Jean-Christophe Buchot : American Requiem

Par Stephanie Tranchant @plaisir_de_lire

American Requiem de Jean-Christophe Buchot (auteur) et Hélène Balcer (illustrations), Yann Voracek (graphisme)   4/5 (10-04-2017)

American Requiem (185 pages) est paru le 15 février 2017 aux Editions  La renverse.

L'histoire (éditeur):

Depuis l’autre côté, la voix de JFK nous parvient par éclats, esquilles, fragments de souvenirs se réunissant telles les pièces d’un puzzle onirique et pourtant parfaitement documenté. Il a fallu sept ans à Jean-Christophe Buchot pour écrire ce roman noir qui tient tout autant de la poésie que de l’essai.

Mon avis : 

American Requiem est l’histoire d’un homme que tout le monde semble connaître mais qu’on découvre sous un autre jour.

Ecrit à la première personne, ce texte nous permet de découvrir l’histoire (posthume) personnelle de John Fitzgerald Kennedy, un homme à la recherche de l’amour de ses parents, de la chaleur de ceux qui se sont souvent détachés de lui, un homme que les médecins s’évertuaient à diagnostiquer mourant (presque incapable à cause de sa colonne vertébrale fragile) et pourtant increvable, d’un homme à l’histoire familiale complexe et lourde à porter (on découvre là de manière touchante comment il est devenu l’aîné et comment, pour sauver l’image de lâche qui a collé à la peau de son père durant la seconde guerre mondiale, il est devenu héros de guerre incapable d’oublier celle qu’il a aimée mais quittée), un homme sous pression des aspirations paternelles.

« C’était à moi désormais de réaliser ses ambitions avortées. A moi de faire croire aux électeurs qu’un beau gosse en miettes peut devenir un grand Président des Etats Unis. »

Partie IV Offertoium

« J’ai quitté Inga. Elle savait que j’atteindrais la plus haute marche de l’échelle et qu’elle n’y avait pas sa place. Elle savait que ce serait la plus dangereuse de toutes les marches. Elle savait que j’avais un autre destin, qu’il y a des dates, qu’il y a des lieux, et que pour marquer les esprits, il ne faut pas rater les opportunités qui s’offrent à vous, surtout celle de mourir en beauté. Avec Inga, j’aurais pu avoir une tout autre vie, mais j’avais rendez-vous avec l’histoire. »

Parie VI Benedictus

Le narrateur revient sans cesse sur cette mort et, à mesure qu’il évoque sa vie, les détails de sa mort (de ce jour et de cette traversée en Lincoln à Dallas) ne cesse de de dérouler en filigrane jusqu’à devenir omniprésents et bouleversants.

American Requiem possède une mise en page très particulière mêlant images (et constructions artistiques évocatrices) et textes biographiques dans lesquels citations et poésie sont très présents.

L’écriture de Jean-Christophe Buchot est très puissante. Par quelques mots, quelques détails, sans longueur ni effet de style journalistique, le choix des évènements évoqués avec force de la bouche de l’Homme, l’auteur confère à ce texte un intérêt vif et surtout une émotion toute particulière. On se sent proche de John Fitzgerald Kennedy qui reprend ici vie. Ses faiblesses (que je ne luis connaissais pas, gardant l’image de l’homme charismatique, charmant, charmeur et engagé) tout autant que son histoire familiale, sur plusieurs générations, faite de sacrifices et de pression, et son amour des femmes le rendent très touchant.

Il ne s’agit pas du tout d’un livre chantant les louanges de JFK mais de fragments de vie, qui sonnent ici comme des souvenirs, et qui laissent une étrange sensation d’avoir été son confident quelques heures.

American Requiem est une texte (que j’ai quand même du mal à qualifier de roman) très bien écrit, instructif, fort et chargé de mélancolie.

« La route est longue avant le repos. J’étais las de toujours sourire. »

Parie VI Benedictus