Finlande - 2017 - 1h38
Réalisateur: Aki Kaurismäki
Scénario: Aki Kaurismäki
C'est l'histoire de deux destins qui se croisent, deux changements de vie à des échelles différentes. Wikhström, cinquantenaire, quitte sa femme et achète un restaurant. Khaled, Syrien, arrive en Finlande après avoir traversé l'Europe. Après s'être vu refuser l'asile, il atterrit dans ce fameux restaurant. De ces deux destins, Aki Kaurismäki tire un mélange de genres savoureux.
L'histoire de Khaled a un écho éminemment politique. Sa demande d'asile est conduite - et refusée - avec un décalage furieusement ironique, mais ne perd pas de vue une réalité dramatique lorsqu'il racontera la mort de sa famille et sa fuite à travers l'Europe. " Ici il n'y a pas de guerre " dira-t-il, avant de se heurter brutalement à la violence d'un groupe raciste. Le réalisateur finlandais garde ainsi son œil critique sur l'actualité, mentionnant Alep, comme le lui permettaient dans Le Havre son personnage immigré d'Afrique noire et la mention de la jungle de Calais.
Wikhström, acheteur impulsif d'un restaurant, représente une storyline plutôt légère, entouré de seconds rôles qui enchaînent les comiques de geste et de situation, avec une impassibilité hilarante. Lorsqu'enfin les deux personnages sont réunis, c'est pour nous faire suivre les aventures burlesques de ce restaurant qui cherche sa propre identité (voyez ici le sous-texte), au risque d'être excentrique et ridicule.
Ce glissement vers l'absurde est opéré de manière inattendue, mais Aki Kaurismäki ne perd pas de vue que l'humour est là pour dérider et faire passer ses messages. Très justement, l'épilogue retrouvera le sérieux du prologue.
Sa mise en scène garde un certain classicisme qui me plait particulièrement, avec une image qui met en valeur les personnages. Flirter avec la fable lui permet de justifier l'apparente naïveté de ce qu'il dénonce. Le tout se déroule sur une succession de chansons intradiégétiques, sur une palette allant du blues finlandais à la musique orientale.