Action contre la Faim a lancé un appel urgent aux dirigeants politiques pour mettre fin au conflit au Soudan du Sud, en réponse à la déclaration officielle de famine dans l’Etat d’Unité, où environ 100 000 personnes sont confrontées à une situation de famine et de risque de mort imminente due à la faim. Selon une alerte publiée le 20 février par le gouvernement du Soudan du Sud, le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) des Nations Unies et le Comité d'urgence mondial de l’IPC, dont fait partie Action contre la Faim, le nombre de personnes susceptibles d'être gravement touchées par les pénuries alimentaires entre février et juillet 2017 est sans précédent. Au total, 4,9 millions de Sud-Soudanais - 42% de la population du pays - ont besoin d’une aide alimentaire d’urgence et, selon une déclaration conjointe de trois grandes agences de l'ONU, un million de personnes dans d'autres régions du Soudan du Sud sont considérées comme étant au bord de la famine (selon la classification IPC.)
« Que l’on ne s’y trompe pas, la déclaration de famine dans les comtés du Leer et du Mayendit de l'Etat d’Unité n'est pas une surprise » a déclaré Andrea Tamburini, directeur général d’Action contre la Faim - Etats-Unis. « Comme nous le savons après des dizaines d’années d'expérience, la famine est l'œuvre de l'homme. Les signes de cette crise ont été impossibles à manquer. Et pourtant, même à ce moment critique, la réponse humanitaire internationale est honteusement sous-financée, la sécurité du personnel humanitaire est menacée régulièrement et l'engagement politique pour mettre fin à la crise reste insuffisant. »
En décembre 2013, une guerre civile a éclaté au Soudan du Sud, et malgré un accord de paix négocié en 2015 la violence a éclaté de nouveau en avril de la même année. Une grande partie de la population de l’Etat d’Unité a été déplacée et les acteurs humanitaires n'ont pas pu accéder aux zones les plus touchées. Depuis, la crise politique et les conflits en cours – ainsi qu’une insécurité généralisée, l'inflation, des déficits alimentaires et une économie instable - ont contribué à une spirale d'urgence humanitaire.
Action contre la Faim, par l'intermédiaire de son équipe de surveillance et d'évaluation, a effectué plusieurs évaluations techniques dans l'État d’Unité et dans d'autres régions au Soudan du Sud pour quantifier la prévalence de la malnutrition aiguë qui dépasse de loin les niveaux d'urgence. « L'analyse de l'IPC et les données nous racontent une histoire cohérente, signalant clairement où l'assistance humanitaire à grande échelle est la plus nécessaire », a déclaré Rebeckah Piotrowski, directrice des programmes au Soudan de Sud d'Action contre la Faim. « Nous avons les outils et les données nécessaires pour anticiper et agir avant qu'il ne soit trop tard. Il est inacceptable que la communauté internationale attende, alors que les crises se dégradent dramatiquement, avant de mobiliser une réponse adéquate. »
Selon l'alerte de l'IPC, en 2016 « l'aide humanitaire a non seulement soutenu mais aussi amélioré la sécurité alimentaire » dans de nombreuses régions. Pourtant, les barrières d'accès qui empêchent les organisations humanitaires d’atteindre les populations affectées par les crises constituent « un enjeu majeur dans la réalisation d'interventions de sauvetage » et la collecte de données sur les besoins dans les zones les plus touchées. Dans le nord du Bahr el Ghazal, où Action contre la Faim a pu venir en aide aux communautés et maintenir une présence importante, nos programmes ont amélioré les niveaux de sécurité alimentaire et réduit la prévalence de la malnutrition. « Dans les situations d'urgence de plus en plus complexes et prolongées, nous devons faire plus que garder les gens en vie », a déclaré Tamburini. « Au Soudan du Sud, bien sûr, nos priorités immédiates aujourd'hui sont de sauver des vies et de limiter la souffrance. Pourtant il faut que nous réfléchissions aussi à ce qui va suivre et aller au-delà du cadre restreint des interventions d'urgence traditionnelles. Il faut que nous planifiions des solutions pour tracer une voie dans laquelle les communautés peuvent se reconstruire et devenir plus résistantes aux crises de ce type. »
Aujourd'hui, le Soudan du Sud est à un tournant déterminant. Les acteurs humanitaires sont surchargés face aux besoins écrasants, à un financement insuffisant et à un environnement instable. Il est évident que les acteurs humanitaires ne sont pas en mesure de résoudre la crise seuls, et qu’ils leur est difficile de répondre à l’ensemble des besoins à cause du manque d'accès, de financement et d'approvisionnement.
Action contre la Faim demande à la communauté internationale et à toutes les parties au conflit de :
- fournir une direction politique pour mettre fin au conflit au Soudan du Sud
- mobiliser un financement flexible et à plus long terme qui permettra aux acteurs humanitaires expérimentés d'offrir des programmes répondant aux besoins des communautés lorsque des possibilités d'accès existent
- financer entièrement la réponse humanitaire
- permettre un accès libre et inconditionnel aux zones actuellement inaccessibles dans les régions de l’Etat d’Unité.
Sans une solution politique et un accès sûr, inconditionnel et sans restrictions aux populations affectées par la crise, la souffrance grandira et un plus grand nombre d'enfants mourra. Le Soudan du Sud entre maintenant dans la « période de soudure », lorsque les stocks alimentaires s’épuiseront encore plus drastiquement d’ici à la prochaine récolte. À moins qu'une mobilisation de l'aide humanitaire ne soit immédiate, l’IPC prévoit que la situation dans l'État d’Unité ainsi que dans l'Etat du nord du Bahr el Ghazal se détériorera encore plus au cours des six prochains mois. Le monde partage la responsabilité collective d'agir aujourd'hui pour empêcher la nation de s’enfoncer encore plus profondément dans la tragédie. Il est maintenant temps d’agir : nous ne pouvons pas laisser tomber la population du Soudan du Sud.
Action contre la Faim répond aux besoins humanitaires urgents des populations de quatre états au Soudan du Sud : Jonglei, Bahr el Ghazal du Nord, Warrap et Juba. Nous venons en aide à plus de 349 500 personnes avec des programmes d'alimentation et de nutrition d'urgence, ainsi que des moyens de subsistance et des interventions dans les domaines de l’eau et de l’assainissement. Notre équipe multisectorielle d'urgence répond en premières lignes à la crise alimentaire généralisée, en soutenant les évaluations d'urgence et les actions humanitaires de sauvetage là où elle est la plus nécessaire.
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Photographie Guy Calaf pour Action contre la Faim