Dans une île de citrons amers
Où les fièvres froides de la lune
Travaillent les sombres globes des fruits
Et l’herbe rêche sous les pieds
Torture la mémoire et ravive
Des habitudes que l’on croyait mortes à jamais,
Mieux vaut faire silence, et taire
La beauté, l’ombre et la violence;
Que les antiques gardiens de la mer
Veillent sur le sommeil des songes
Et la tête bouclée de la mer égéenne
Contienne ses fureurs comme des larmes non versées
Contienne ses fureurs comme des larmes non versées.
*
Bitter Lemons
In an island of bitter lemons
Where the moon’s cool fevers burn
From the dark globes of the fruit,
And the dry grass underfoot
Tortures memory and revises
Habits half a lifetime dead
Better leave the rest unsaid,
Beauty, darkness, vehemence
Let the old sea-nurses keep
Their memorials of sleep
And the Greek sea’s curly head
Keep its calms like tears unshed
Keep its calms like tears unshed.
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Lawrence Durrell (1912-1990) – Truth, 1er mars 1957 – Citrons acides (Éditions Buchet-Chastel, 1961) – Traduit de l’anglais par Roger Giroux