Louis la brocante ne promènera plus son vieux Citroën Type H. Victor Lanoux s'est éteint dans la nuit du 3 au 4 mai, à Royan.
Né d'un père juif tunisien et d'une mère catholique normande, Victor Nataf est envoyé dans la Creuse, pour échapper aux rafles parisiennes. Il y vivra jusqu'à l'âge de 11 ans sous le nom de Victor Lanoux.
Il revient sur Paris et travaille dans les champs, à l'usine et en tant que parachutiste en Algérie. A 22 ans, il se retrouve machiniste sur le plateau de Notre-Dame-de-Paris de Jean Delannoy. De là va naître sa vocation pour la comédie. Il s'inscrit au cours de Solange Picard. En 1959, il commence par un rire dans Coquillage à l'oreille de Bompian. En 1961, il débute au cabaret avec un certain Pierre Richard. A eux deux ils s'escriment à faire rire le public par des sketches plus ou moins drôles.
L'homme a son premier rôle dans La Vieille Dame indigne de René Allio en 1964. Un film attachant évoquant la vieillesse espiègle et servi par une magnifique chanson de Jean Ferrat.
Repéré par Georges Wilson (le père de Lambert), il joue au Théâtre National de Paris, puis travaille avec Roger Planchon au Théâtre de la Cité de Villeurbanne, écrit et met en scène Le Tourniquet et Le Péril bleu en 1973 et 1974.
L'année suivante, Yves Boisset le recrute pour " Dupont la joie "(1974) et " Folle à tuer " (1975), tandis qu'il tourne dans " Cousin, cousine" de Tacchella (1975) avec Marie Christine Barrault. Avec Yves Robert, il joue dans Un éléphant, ça trompe énormément (1976) et Nous irons tous au paradis (1977) , Le Bal des casse-pieds (1992)
La production le tente. Il crée " Les films de la Drouette ", société avec laquelle il produit notamment " un si joli village " ou " Boulevard des assassins "
Et puis vient la fameuse série des " Louis la brocante " . On y retrouve le Victor Lanoux à la fois gouailleur et sympathiquement patibulaire.
L'homme est fragile du cœur. Il connaît une première épreuve cardiaque en 2007 et en ressort paraplégique. Malgré tout, il surmonte et tourne encore des épisodes du brocanteur.
Mais la camarde finira par le rejoindre. Il s'éteint en nous laissant le souvenir d'un acteur attachant.
Le meilleur hommage pourrait revenir à sa compagne de tournage, Evelyne Buyle, qui incarne son ex-femme dans la série télévisée :
C'était un immense travailleur [...] et c'était quelqu'un de très pudique, ce qui fait que l'on avait parfois l'impression que c'était un homme un peu bougon mais en fait c'était un cœur en or. Un homme d'une grande générosité. Et je crois que le public se rendait compte de ça.
Petit Victor loin dans ta Creuse
Qu'était la vie, horrible gueuze
En ces temps de tumeur maligne
Du boulevard des assassins
T'aura chanté douce cantate
D' un si joli village aimé
La paix rhabillant tout Paris
Tu reviendras dans la cité
Avec Pierrot, d'humeur maligne
Et te voilà dans le grand bain
Au bout du bout du banc, des planches
Tu deviens le grand comédien
Elle court, elle court la banlieue, oui
Pour te savourer à l'écran
Fine moustache et gueule d'amant
L'attrait pour ton jeu théâtral
Y a-t-il un Français dans la salle
Les voleurs de la nuit s'efforcent...
Mais même à eux faudrait payer
Pour qu'ils renoncent au grand honneur
Qui dédaignerait ton phrasé
Et te trouverait ridicule.
Je sais rien, mais je dirai tout
Je dirai tout de mon bien être
Si gentillet sous cet air dur
Mais moins retors, ah, je vous jure
Que le pachyderme éléphant
Ça trompe ça trompe énormément.
Tout ça c'est du passé Victor
Puis vient la nuit, l'exécuteur
Le crépuscule de ton vieux cœur
Jusqu'aux silences d'agonie
Avec un ange annonciateur :