Quand on lui dit que Jeeg Robot est un film d'auteur, Gabriele Mainetti jette un coup d'oeil à ses distributeurs et nous remercie infiniment. " Grazie! Grazie! Grazie! "
Doté de sa force surhumaine, Enzo se contente de poursuivre sa petite vie de malfrat. La figure du héros cachée en lui ne sera révélée que dans l'urgence de sauver une vie ou le dérangement de sa routine. On connaissait les anti-héros immatures ou mégalomanes de Marvel, mais on était encore loin de ce portrait d'homme renfrogné qui n'apprécie que ses crèmes vanilles et ses DVD porno.
Son quotidien serait d'ailleurs (presque) intact sans la présence de l'excentrique Fabio, surnommé le Gitan. Mélomane, maniaque, et surtout complètement taré, ce mafioso mérite sa place au panthéon des supervillains. Son désir de célébrité et de reconnaissance va se nourrir du déclin de son organisation criminelle. Chaque apparition est jouissive, quitte à rappeler un certain Heath Ledger.
Entre les deux, la demoiselle en détresse prend les traits d'une jeune fille coincée quelque part en enfance. Son traumatisme lui fait fuir la réalité et voir le monde à travers un prisme de dessin animé. Le réalisateur prend le risque de la sexualiser, au risque de choquer.
Ces trois caricatures décortiquées gravitent dans un univers sombre, ponctué d'un humour noir et burlesque savoureux. Entre le western spaghetti et le manga, nombreuses sont les inspirations parfaitement digérées du cinéaste, glissant même vers le giallo le temps d'une séquence. C'est finalement dans les scènes d'action que la caméra se laisse aller, brisant les lignes à outrance, faisant ressentir la moindre des ondes de choc.
Gabriele Mainetti a monté sa propre société de production pour sortir un film qui correspondait à sa vision, et particulièrement difficile à produire en Italie. Il en ressort avec sept David, la récompense italienne. Un exemple et une réussite.