origines sociales ou familiales mais par l’in­fluence des livres ? Et si le sens de notre existence n’était pas le fruit du hasard et de la contingence mais celui de la cosmogonie et de l’organisation des étoiles ? Tout quitter, partir au bout du monde, est-ce mourir un peu ou bien, au contraire, vivre plus intensément ? Existe-t-il un algorithme commun entre l’économie et la littérature ? La crise financière a-t-elle à voir avec la crise du roman ? Nos secrets de famille entretiennent-ils un rapport avec le secret de la littérature ? Lorsqu’un père joue le rôle d’un Sphinx, qu’en est-il de l’énigme à découvrir ? Qu’est-ce que les personnages  fictionnels nous disent de la réalité ? Commence alors pour le personnage – dont on ignore s’il est un homme ou une femme – une quête obstinée. Muni seulement d’une liasse de billets verts et d’une carte de visite portant un nom inconnu et une adresse, celui-ci entreprend un voyage de l’autre côté de l’océan, dans ce pays où l’on dit volontiers que tout est possible, afin d’y trouver des réponses.
Dans cet ambitieux deuxième roman, Caroline Hoctan interroge les liens cachés qu’entretiennent la littérature et l’accomplissement de soi dans un monde toujours plus déchiré par la vitesse du métal et des ­ flux.


Le monde est mon langage d’Alain Mabanckou ( Éditions Grasset)

 Né au Congo, partageant son temps entre la Californie où il enseigne comme professeur de littérature à UCLA (University of California – Los Angeles), Paris où il a fini ses études, et le monde qu’il parcourt pour présenter ses livres, Alain Mabanckou est un auteur en langue française pour qui sa langue n’est pas enfermée dans le carré français. Loin de là, elle est parlée dans le monde entier par les gens les plus passionnants et les plus inattendus.
Le monde est mon langage est le tour du monde de la pensée et des émotions telles que la langue française les véhicule, par les gens les plus divers, célèbres ou inconnus, adolescents ou vieillards, Haïtiens ou Français. Alain Mabanckou les a rencontrés et nous les raconte, en une suite de portraits admiratifs et aimants. JMG Le Clézio ou un inconnu de la Nouvelle Orléans, Sony Labou Tansi qui, au Congo, écrivait dans des cahiers à spirales devant deux posters du Che Guevara, bien d’autres encore.
Ils ont ces mots en partage et ils les partagent. Leur langage est notre monde.

Légende de Sylvain Prudhomme ( Éditions l’arbalète / Gallimard)

La Crau, désert de pierres aux portes d'Arles. Pays ras, pays nu, abandonné au mistral et aux brebis. C'est là que vivent Nel et Matt, l'un, fils et petit-fils de bergers, aujourd'hui photographe, l'autre, constructeur de toilettes sèches publiques, réalisateur à ses heures perdues. Entre eux une amitié forte, belle. Jusqu'au jour où, travaillant à un nouveau film, Matt s'intéresse à la vie de deux cousins de Nel aujourd'hui disparus. Deux frères maudits, qui ont traversé comme des comètes ces mêmes paysages, se consumant à toute allure, en pleines années 1980. Allers-retours à Madagascar, adolescence sans parents, fêtes, violence, liberté, insouciance : la trajectoire des deux frères, aussi brève qu'intense, se recompose peu à peu. Echos et correspondances se tissent entre passé et présent, renvoyant Matt et Nel à leurs propres choix, nous interrogeant, à notre tour, sur notre place dans le monde.


Rilke une existence vagabonde de Catherine Sauvat (Éditions Fayard)

Icône absolue de la poésie de langue allemande aux traces pourtant si parisiennes, Rilke est cet homme toujours en partance. De Prague à Paris, en passant par Munich, Capri ou Venise, il parcourt l’Europe en quête d’un havre d’inspiration.
Catherine Sauvat suit le poète dans ces éternelles errances à travers des lieux tantôt aimés tantôt haïs. Mais elle brosse aussi le portrait d’un personnage distant et dépressif dont les départs soudains ont déjoué toutes les relations. Car ce mondain et grand amoureux n’a rien autant chéri que sa solitude, moteur indispensable à sa création. Nombreuses sont celles qui souffrirent de ce séducteur impénitent, de Clara Westhoff, Paula Modersohn-Becker à Baladine Klossowska, quand la liaison ne pouvait se vivre qu’à distance et dans des lettres exaltées.
Catherine Sauvat nous plonge dans l’intimité de l’homme qui, par ces constantes lignes de fuite, cet acharnement à la distance, se révèle tel qu’en lui-même.
 

Dans le cadre de son action culturelle, la Scam, Société civile des auteurs multimedia, décerne également chaque année, deux autres prix littéraires, le Prix Joseph Kessel et le Prix Marguerite Yourcenar. La Scam représente les auteurs d’œuvres écrites, audiovisuelles, radiophoniques, journalistiques, multimédia dont elle gère les droits. 

Les précédents lauréats :

Michel Boujut, Daniel Timsit, Jean-Claude Lamy, Evelyne Bloch-Dano, Monique Nemer, Jérôme Michaud-Larivière, Jean-Jacques Pauvert, François Maspero, Francis Lacassin, Eric Faye, Jacques Bonnet, Lydie Salvayre, Jean-Luc Barré, Pascale Casanova, Claude Durand, Catherine Robbe-Grillet, Eric Chevillard, Vassilis Alexakis.