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L'écologie et l'agriculture sont deux sujets qui n'ont malheureusement pas occupé une place importante dans le programme des deux candidats. Au fil de leurs interventions, ils ont cependant annoncé quelques mesures en faveur de l'agriculture biologique. Des mesures modestes qui, il faut le dire, ne sont pas à la hauteur des enjeux d'aujourd'hui.
Emmanuel Macron : du bio mais pas trop
Les principales mesures annoncées par Emmanuel Macron en faveur du développement de l'agriculture biologique sont 200 M€ par an pour financer les services environnementaux et 50% minimum de produits bio, écologiques ou en provenance de circuits courts, dans les cantines d'ici 2022.
Cette somme de 200 M€, qui s'ajouterait aux aides PAC versées aux producteurs bio pour leurs pratiques respectueuses de l'environnement (116 M€ aujourd'hui), est plutôt faiblarde. Elle " correspond peu ou prou " aux besoins à combler des nouvelles conversions et " à la nécessité de rémunérer déjà les pratiques des bio existants ", selon une lettre ouverte de la Fédération nationale de l'agriculture biologique (FNAB) datée du 3 mai. Elle écrit : " Il faudra être clair sur les priorités (...). Des milliers de productrices et de producteurs attendent de savoir si l'Etat sera à leurs côtés pour oser changer de système (...). Ils-elles attendent le signal pour répondre à la demande des consommateurs qui veulent de la bio Française ".
Du bio dans les cantines : mais combien et venant d'où ?
"J'ai pris l'engagement d'avoir 50% dans la restauration collective de produits qui viennent d'une agriculture biologique, écologique et locale. Certains voudraient plus, mais c'est un engagement déjà très fort. Ça concerne toutes les restaurations collectives publiques et privées, comme les cantines, les restaurants d'hôpitaux, les restaurations collectives d'entreprise...", a déclaré Emmanuel Macron en février 2017 lors d'une visite au WWF. Mais qu'entend-il par produits écologiques ? Quelle répartition prévoit-il entre les différentes catégories de produits ? Et pourront-ils être importés ?
Le candidat s'engage également à éliminer progressivement les produits phytosanitaires mais seulement quand des alternatives existent. Il veut placer la France en tête du combat contre les perturbateurs endocriniens et les pesticides. Pourtant, il est favorable à une agriculture productiviste, il n'y voit pas de contradiction.
" On pense qu'il y a une véritable coexistence possible dans l'agriculture. Oui, il y a des exploitations agricoles qui sont tournées vers l'export, qui sont compétitives. Oui, il y a aussi des exploitations agricoles qui ont fait le choix de la bio, des circuits courts et on doit aussi les accompagner. Ce n'est pas à l'État de choisir les modèles de distribution des agriculteurs, c'est à l'État de les accompagner, quels que soient leurs choix ", résume Audrey Bourolleau, responsable du volet agricole d'En Marche !, par ailleurs directrice de Vin et Société, organe de lobbying de la filière viticole, et ex-directrice marketing des propriétés Baron Philippe de Rothschild.
Le candidat veut consacrer 5 Md€ à la modernisation des exploitations agricoles, une politique qui n'est pas nouvelle et a accéléré les dépôts de bilan en provoquant un endettement mal venu en période de crise. Il est favorable à des allègements de cotisations sociales et des taxations. Il projette d'accorder un prêt d'honneur à taux zéro d'un montant de 50 000 € aux jeunes agriculteurs.
Un autre cheval de bataille du candidat est le " problème du juste prix payé (aux producteurs NDLR) et de répartition de la valeur ". Il annonce " un grenelle de l'alimentation qui mettrait autour de la table l'ensemble de la chaîne : les agriculteurs, les transformateurs, les distributeurs et les consommateurs ". Impossible de ne pas souligner que la recette de la concertation entre ces acteurs n'a jamais fonctionné jusque-là. Aussi, En Marche ! évoque d'éventuelle " méthodes coercitives ".
