Devant ce colosse aux pieds d’argile, la Fintech française Lydia n’a pas à rougir d’avoir réussi avec brio son pari de devenir une des applications de paiement mobile les plus performantes, mais la concurrence est rude, comme l’atteste le lancement ce mois-ci d’une nouvelle offre de paiement mobile sur Gmail, et les lignes sont rapidement mouvantes. Et les banques l’ont bien compris, préférant se rapprocher davantage des Fintech. Pourtant, les GAFA se verraient bien partenaires privilégiés des acteurs traditionnels. « Nous sommes, par notre capacité d'innovation et par les très nombreuses personnes qui utilisent nos plateformes, un partenaire stratégique de la transition digitale des banques », argumentait l’année dernière Laurent Solly, directeur de Facebook France.
Et à Nick Leeder, directeur de Google en France, de rassurer : « Nous n'avons pas du tout pour ambition d'empiéter sur le travail des banques ». Mais les rapprochements naturels s’effectuent dans les faits davantage avec les Fintech, alliés de choix pour les banques. « Pour résister à ce rouleau compresseur, banques, assurances et Fintech devront inéluctablement faire alliance pour contrer ces nouveaux entrants, à la force de frappe financière phénoménale », précise Stéphane Olmi, Managing Partner chez AEC Fintech. Le Groupe BPCE a ainsi racheté l’allemande Fidor, Goldman Sachs est devenu l'actionnaire majoritaire de Meilleurtaux.com tandis que Crédit Mutuel Arkea est entré au capital de la star de l’insurtech Fluo.
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En vérité, le vieux continent redoute de voir les GAFA emboiter le pas d’un Alibaba, ce monstre du e-commerce devenu un géant de la finance notamment à travers sa filiale Ant Financial. Le mois dernier, cette dernière a mis la main sur MoneyGram International pour 880 millions de dollars, opération qui marque l'affaiblissement des acteurs traditionnels du transfert d'argent. Et le chinois ne cache pas ses ambitions internationales, concluant de multiples alliances à l’instar de celle avec Axa, en vue de développer et distribuer dans son réseau les produits de l’assureur français. Alors, même si l’Europe parvient à contrer les offensives des Gafa, parviendrait-elle à soutenir l’assaut prochain des BATX (Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi) ? En tout cas, elle compte bien s’appuyer sur l’union des banques et des Fintech pour y parvenir. Tout récemment, la Commission européenne dévoilait en effet un plan d’action sur les services financiers aux consommateurs visant à supprimer les barrières nationales et « soutenir l'essor d'un monde numérique innovant capable de surmonter les obstacles au marché unique ». La Commission a également lancé une consultation publique sur les Fintech, présentées comme « la nouvelle frontière dans le domaine des services financiers ». La stratégie de l'Union européenne pour la Fintech devrait ainsi être dévoilée avant la fin de l'année. A suivre… Face à cette horde de nouveaux entrants, il n’en demeure pas moins que les banques continuent à régner en maîtres sur leur territoire. Encore mieux, avec 23,5 milliards d’euros de profits cumulés, les six principaux groupes bancaires français affichent une rentabilité record depuis la crise de 2008. C’est sans compter sur la hausse annoncée des taux d’intérêts qui devrait redorer le coût du crédit et la santé des banques.
Mais internet, cette machine à créer des monopoles, ne laisse rien de marbre, et les changements de paradigmes sont bien souvent brutaux. Blockbuster vs. Netflix, AccorHotels vs. Airbnb, Uber vs. taxis, les exemples sont pléthoriques et donnent tous le vertige. En réalité, la bataille de la technologie et de la finance ne fait que commencer. Prédire qui sera le vainqueur revient à lire dans les feuilles de thé – chacun y va de son mot et de sa vision des choses. Mais il est clair que pour certains acteurs, qu’ils soient traditionnels ou dans la tech, la saveur sera corsée.
A propos des auteurs : Arthur de Catheu et Cédric Teissier sont dirigeants fondateurs de Finexkap.