Les chercheurs ont choisi d'étudier le ver C. elegans parce que son tube digestif colonisé par des bactéries, offrant un modèle idéal pour comprendre ce qui peut se passer dans l'intestin humain. D'autant que C. elegans consomme des bactéries dans le cadre de son alimentation normale ! Les chercheurs ont d'abord nourri un groupe de vers génétiquement identiques avec un mélange de 6 espèces différentes de bactéries. Lorsque l'expérience a commencé, les vers étaient exempts de bactéries dans leur tractus digestif, mais après avoir été exposés à ce régime bactérien identique, les vers ont chacun généré des populations de microbes très différentes dans leur tube digestif :
2 vers génétiquement identiques placés dans des environnements identiques et nourris à l'identique vont ainsi développer des communautés bactériennes très différentes dans leur intestin.Une seconde expérience a alors consisté à alimenter les vers avec un mélange de seulement 2 types de bactéries, pour pouvoir étudier plus en détail leurs interactions. Dans ce scénario, toutes les bactéries étaient du type E. coli, mais la moitié avaient été manipulées pour produire une protéine fluorescente verte et l'autre moitié une protéine fluorescente rouge. Après une semaine de ce régime, chaque ver avait environ 30.000 bactéries dans son microbiote, mais qui n'étaient réparties également entre le rouge et le vert. Les répartitions étaient très variables chez les différents vers.
En cause, la colonisation initiale de l'intestin, un événement aléatoire, expliquent les auteurs :
Les premières arrivées ... Un facteur participe fortement à cette composition spécifique, selon les auteurs, ce sont les bactéries arrivées en premier. L'étude montre en effet que l'hétérogénéité entre microbiotes est liée à l'événement de colonisation initiale, lui-même très aléatoire. Et plus le taux de colonisation est faible, plus la répartition bactérienne est aléatoire. Lorsque les chercheurs nourrissent les vers avec de plus grandes quantités de bactéries, les taux de colonisation augmentent et les chercheurs constatent une baisse de variabilité " aléatoire " entre microbiotes.
Faudrait-il contrer le hasard ? Ces résultats peuvent en effet suggérer qu'il serait possible et bénéfique de diriger ou d'influencer cette hétérogénéité ...Pourquoi ? Parce que des variations de mieux en mieux connues dans le microbiome de l'intestin humain contribuent au développement de maladies comme des troubles gastro-intestinaux tels que la colite et la maladie de Crohn, le diabète, les maladies cardiaques et le cancer. Comprendre l'origine de cette diversité des microbiotes entre les différents individus permettrait de mieux prévenir le risque de ces maladies.
Bref, le facteur variabilité aléatoire est aussi à prendre en compte même si les nombreux autres facteurs environnementaux restent essentiels. L'équipe étudie aujourd'hui différentes combinaisons bactériennes dans l'intestin du ver pour surveiller le processus de compétition entre 2 espèces et pouvoir prédire dans un futur proche...qui va l'emporter.
March 3, 2017 DOI: 10.1371/journal.pbio.2000633 Stochastic assembly produces heterogeneous communities in the Caenorhabditis elegans intestine