Oui aux OGM mais "pour la recherche"
Emmanuel Macron veut préserver la PAC et son budget de 9 milliards €/an. Il a rappelé qu'"en 2012, les aides publiques étaient de 12 milliards d'euros en France " en additionnant les aides de la PAC et celles de l'État, et qu'" en 2016, elles sont passées à 16 Mds € quand on rajoute le CICE et les aides à l'emploi " (pour sans doute moins de 500 000 exploitations, NDLR). Ce qui n'a pas empêché de très nombreuses faillites, hors production bio.
Quant aux OGM, l'ancien ministre de l'Economie est pour une "interdiction ferme des cultures plein champ" ce qui est le cas aujourd'hui mais il souhaite"explorer le potentiel de développement des OGM et [nouveaux OGM] en laboratoire", selon le site Inf'OGM.
Le FN : oui au bio et surtout français
Le Front national (FN) annonce également deux mesures en faveur de l'agriculture biologique : une TVA à taux zéro sur les produits bio (contre 5, 5 % actuellement) et une baisse de 10% des charges des exploitations bio afin de réduire coûts de production et prix à la consommation, selon Philippe Murer qui représentait le FN le 9 février à Paris lors d'une journée sur le programme agricole des candidats à la présidentielle. Pour Marine Le Pen, la bio est une filière à développer. " Le Front national voit cette évolution (l'augmentation de la demande pour la bio, NDLR) d'un oeil très favorable dès lors qu'elle vise la santé et l'emploi de nos compatriotes (...) ", déclare Michel Chassier, secrétaire départemental FN 41.
Le FN croit au développement massif de la bio grâce à " la commande publique qui est un levier très puissant ", explique encore Michel Chassier. L'accompagnement des conversions serait financé par une hausse de la TVA sur les produits agricoles importés. Le FN préconise d'ailleurs de " rompre avec le modèle économique fondé sur la mondialisation sauvage des échanges et le dumping social, sanitaire et environnemental ". La véritable écologie consiste à produire et consommer au plus près, écrit-il. Philippe Murer a accusé la politique européenne d'être incompatible avec le développement de l'agriculture biologique, pointant du doigt le CETA (accord commercial transatlantique). Ce dernier permettra d'inonder l'UE de produits qui, selon lui, ne respecteront pas les normes françaises.
Maintenir des petites fermes, innover en agro-écologie
Marine Le Pen veut renationaliser la politique agricole commune (PAC) en politique agricole française (PAF) et " revoir totalement le système " de distribution des aides. Elle rappelle que la France donne aujourd'hui 22 milliards d'euros par an à l'UE qui lui en rend 13 Md €, dont 9 Md € à travers la PAC.
" Il ne faut pas les distribuer uniquement en fonction des hectares mais en fonction des filières et des besoins ressentis sur le terrain ", précise Gilles Lebreton, député européen FN. " Le modèle de l'agriculture familiale doit être défendu, même s'il s'agit d'un modèle qui peut se moderniser, contre le modèle de la ferme des 1000 vaches ", déclare-t-il. L'élu frontiste se dit favorable à une politique agricole nationale plutôt qu'à une gestion des aides à l'agriculture biologique (aide de la PAC en faveur de l'environnement) par les régions. Il annonce une " défiscalisation les premières années de l'installation ".
Enfin, Marine Le Pen est opposée à la culture et l'importation des OGM, ils ne seraient autorisés qu'à la recherche en milieu fermé. Elle demande que les nouvelles techniques de modification génétique (Crispr/cas9, Talen, méganucléase, etc.) n'échappent plus à la réglementation sur les OGM comme c'est le cas aujourd'hui. Au sujet de la recherche, la candidate a déclaré : " Je veux une agriculture innovante dans le domaine de l'agroécologie (...). L'augmentation de 30% du budget de la recherche publique que je porterai permettra notamment d'épauler les agriculteurs dans ce domaine ".
Enfin, elle s'est prononcé pour un meilleur revenu aux agriculteurs. Selon les derniers chiffres de la sécurité sociale agricole (MSA), plus de la moitié des agriculteurs ont eu un revenu mensuel inférieur à 354 euros par mois, subventions européennes comprises.
Anne-Françoise Roger