Miles Kane – Colour Of The Trap

Publié le 17 mars 2017 par Rocknrank

La moitié de The Last Shadow Puppets s'appelle Miles Kane... Accent " scouser " à tomber par terre, gouaille Gallagher-ienn e, le Liverpuldien recycle le passé avec un vernis contemporain. Et beaucoup de talent. Très bon chanteur, excellent guitariste, il fourbit 12 chansons impeccables, méchamment efficaces. Alex Turner, l'ami de toujours, co-écrit la moitié des chansons. Un auxiliaire précieux. Si bien que l'on pourrait quasiment qualifier ce disque solo de nouvelle mouture des Last Shadow Puppets.

Une attaque en trombe sur Come Closer. A vif, basse et batterie rebondissent sur le tarmac. Qui évoque le " 10:15 Saturday Night " de The Cure. Tension dans la cylindrée. Un rock & roll vrombissant. Un refrain fédérateur lâché comme une meute de loups affamés. Une entame de disque qui colle au basques. Mordante.

Suit Rearrange. Saphir. Arrangements pop luxuriants. Écrin nostalgique des 60's. Alex Turner officie. Une oreille attentive distinguera l'exceptionnel travail des guitares, tant sur les motifs esquissés que sur le traitement du son. Alternance typique des as de la Britpop : couplets posés, refrains étincelants.

Noel Gallagher chante les chœurs sur les refrains de My Fantasy. Passage de flambeau symbolique ? Jeune relève et vieille garde sont réunies sur cette jolie ballade qui exhale un sempiternel parfum de John Lennon & T-Rex.

Counting Down the Days aurait pu elle parfaitement figurer sur un disque des Last Shadow Puppets. Gagné. Turner fait partie de l'affaire. Un soupçon de mystique au contact d'une courroie à la rythmique métronomique. Et ce talent pour pondre des refrains viscéraux, fédérateurs, gluants.

L'actrice française Camille Poésy (ça ne s'invente pas !) s'invite sur un Happenstance (Alex Turner dirige les (d)ébats en coulisse) empreint de sensualité. L'ombre de Nancy Sinatra plane... Ainsi que des effluves très Gainsbourg-iennes. Percussions qui claquètent dans la réverbération, guitares essuyant des tremolos funambules... Au bon souvenir de The Coral et de toute la scène Merseybeat de Liverpool.

On ne s'éternisera pas sur la sautillante Quicksand. Un peu trop mièvre et téléphoné...

Inhaler en revanche réintroduit le poison. Avec force hargne et incandescence. Sur un riff dérivé du " Mother Nature Father Earth " du groupe garage rock 60's " The Music Machine ", Miles Kane signe un brûlot acid rock digne d'une compilation " Nuggets ". Applaudissements pour ce son néo-sixties qu'un certain Joe Meek n'aurait pas renié.

Une danse vaudou introduit Kingcrawler. Percussions tribales. Vocalises d'Apaches. Miles Kane incante. La mystique de The Doors crépite au loin.

Le swing romantique de Take the Night from Me convoque l'esprit soul des grandes ballades pop signées chez Motown et les ambiances à la Lee Hazlewood, une référence majeure dans les inspirations de Miles Kane. Des chœurs aux arrangements de cordes, l'ensemble est remarquable. Le gamin a décidément très bon goût.

Les trois derniers titres sont à nouveau coécrits avec Alex Turner.

Ambiance Joe Meek & The Coral sur Telepathy. Ambiance route de nuit. Les phares de la Bentley déchirent la brume. La silhouette énigmatique d'Ursula Andress se déhanche dans la banquette arrière... Basse et batterie sont d'humeur hitchkockienne. Les vibratos et tremolos des guitares sont d'une absolue perfection pour qui aime ces sonorités pop vintage.

Torpillage rythmique métallique. Matraquage claustrophobe. On écoute Better Left Invisible. La basse tabasse. La guitare essuie des chicanes. Le batteur joue serré. Tension dans l'accéléromètre. Miles Kane frappe, griffe et écorche de son timbre énervé.

On se quitte sur Colour of the Trap. Ballade sensuelle et larmoyante où la référence John Lennon/T-Rex est flagrante.

Ce premier disque, très éclectique, ravira tous ceux qui sont fans d'une période sixties bénite des Dieux. Néanmoins Miles Kane, aidés par les hauts gradés du métier que sont les producteurs Dan The Automator (Gorillaz, Primal Scream, Kasabian) et Dan Carey (Bloc Party, Toy, Tame Impala, The Kills), parvient à faire entrer dans la modernité la dimension rétro de ces chansons . Un album doté d'une véritable signature où l'on se promène entre bravoure, suspens, ésotérisme et mélancolie.