Présentation de ‘éditeur :
Ana a quitté un mari, une villa, un commerce ambulant florissant – bref, une vie cossue, mais morne – sur un coup de tête, après avoir rencontré sur un marché un fonctionnaire retraité portant beau, Édouard. Mais la vie que celui-ci lui impose, dans une maison décrépite, est celle d’une servante corvéable à merci… Rattrapée par ces réalités à la limite du sordide, Ana commence par se résigner, avant de trouver au bout de quelques années la force de tout quitter à nouveau pour vivre dans le calme d’une solitude acceptée. Un texte sobre, épuré, comme Michelle Fourez sait les faire, sur les illusions perdues d’une femme plus très jeune…
C’est mon Michelle Fourez annuel
Après celui-ci, il me reste un petit Lucioles et deux autres romans, le plus ancien et le plus récent en grand format. J’ai choisi Ana parce que ce personnage est flamand et cela fait un petit lien avec ma lecture précédente.On retrouve dans ce texte court le cadre et des éléments familiers à Michelle Fourez : une vie à la ferme, une maison dans ce qu’on imagine être le Pays des Collines (près de Frasnes, où habite l’auteure), un prof, un personnage un peu en décalage avec son entourage, un secret enfoui, la présence apaisante de la nature.
Ici, Ana a quitté son mari et son univers rassurant mais morne sur un coup de tête, elle s’est laissé séduire par Edouard, croyant vivre enfin une vie plus cultivée, plus exaltante. Mais elle se retrouve bien mal traitée par ce vil séducteur dont la naissance porte un secret. En est-i conscient ? Ce secret détermine-t-il son caractère et sa manière de vivre ? Ce sont des questions dont nous n’aurons pas la réponse, et pourtant elles sont posées par la narratrice, qui donne des cours de conversation espagnole à Ana. La lecture se termine sur une forme de frustration : certes on est rassuré de savoir qu’Ana a réussi à échapper à Edouard mais nous n’avons pas toutes les réponses aux interrogations posées, c’est peut-être ce qui fait que c’est le texte publié dans la collection Lucioles qui me plaît le moins. Mais la plume de Michelle Fourez, précise et sensible, est toujours bien présente : j’aime comme elle sait faire percevoir les sentiments en évoquant la nature, par exemple lorsque la narratrice regrette l’absence d’Ana en observant qu’un oiseau n’est pas revenu au printemps ou quand le brouillard accompagne l’expérience traumatisante d’une enfant.
Même si j’ai un petit bémol pour ce récit en particulier, je ne me lasse pas de l’univers de Michelle Fourez…
« C’est en octobre 1995 que j’ai rencontré Ana pour la première fois. J’étais assise à la terrasse de notre jardin, tout en haut de la colline. Une terrasse en bois qui ressemble à une scène de théâtre villageoise. Je goûtais les derniers soleils, à la tombée du jour, et un écureuil devait m’avoir distraite : bien que je l’attendisse vraiment, je ne m’étais pas aperçue de la présence d’Ana dans le petit chemin qui monte chez nous, tout en haut de la colline boisée, là où s’arrête le village… L’écureuil avait disparu derrière un tronc et mes yeux étaient revenus au chemin. » (p. 5)
« Février 1998. La neige recouvre la terrasse, et j’attends en vain les deux sittelles torchepot qui nichaient l’an dernier dans le jardin. Cette année, rienque des mésanges, un pic épeiche et des pinsons. Pas les verdiers. Pas le geai. Pas les sittelles torchepot.
Je ne sais ce qu’est devenue Ana. Je ne pense pas qu’elle soit encore au village. Je ne la croise plus jamais, grande sur son vélo trop petit. » (p.7)
Michelle FOUREZ, Ana, Collection Lucioles, Editions Luce Wilquin, 2005
Classé dans:De la Belgitude, Des Mots au féminin Tagged: Ana, Editions Luce Wilquin, Michelle Fourez