D'après Picasso. Le visage de la paix. 1950
1 / L’humanité est un tout indivisible, une communauté planétaire, la communauté « première », dont l’unité doit reposer non sur l’impérialisme d’un Etat ou d’une culture mais sur la participation de tous les peuples. Une unité symphonique et non impériale,fondée sur un développement solidaire et un changement radical des rapports Nord-Sud.Le devoir primordial des communautés « secondes » et de leurs membres est de servir cette unité et son développement créateur.
- Seule la coordination universelle des efforts de développement de l’homme peut permettre de résoudre les problèmes de la paix, de la faim dans le monde et de l’immigration, comme du chômage forcé ou de l’oisiveté parasitaire.
- Il garantit l’épanouissement, en chaque être humain, quel que soit son sexe, son origine, sa vocation, de toutes les possibilités créatrices qu’il porte en lui. Nul intérêt personnel, national, corporatif ou religieux, ne peut avoir pour fin la concurrence, la domination, l’exploitation du travail d’un autre ou la perversion de ses loisirs.
- Il garantit la liberté d’expression et de pratique à tout humanisme, c’est-à-dire à toute doctrine servant les intérêts de l’humanité comme un tout, et à toute religion, c’est-à-dire à toute croyance attribuant une origine divine à ce tout.
- Ce devoir exclut toute prétention à l’exclusivité et à la domination d’une croyance, d’une nation, d’un groupe, d’un individu. Sont donc exclus tous privilèges de puissance comme veto, pressions militaires ou financières, embargos économiques.
- Il n’appartient qu’à la communauté mondiale, sans différenciation numérique, de veiller à l’observance de ce devoir primordial et des devoirs « seconds » qui en découlent.
2/ Le but de toute institution publique, de toute communauté « seconde », ne peut être que la constitution d’une communauté véritable, c’est-à-dire, à l’inverse de l’individualisme, d’une association où chaque participant a conscience d’être personnellement responsable du destin de tous les autres.
- La liberté consiste à n’être pas captif de ses intérêts propres ou des intérêts et des visées particulières de la communauté seconde à laquelle on appartient, et à agir seulement en vue de la promotion de tous les membres de la communauté première, la communauté planétaire.
- La sécurité et la résistance à toute oppression découlent de la solidarité propre à ceux qui sont conscients de ces devoirs. Aucune force physique, l’histoire le montre par la désintégration finale de tous les empires, ne peut triompher longuement d’une communauté unie par la conscience commune de ces devoirs universellement humains.
- Les droits de l’homme se résument en celui-ci, fondamental : nul ne doit rencontrer de limites et d’obstacles – tels que discriminations économiques, politiques, culturelles ou spirituelles – à l’accomplissement de ses devoirs à l’égard de la communauté humaine planétaire.
3/ Le capital –le travail mort – est la richesse accumulée depuis des millénaires grâce à la science, à la technique et aux arts des hommes. La propriété n’a donc de légitimité que si elle est fondée sur le travail vivant et concourt au développement de tous.
- Notre attitude envers la nature est un cas particulier de notre attitude envers la propriété. La nature, telle que nous la connaissons aujourd’hui, a été, pour la plus grande part, « humanisée » par le travail de multiples générations. Elle ne peut donc être considérée ni comme un réservoir illimité de richesses pour satisfaire nos appétits du moment, ni comme un dépotoir pour nos déchets. Elle appartient non seulement aux milliards de morts qui l’ont fécondée mais aux milliards aussi de ceux qui ne sont pas encore nés. Nous avons donc le devoir de la transmettre plus féconde et plus belle que nous l’avons reçue, sans en hypothéquer l’avenir.
4/ Le pouvoir et le savoir (qui est une forme de pouvoir) poursuivent le même but universel.
- Le pouvoir, à tous les niveaux, ne peut être exercé ou retiré que par le mandat des citoyens, c'est-à-dire de ceux s'étant engagés par écrit à observer les présents devoirs.
- Il ne comporte aucun privilège mais seulement des devoirs supplémentaires:
- Tout dirigeant ou responsable d’une communauté seconde (église, nation, entreprise de production ou de service, corporation professionnelle ou artistique, ou autre) doit veiller à ce que l’action extérieure de cette communauté ne nuise à aucune autre, y compris à l’échelle mondiale. Par exemple, que l’autorité dans une religion n’implique aucune exclusion ou répression vis-à-vis d’une autre ou de communautés non-religieuses. Par exemple encore que l’autorité dans une nation n’implique aucun privilège pour celle-ci et moins encore une domination à l’égard d’une autre, d’un autre peuple.
- Tout dirigeant, à quelque niveau que ce soit, a le devoir de s’interroger sur la finalité, c’est-à-dire le sens et le but de son action : sert-elle à l’épanouissement de l’Homme et de tout homme, ou à sa dégradation voire sa destruction ? Par exemple : les productions les plus rentables sont celles des armements et de la drogue, que faire ? Autre exemple : l’information, la publicité, les religions et les arts ont un grand pouvoir de manipulation des esprits, que faire ?
5/ Etymologiquement démocratie signifie gouvernement par le peuple et pour le peuple. Les « démocraties occidentales » n’en sont pas vraiment, ainsi que Rousseau en a depuis longtemps fait la démonstration. Pour deux raisons : l’inégalité des fortunes, qui rend impossible la formation d’une volonté générale, et opposent au contraire ceux qui ont et ceux qui n’ont pas ; et l’absence d’une foi en des valeurs absolues qui fassent aimer à chacun son devoir primordial plutôt que son intérêt personnel qui en fait le concurrent et le rival de tous les autres.
- Même mystification pour les « droits de l’homme ». C’est à chaque époque la minorité dominante dont il s’agit de défendre les droits.
Que signifie un droit pour qui n’a pas les moyens de l’exercer ? Le « droit au travail » pour des millions de chômeurs ? Le « droit à la vie » pour des milliards d’êtres humains qui, dans le monde non occidental, souffrent et meurent pour qu’ailleurs des privilégiés puissent poursuivre « librement » leurs gaspillages ? « L’égalité » qui interdit « également » à un milliardaire et à un affamé de voler du pain, ou qui leur permet, à l’un et à l’autre, d’acheter un journal ou de fonder une chaîne de télévision ?
« La loi égale pour tous », ce slogan est le mensonge des « droits de l’homme », même lorsqu’ils se proclament « universels ».
Voilà pourquoi à une énième proclamation des « droits » nous préférons une pratique des devoirs, telle que nous venons de l’expliciter dans ces principes. ©Alain Raynaud 2017
A partir de différents textes de Roger Garaudy Envoyer par e-mailBlogThis!Partager sur TwitterPartager sur FacebookPartager sur Pinterest Libellés : Administrateur, Dialogue des cultures, Roger Garaudy