Magazine

Nos morts pendulaires

Publié le 22 mars 2017 par Nicolas Esse @nicolasesse

Il fait parfois beau dans les cimetières.

Toujours, il fait froid.

Souvent, il y a une photo, sur un petit chevalet, au-dessus ou à côté du cercueil. Un visage et deux yeux qui fixent l’assemblée en souriant. Deux yeux morts qui regardent les vivants, ou peut-être est-ce le contraire, peut-être que ces deux yeux figés sur le papier nous suivent du regard, nous scrutent, nous jaugent, nous et nos corps pendulaires, nos pardessus gris et nos chaussures fatiguées.

Nos levers à aubes régulières.
Nos plats précuisinés aux saveurs prévisibles.
Nos crépuscules fatigués.
Nos plaintes uniformes et nos bonheurs similaires qui s’affichent sur les pages de nos téléphones portables, ces paysages épuisés où nous nous incrustons par milliers, en shorts et en tongs, sur fonds de couchers de soleil pour faire l’étalage de nos bonheurs obligés.

Sur la photo, la tête s’incline légèrement vers le bas. Son regard tendre enveloppe nos corps écrasés sur ces chaises trop dures. Les yeux, malicieux, se relèvent pour mieux nous voir, pour mieux nous dire qu’il faut nous lever, là, tout de suite, s’extraire du sillon des travées parallèles, sortir en ordre dispersé et poser nos semelles sur toutes les pelouses où il est interdit de marcher.



Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Nicolas Esse 457 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte