Il quitte l'endroit pour écrire à New York. Là où il se fera écrivain. Son premier roman, End as a Man est lancé en 1947 et le rend aussitôt célèbre. On y parle clairement de sexe, de comportements et d'attitudes sexuels, on y critique la culture machiste militaire et on suggère de l'homosexualité. Ce sont beaucoup trop de tabous pour les prudes États-Unis d'après guerre. La New York Society for the Suppression Vice, institution créée dans le but de contrôler les moeurs de la population, poursuit la maison d'édition Vanguard Press pour obscénité.
Le livre fait tant de bruit, que Willingham le transforme en pièce de théâtre, qui mettra en scène, entre autre, un jeune James Dean. Le producteur Sam Spiegel lui fait adapter le livre en film et Ben Gazzara commencera sa carrière cinématographique avec ceci, rebaptisé The Strange One.
Les critiques aiment beaucoup Willingham, le public aussi, et on le place facilement parmi les nouveaux jeunes auteurs d'après guerre à suivre comme Norman Mailer, James Jones, Truman Capote, Gore Vidal ou Tom Wolfe dans Greenwich Village. William Faulkner se trouve parmi ses plus grands fans.
Natural Child paraît en 1952, et raconte 4 jeunes individus, 2 hommes et 2 femmes, ainsi que leur vie de bohème à New York. La narration sophistiquée ainsi que l'oreille parfaite de Willingham pour les dialogues réalistes de la jeunesse des États-Unis en feront un autre succès et un bijou dans son oeuvre. To Eat a Peach paraît 3 ans plus tard et chronique la vie et les aventures (ludiques) de moniteurs de camps d'été.
Un jeune réalisateur du nom de Stanley Kubrick avait adoré Natural Child et demande à Willingham de l'aider à adapter un livre de Stefan Zweig pour le cinéma. Le projet ne fonctionnera pas mais Kubrick retient l'homme pour le faire retravailler le scénario de Jim Thompson pour son prochain film: Paths of Glory. On aimera tant son apport qu'on lui fait retravailler un peu du scénario de The Bridge of the River Kwaï. Toutefois, David Lean est un homme fort difficile et Willingham et lui ne s'entendent pas. Calder ne sera jamais crédité pour le peu auquel il a contribué au film.
Willingham et Kirk Douglas se sont liés d'amitié sur le plateau de Paths of Glory et Calder travaillera sur son prochain film. Quand Douglas embarque sur son projet suivant, il engage ses bonnes collaborations: Kubrick et un ami commun, Willingham. Spartacus sera un gros succès commercial.
Ça aura pris 8 ans à Calder Willingham à tricoter son prochain roman: Eternal Fire qui replace l'action, là où il a grandi, dans le Sud, en Georgie. Probablement son meilleur effort, l'histoire gothique raconte le mariage entre un jeune héritier et une enseignante pleine de vertus aux idées suicidaires. Une critique dira de lui qu'il est le seul auteur vivant digne de pouvoir tenir le manteau de Dostoievsky dans une bagarre de rue.
Willingham revient au cinéma pour adapter la nouvelle de Charles Webb, The Graduate. Mike Nichols n'aime pas ce qu'il en fait et engage Buck Henry pour retravailler le script. Une bataille juridique prouve qu'on a gardé beaucoup trop de ce que Willingham avait fait et son nom doit être placé au générique. Il sera co-nommé pour l'Oscar de la meilleure adaptation cinématographique. Il se fera de Dustin Hoffman un ami. Ils retravailleront ensemble sur Little Big Man.
Calder lance son 9ème livre, Rambling Rose, racontant sa famille et son éveil sexuel, enfant, en Georgie. Bien que jamais sa famille n'ait eu de femme de ménage ouvertement sexuelle comme Rose, tout le reste du livre est inspiré de ses proches. Il travaille aussi avec Altman.
Son avant-dernier livre sera le dernier volet de la trilogie, débutée avec Geraldine Bradshaw et Reach to the Stars dans les années 50. The Big Nickel. Son dernier livre sera un essai satirique mal reçu en 1977, The Building of Venus Four.
Il travaillait avec Steven Spielberg sur un scénario intitulé Julie's Valley, racontant l'histoire d'une famille de pionniers des États-Unis, attaquée par des autochtones sur la piste de l'Oregon, quand on lui diagnostique un cancer du poumon fatal.
Il en décédait hier, il y a 22 ans.
L'auteur, largement oublié et pratiquement introuvable, avait 72 ans.