Contre le nihilisme des non-lecteurs. Yann Apperry et Sylvie Germain en point de mire...
De noirs constats ont été établis ces derniers temps, relatifs à l’état de la littérature française, faisant échos à de non moins noirs constats, établis à l’étranger, relatifs au déclin de la culture française. Paris n’est plus le centre du monde littéraire : belle découverte, n’est-ce pas, mais encore ? De quoi parle-t-on: d’orgueil national ou de réalité ? Est-il vrai qu’il ne s’écrive plus rien d’intéressant en France et en français ? Et le déclin de la littérature n’est-il qu’une affaire française ? Pas un grand écrivain en France actuelle ? Et en Italie s’il vous plaît ? En Allemagne ? En Europe ? Aux Etats-Unis ? Et quelle sorte de grandeur ? Pour quelle sorte de société ?
L’année littéraire 2008 a commencé en beauté avec la parution de La route de Cormac McCarthy. Formidable écrivain sans doute, mais à la hauteur de Faulkner ? On aura relevé l’extraordinaire succès de librairie, aux Etats-Unis, de ce roman, dont le moins qu’on puisse dire pourtant est qu’il n’a rien de séduisant pour le grand public, travaillé par des questions relevant de la haute poésie métaphysique. Or suffit-il de remarquer qu’il a été littéralement « boosté » par la célèbre Oprah Winfrey, pour rabaisser sa qualité intrinsèque ? Et comment juger, rétrospectivement, de l’engouement pour Les Bienveillantes ? Littérairement nul ont conclu d’aucuns, souvent par simple réaction à la faveur populaire, et sans le lire. Or on s’extasie d’un côté, on élit un nouveau génie par semaine, puis on dégomme de l’autre, on consomme, on vomit - et comment équilibrer son jugement ?
Le monde est-il en voie de décomposition ou de recomposition ? La littérature, actuellement sans grande ambition trop souvent ni massive relève, va-t-elle disparaître ou rejaillir comme en d’autres temps ? Et d’ailleurs, regarde-t-on assez ce qui se passe ? Ne manque-t-on pas, terriblement, d’attention et de générosité ? Lisez-vous seulement, vous qui prétendez que plus rien n’est à découvrir ?
Nous recevons ces jours, nous autres lecteurs de métier, les premiers sacs de livres à paraître cet automne. Or voici que j’ai commencé, déjà, le nouveau roman de Yann Apperry, Terre sans maître. Très bonne impression immédiate : belle écriture, récit très plastique tenu et soutenu, thème sérieux: je ne vous dis que ça pour le moment de cette fable poético-politique qu’on situe illico dans le sillage de Buzzati ou d’Agota Kristof. Et voilà se pointer Sylvie Germain avec L’Inaperçu...
Vous dites, bonnets de nuit que vous êtes, qu’il n’y a plus rien de rien à lire de ce qui s'écrit par les temps qui courent ? Allons allons, allez: lisez plutôt...