Il n’y a pas que les parfumeurs qui travaillent avec les odeurs, d’autres métiers y ont recours: oenologues, sommeliers, sapeur-pompiers, infirmières, cuisiniers et également médecins légistes. Parmi ces professions celle de chef présente beaucoup de similitude avec celle de parfumeur. La palette du parfumeur emprunte beaucoup à celle du cuisinier et parfois le cuisinier compare des qualités d’ingrédient un peu à la manière du parfumeur. Voici un exemple avec un extrait d’un texte de la revue Evanescences : (cliquez sur le lien ci-dessous pour lire la suite)
« L’odorat est la deuxième sensation du métier de cuisinier, affirme un grand chef de la région niçoise, la première étant la vue. Selon lui, un apprenti insensible aux odeurs ne pourrait pas exercer ce métier. Dans sa cuisine, le chef se compare à un chef d’orchestre. Lorsqu’il dirige sa brigade de cuisiniers et d’apprentis, qui peut aller jusqu’à trente personnes, il sait grâce aux odeurs, lequel joue juste et lequel joue faux. Les odeurs, dit-il, ce sont les notes de musique. Elles sont des repères et même davantage car chacune d’entre elles est un message qui, à tout instant, sollicite l’attention du chef : par exemple, si un cuisinier doit faire suer les oignons ou les compoter, une odeur de doré constituera une alerte qui sera suivie immédiatement d’une injonction de la part du chef : attention, tu fais une bêtise, c’est plus la recette, tu vas changer le goût. L’alerte jouera encore si un fond de sauce caramélise, roussit ou blondit : le chef réagira à l’odeur dès le moment où il estimera que la préparation risque de basculer, à cause d’une cuisson trop forte ou trop prolongée. Il en ira de même avec cet ingrédient essentiel qu’est le beurre. A la cuisson il diffuse des odeurs d’amande, de noisette puis de café. En fonction de l’odeur perçue, le chef pourra contrôler le déroulement de la recette : « Un jeune travaille à côté de moi, je n’ai même pas besoin de regarder : je lui dis « retire ton beurre, fais attention, il est comme ça et comme ça », rien qu’à l’odeur » L’appréciation de la nature et de la qualité du beurre passe également par l’odorat, lorsqu’il s’agit de distinguer le beurre salé - il sent l’iode - du beurre non salé, bien sûr, mais aussi sa provenance : un beurre d’Echiré à une odeur plus sensible, plus fragile, plus légère, alors qu’un beurre d’Isigny a une odeur plus grasse. Si un beurre d’intervention était utilisé par un cuisinier, il serait aussitôt reconnu car le beurre au lait cru et le beurre industriel, ce sont deux mondes olfactifs : dans le premier, on sent le lait, la ferme, le pré, les herbages, les saisons aussi, on sent si c’est le printemps ou l’été, si c’est une bête qui mange du foin, si c’est une vache d’hiver. A la cuisson du second beurre, dans le meilleur des cas on ne sent rien - c’est neutre- , il n’y a plus rien tout est parti - et, parfois, l’odeur est presque désagréable.»
Le partage des savoir-faire olfactif : entre bonnes et mauvaises odeurs. Par Joël Candau