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L'anniversaire de la Révolution des Œillets c'est demain. A Fontenay-sous-Bois c'est Vendredi dernier que nous nous sommes réunis pour commémorer ce moment où avec une détermination pacifiste le peuple portugais s'est libéré d'un joug terrible. Aujourd'hui je ne déroge à mon habitude de commémorer sur mon site ce moment de l'histoire! Voici ma contribution écrite quelques heures avant le scrutin du dimanche 23 avril mais qui trouve encore toute son actualité avec le second tour de nos élections présidentielles qui sont sous la menace d'une présence de la fasciste Le Pen! "Le 25 avril 1974 est une date qui a marqué de manière indélébile ma vie et celle de la grande majorité des Portugais. Ce fut une révolution pacifique, au succès incontestable, qui eut une immense répercussion en Europe et dans le monde. La "révolution des œillets" a mis fin à une dictature fascisante de quarante-huit longues et cruelles années qui s'était maintenue grâce à la censure et à une police politique et qui a bloqué notre pays durant près de cinq décennies sur le plan politique, culturel, économique et social." Mário Soarès, ancien président portugais, figure historique de la lutte contre la dictature. La "Révolution des oeillets", au soir du 25 avril 1974, a renversé en un jour le régime salazariste. Cette dictature contrôlait le pays depuis plus de trente ans, d'abord sous la férule d'Oliveira Salazar jusqu'à sa mort en 1968, puis de Marcelo Caetano. Le mécontentement avait grandi au sein de la population et dans l'armée, notamment à cause d'une politique coloniale coûteuse en hommes et en matériel. Depuis le milieu des années 60 en effet, le Portugal devait envoyer en masse des troupes pour rétablir l'ordre face aux révoltes des peuples colonisés. Initié par une poignée de jeunes capitaines, le coup d'état largement improvisé du 25 avril est porté par un mouvement populaire inattendu. Sur les ondes, les putschistes donnent le signal de l'insurrection militaire. En occupant les points stratégiques de la capitale, les capitaines contraignent le président du Conseil en exercice, Marcelo Caetano, à la démission. Loin de rester à l'écart des événements, la population lisboète se presse dans les rues et pactise avec les soldats mutins en accrochant au bout de leurs fusils des oeillets rouges et blancs, fleurs de saison qui deviennent le symbole de l'événement. La singularité de cette Révolution tient au fait que, bien qu'initiée par des militaires, elle reste pacifique ( 6 morts seulement parmi les manifestants) et contribue à restaurer la démocratie au Portugal. Dès le 26 avril, le général Spinola, devenu chef d'une Junte de Salut National, proclame la restauration des libertés publiques. Les prisonniers politiques sont libérés et les exilés rentrent au pays, notamment Mario Soarès, opposant socialiste au régime salazariste. Le général Spinola nommé président de la République participe à la constitution d'un gouvernement pluraliste au sein duquel Soarès, ministre des Affaires étrangères, entame le processus de décolonisation des possessions portugaises en Afrique (Angola, Mozambique, Guinée-Bissau, Sao-Tomé et Principe), achevé à la fin de l'année 1975. Trois jours après la révolution des oeillets, les deux principaux partis de gauche, le Parti Communiste Portugais et le parti Socialiste sont sortis de la clandestinité, pour rendre hommage aux forces armées. Plusieurs syndicats demandent la reconnaissance du droit de grève et l'amnistie générale. La démocratie est en marche et le Portugal prend sa place, toute sa place dans le concert des nations. Ensemble ce soir nous partageons l'instant où la flamme de la mémoire éclaire nos consciences. Ensemble nous partageons ce privilège de savoir par l'expérience ce que signifie le repli sur soi, le recours aux méthodes violentes d'un nationalisme exacerbé, le rejet de l'altérité. Nous savons. Nous savons tous que les volontés des marchands de rêve d'une France soi-disant retrouvée, indépendante et forte, les volontés des initiateurs de ces mirages sont des prisons sociales et économiques que tentent de masquer les accents populistes de leurs discours. Aujourd'hui nul d'entre nous ne peut ignorer le sens du fascisme, le sens de l'extrémisme de droite se nourrissant aux sources doctrinaires d'un intégrisme religieux qui va à l'encontre d'une évolution harmonieuse de notre peuple. Nous sommes à quelques heures d'un scrutin national sur lequel plane l'incertitude avec la présence de forces obscurantistes,anti populaires, anti sociales toujours prêtes à anéantir les fondements de notre démocratie républicaine, laïque et citoyenne. Dimanche pensons tous à cette libération du peuple portugais, à cette lumière que le Portugal à offert au monde, à ces œillets de la vie enfin reconquise et faisons barrage aux tristes desseins d'une droite extrême et d'un fascisme décidés à anéantir les fruits d'une liberté durement conquise. Alors qu'à Marseille la candidate fasciste en a appelé ses troupes à l'insurrection nationale pour passer au premier tour, je voudrais que nous prenions conscience de la dimension historique de notre moment de mémoire et de recueillement pour célébrer ce bien si précieux qu'est notre liberté.