Erri de Luca aborde, dans ce livre, l'énigme du corps et de sa représentation. Il choisit pour cela une sculpture du Christ en croix. C’est pour lui l’occasion de revisiter les préoccupations qui sont les siennes.
Un enfant rencontré à Naples demande au personnage dont nous suivons le récit « Düsseldorf », et celui-ci va lui acheter une carte pour lui montrer où se trouve cette ville alors que la demande était sans doute de l’y emmener. « Je suis un homme qui ne sait pas poser de questions. »
Qu’est-ce que le sacré ? « Les mots du crucifié sont sacrés, son corps non ». Pour connaître Jésus, il lui faudra parler avec le curé, qui est « un homme d’Amérique latine », mais aussi avec le rabbin et avec un ouvrier algérien, musulman, les trois religions du Livre, cette Bible dont on sait qu’Erri de Luca en lit un peu chaque jour, en hébreu. Et des lettres hébraïques sont inscrites sur la croix de marbre et sur les clous plantés dans les mains et les pieds du crucifié. Ces lettres permettent au rabbin de commenter un vers d’un psaume de David, traduit généralement par « pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Le rabbin dit qu’on peut lire ce vers en hébreu sans point d’interrogation et l'interprète comme « à un Adam tu m’as abandonné », c'est-à-dire : je suis un homme, simplement, condamné à mort nu.
Le sculpteur qui avait réalisé cette oeuvre a éprouvé dans son propre corps les souffrances dont il a représenté les effets. Celui qui est chargé de « retirer le drapé » va aussi tenter de comprendre ce qu’il y a d’humain dans cette figure et demande que son nom ne soit pas cité comme restaurateur de l’oeuvre. « La prétention de laisser un signe n’est pas à notre portée ».
D’autres réflexions traversent ce livre. Et on y trouve cette phrase, qui fait penser au conte du manteau du roi présenté ici : « Tu exécutais ce travail avec orgueil et tu as été repoussé. Tu dois l’exécuter en tremblant ».