Auteur : Laurent WhaleÉdition : Folio SF
Parution : 2017Pages : 564
Prix : 8,80 €Genre : Science-Fiction
uinze ans ont passé depuis l'invasion venue du Nord, mais le monde ne s'est pas amélioré, bien au contraire... La misère et la famine règnent sur un pays ravagé. Villes fantômes, bandes organisées, soldats de fortune et sectes d'illuminés en tout genre se partagent la route du Sud. Il faudrait être fou pour l'emprunter. Fou... ou déterminé.
Lorsque son frère est porté disparu, Miki, le jeune mécano, se met en tête de rallier la péninsule ibérique. A ses côtés, Toni, le pilote, et Cheyenne, le hors-mur, reprennent du service !
Commence pour eux un périple à travers un pays en proie aux flammes et au chaos. Et, alors que les survivants se disputent les miettes de la civilisation, une menace resurgit des abysses du monde d'avant. Un cauchemar sans nom qui pourrait bien barrer la route aux damnés de l'asphalte...
e roman est en fait la suite d'une sorte de diptyque, qui se passe 15 ans après Les étoiles s'en balancent. Mais ce tome peut se lire de manière totalement indépendante : ça a été mon cas, et ça ne m'a posé aucun problème lors de la lecture.
Avec Les damnés de l'asphalte, Laurent Whale plonge ses lecteurs dans un univers post-apocalyptique en pleine dégénérescence : l'homme survit dans de petites communautés éparses qui se méfient les unes des autres, chacune renfermée sur elle-même. Il n'y a donc aucun semblant d'ordre ou de cohésion, si ce n'est un groupuscule qui rappelle fortement l'Inquisition et qui tente de s'imposer par la force et de gouverner par la crainte, s'accaparant certaines ressources et exploitant leurs congénères comme du bétail.
C'est dans ce cadre que Miki va quitter sa petite communauté pour tenter de retrouver son frère, parti en reconnaissance par les airs il y a deux ans... et porté disparu depuis. Après une première expédition ratée, Miki se lance dans une dernière tentative : celle de toutes les folies, celle qui lui redonnera espoir ou au contraire, où il retrouvera un petit bout de bonheur. Mais c'est aussi une expédition qui pourrait coûter la vie à tous ses participants, car le monde au dehors est particulièrement hostile.
En effet, l'univers proposé est très sombre, et Miki, n'est pas très optimiste en ce qui concerne l'avenir de l'Humanité : ce qu'il voit laisse confirmer que l'Homme n'apprend pas de ses erreurs, et que même livré à lui-même, sans technologie, il s'abîme dans les pires bassesses, que l'entraide reste encore trop rare. Ainsi, voyager dans ce monde est très dangereux, car chaque rencontre peut se solder par une blessure, voire la mort. Dans le meilleur des cas, un repas sera partagé, quelques informations échangées, un moment fugace de détente se présentera, mais ces rencontres sont rares.
On retrouve d'ailleurs une certaine répétition dans le schéma directeur du récit : le voyage des personnages alterne ainsi entre accalmies bienvenues et rebondissements inattendus... qui ne le deviennent plus trop au fur et à mesure des répétitions. Chaque instant de répit se paye très cher, et la mort rôde toujours au détour du chemin...
Les personnages sont bien développés, même si j'avoue avoir eu une petite pointe d'agacement du fait que les voyageurs ont une âme de héros et cherchent à sauver tous ceux qu'ils rencontrent... ce qui, au passage, leur coûte parfois très cher, mais ne les empêche en rien de recommencer deux jours plus tard. Bien sûr, ils savent bien qu'ils ne peuvent pas sauver la terre entière, et ils laissent donc un paquet de gens en difficulté derrière eux, mais globalement, ils risquent plusieurs fois leurs vie pour sauver des inconnus, ce qui ne colle pas trop avec l'univers sombre et la tendance défaitiste du personnage principal. D'autant qu'ils apparaissent souvent comme des combattants ultra-aguerris qui font mouche à chaque fois, ce qui ne cadre pas vraiment avec ce que l'on sait de Miki.
En fait, j'ai de loin préféré les personnages secondaires, certains sont particulièrement intéressants. Les relations au sein de la petite troupe et la dynamique de groupe est bien décrite, et leurs rencontres avec d'autres cultures et d'autres protagonistes est enrichissante à la fois pour le lecteur et pour les personnages eux-mêmes.
Pour finir, j'ai été un peu frustrée sur certains aspects de l'univers, car j'aurai aimé en savoir plus. L'auteur semble évoquer certains éléments comme s'ils étaient acquis pour le lecteur, donc ce sont peut-être des choses qui sont déjà développées dans Les étoiles s'en balancent, je n'ai pas vérifié ce point. En tout cas, pour moi il manquait un peu d'éléments supplémentaires sur les hors murs, sur ce qui a conduit le monde à s'effondrer de la sorte, sur le passé de la petite communauté d'où vient Miki, sur les Sectiens. Et la fin est un poil décevante : trop rapide, trop sanglante, trop facile dans la résolution de l'intrigue et dans l'explication du pourquoi / comment. Bref, j'ai eu le sentiment que l'auteur ne savait pas trop comment finir son histoire, et qu'il est meilleur pour raconter le voyage que pour en décrire la fin.
Car en soi, l'intrigue tient en quelques lignes. Ce qui fait tout l'intérêt du roman, c'est bien ce road trip au goût d'aventure, celui qui fleure bon le danger, qui nous rappelle à quel point la vie est précieuse, même dans ce monde post-apocalyptique. Et dans cet exercice, Laurent Whale est vraiment bon, malgré les petits bémols évoqués.
Les damnés de l'asphalte est un road-trip bien mené qui fleure bon l'aventure et le danger, dans un univers post-apocalyptique sombre. L'intérêt du roman réside dans le voyage lui-même et non dans sa finalité - un peu trop facile et rapide - ainsi que dans ses personnages et leurs interactions. Laurent Whale, à chaque étape du périple, cherche à avertir le lecteur des dangers qui guettent notre société, tout en lui servant un récit divertissant tourné vers l'action. Un roman efficace malgré quelques bémols, qui n'effacent rien au plaisir de prendre part à l'expédition de Miki, Toni et Cheyenne en terre espagnole.