Cette fois-ci, La Nación met en une la photo de la manifestation
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Hier, le Sénat a voté à l'unanimité la loi rectificative sur les remises de peine de sorte que les détenus condamnés pour crimes contre l'humanité ne puissent pas en bénéficier. La loi avait été votée la veille par les députés nationaux. Et dès le vote du Sénat, le Président Mauricio Macri a signé la loi, ce qui la rend immédiatement applicable.
Plus tard, dans une conférence de presse dans la province de Mendoza, où il était allé inaugurer des installations européennes d'antennes géantes, le chef de l'Etat a affirmé qu'il avait toujours été hostile au bénéfice de remise de peine aux tortionnaires de la Dictature et à quelque procédure que ce soit qui puisse correspondre de près ou de loin à une impunité. Le problème est que certains de ses ministres se sont prononcés en faveur de l'arrêt de la Cour suprême qui accordait un régime de remise de peine dit du Jour compte double (2x1) (voir mon article du 4 mai 2017 à ce propos) et que lui-même a donc attendu près d'une semaine pour donner son avis, même s'il a pris l'initiative très rapide d'envoyer au Congrès le projet de loi qui vient d'être voté et qui corrige les vides juridiques dans lesquelles trois juges de la Cour suprême s'étaient engouffrés (1).
C'est la même chose à la une de Clarín,
qui lie le succès de la manifestation
et la validation de la loi grâce à la signature présidentielle !
En manchette au centre, une récompense prestigieuse pour le groupe musical Les Luthiers
Hier soir, une foule très dense a convergé vers Plaza de Mayo à l'appel des associations des droits de l'homme rassemblant les victimes de la dictature militaire de 1976-1983. Presque tous les manifestants arboraient le foulard blanc des deux branches de Madres de Plaza de Mayo, la première fois que cet emblème est adopté par tout le monde.
De son côté, le juge Eugenio Raúl Zaffaroni, ex-membre de la Cour suprême et siégeant aujourd'hui à la Cour Inter-Américaine des Droits de l'Homme (CIDH), a rejoint les manifestants d'hier et répondu aux questions des journalistes pour dénoncer l'absurdité de l'arrêt de la Cour du 3 mai dernier. Le Président Macri l'a visé parmi les personnalités d'opposition qui ont fait beaucoup de bruit cette semaine mais n'avait rien fait pour corriger vides juridiques créée par l'abolition de cette ancienne loi du 2x1, supprimée en 2001. Et pan sur le bec ! D'autant qu'il lui était déjà arrivé de voter une fois en faveur de l'application du 2x1 à un condamné pour crimes contre l'humanité, ce qu'il regrette aujourd'hui.
Au centre de la foule, un manifestant brandit un écriteau jaune
"La 2x1 pour le mandat de Macri"
Ce qui aurait pour résultat de réduire le mandat présidentiel à deux ans !
"Une mer blanche" dit le gros titre
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Il y a quelques jours, la Cour suprême argentine s'était vu critiquer vertement par le Haut-Commissariat aux Droits de l'homme de l'ONU (sous-secrétariat pour l'Amérique du Sud, siégeant à Santiago du Chili, voir mon article du 9 mai 2017).
Pour aller plus loin : sur le vote de la loi : lire l'article de Página/12 lire l'article de La Nación lire l'article de Clarín lire l'article de La Prensa sur la conférence de presse du président Macri : lire l'article de Página/12 lire l'article de La Nación lire l'article de La Prensa qui propose aussi la vidéo complète de la conférence de presse du président, hier, à Mendoza (17 minutes) sur les déclarations du juge Zaffaroni : lire l'interview complète dans Página/12 lire l'article de La Prensa lire l'article de Clarín
(1) Cette rapidité est en soi significative car rédiger un projet de loi, l'envoyer au Congrès, le faire porter à l'ordre du jour, tout cela demande d'ordinaire pas mal de temps. La rapidité de la procédure cette fois-ci est donc plutôt de bon aloi. Et pour le silence du président, celui-ci pourra toujours le justifier par la séparation des pouvoirs dont il ne cesse de protester qu'il en est un ferme partisan. Qu'il n'est donc pas derrière l'arrêt de la Cour. Personnellement, j'ai tendance à penser qu'il est sans doute sincère. Si l'on croit l'inverse aussi facilement, c'est peut-être parce que l'esprit partisan qui marquait tout acte de l'Etat sous les Kirchner a déformé le regard et fait prendre de mauvaises habitudes aux Argentins et, en particulier, aux journalistes.