Lorsque l'on entre dans la salle, ce sont les mots de " La Laideur " qui nous accueillent. Le ton est donné. Safia Nolin, plus proche que jamais de son public comme elle nous le confie amusée et gênée, attire tous les regards. Le sien est baissé, ses yeux fermés, elle semble concentrée, elle vit sincèrement ce qu'elle chante. Et ce qu'elle chante n'est pas joyeux : l'abandon, la séparation, les amours impossibles...
Les mots sont poétiques et la voix intense. Tout en nuances, son jeu de guitare est délicat. Échangeant sa guitare folk pour une autre acoustique mais celle-ci semble avoir été bricolée pour l'électrifier. Le son est aérien, tantôt agressif, tantôt doux. La réverb' est puissante ce qui participe à l'effet fantastique et envoûtant.
Envoûté, le public l'est depuis les premiers titres. Il ose même demander à la fin de " Technicolor " le titre du morceau. Les applaudissements sont chaleureux, les quelques curieux arrivés là par hasard sont vite conquis par la grande blonde à la voix si intime. Elle nous parle de son passage en Suisse où elle a découvert la fondue, de sa passion pour le houmous, et en bonne Québécoise de passage en France, elle nous parle de la reine Céline, dont elle reprend le titre " D'amour ou d'amitié ". À la fin du set, le public en veut encore, elle ne se fait pas prier longtemps et revient pour jouer en total acoustique " Igloo ". Que c'est beau, que c'est beau !
Peter Silberman s'assoit, guitare électrique sur les genoux, faible halo de lumière autour de lui. Il invite le public à ne pas hésiter à s'asseoir lui aussi, s'il en ressent l'envie. Il prévient que ce qu'il va jouer n'est pas fait pour nous tenir éveillé.
Et en effet, Peter Silberman est l'incarnation même du minimalisme poétique. Quelques notes de guitare en écho, une voix douce et mélodieuse et surtout le silence, voilà sa recette d'une musique hypnotique et captivante. Les esprits dérivent, le jeune Américain nous emmène dans des contrées où tout n'est que douceur, volupté et élégance.
Beaucoup de passages sont chantés a cappella d'une voix assurée mais discrète, ronde et aiguë. La salle du Pop-Up ne met pas en valeur les harmonies, le bruit du bar et des portes brise parfois la douceur de l'atmosphère créée par Peter, qui nous conseille d'ailleurs de commander uniquement " from the tap " pour éviter le bruit du shaker. Mais lorsque la bulle de silence est en place, il est difficile de ne pas se laisser emporter dans les méandres délicats des mélodies de Peter Silberman et d' Impermanence, son nouvel album.
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Texte : Jeanne Cochin / Photos : Emma Shindo