C’est en lisant cet article du Monde au sujet de la cheffe des tout au bout à droite (non, je ne la nommerai pas…) vue par les enfants que m’est revenue cette anecdote datant déjà de quelques années. Je terminai un atelier dans une école primaire et deux gamines de 8 ans m’aidaient à ranger le matériel. Leur blague favorite était de m’appeler « Jean-François Copé » sans qu’elles y voient malice. À force, je leur ai quand même indiqué que je préférais « Jean-François » tout simplement. Que l’on me pardonne cette relative animosité envers ce dernier mais j’ai toujours vécu comme une injustice de ne pas payer les pains au chocolat au même tarif que les siens. Se faire arracher un pain au chocolat à 15cts à la sortie de l’école, c’est quand même moins grave que s’il coûtait 90cts.
Je ne parle bien évidemment pas politique durant les ateliers et, dans le dialogue qui s’ensuit, les gamines, plutôt futées, ont fait les questions et les réponses.
Gamine 1 : « C’est parce que tu l’aimes pas que tu veux pas qu’on t’appelle Jean-François Copé ? »
Moi : « Euh… »
Gamine 1 : « C’est parce qu’il n’aime pas beaucoup de gens que tu l’aimes pas ? » (Droit de réciprocité
Gamine 2 : « Nous, il nous aime pas. »
Gamine 1 : « C’est comme ‘Machine à la peine’, elle, elle ne nous aime pas du tout ? » (La modification ou licence pouëtique est bien évidemment de ma responsabilité.)
Gamine 2 : « Pourquoi elle nous aime pas ? »
Et là, j’en avais la gorge serrée à me demander comment je pouvais leur expliquer la profondeur de la bêtise humaine. Heureusement elles ont poursuivi.
Gamine 1 : « Mais toi, tu nous aimes bien ? Même quand on fait des bêtises ? » (Il faut dire que j’avais un tout petit peu râlé en début d’atelier.)
Que voulez-vous leur répondre à part qu’on les adore ??? Elles n’ont que 8 ans, sont respectivement d’origine maghrébine et rom et savent déjà que des gens ne les aiment pas sans savoir pourquoi, sans pouvoir comprendre tant cela reste incompréhensible. Est-ce normal ???!!!
Nous sommes à quelques semaines d’une élection présidentielle et on entend régulièrement ces refrains de rejet de la différence comme si c’était normal. Cela a-t-il un quelconque intérêt ? J’ai parfois des ateliers avec 14 nationalités différentes, je travaille avec des enfants et des personnes de toutes origines. Ils sont légions. Et heureusement… Le débat n’a aucun intérêt car il n’a plus lieu d’être. On vit ensemble, on travaille ensemble. On s’apprécie. Vouloir « trier les personnes, trier une société » est une gageure, une utopie perfide, aussi impossible et stupide que si l’on vous demandait de trier et désassembler les différents ingrédients d’un gâteau, une fois celui-ci sorti du four. S’il y en a que cela dérange, plutôt que de tenir compte de leurs rancoeurs et de leurs incitations à se haïr, invitons-les à se trouver un pays où ils pourront vivre entre eux sans différence. Je doute et je n’espère pas qu’un tel pays existe mais, dans le cas contraire, bon vent !
Classé dans:Liberté, Réflexions Tagged: élections, différence, politique