Résumé : Au cœur des seventies, DJ Kool Herc anime des soirées à base de mixes de chansons et invente le Merry-go-round, un extrait musical passé en boucle en jouant sur deux platines. Il inspire d'autres talents naissants, comme Grand Master Flash, alors que Afrika Bambaataa impose son style particulier de DJ. Et de fil en aiguille, c'est tout un univers musical, graphique, culturel qui va émaner de ces initiateurs, de leur rencontre, défis, battle, un univers qui se répand d'abord dans la rue, où il est né, avant d'être approché par les médias plus classiques, un univers qui deviendra le... Hip Hop. Mon avis : C'est un sacré challenge qu'a relevé Ed Piskor, l'auteur de cette histoire du Hip Hop ! Parce que justement, cette culture née de la rue n'a pas d'archives écrites par des historiens consultables en bibliothèque. Les témoignages multiples s'opposent plus qu'ils ne se recoupent. Comment dater une cassette enregistrée à l'arrache dans une soirée ? A qui se fier quand dix personnes différentes vous expliquent comment elles ont inventé le terme Hip Hop ? Autant de difficultés que Ed Piskor a eu à affronter et à surmonter. Et c'est l'auteur lui-même, venu présenter son travail au FIBD d'Angoulême cette année dans une rencontre au conservatoire de la ville, qui parle le mieux de son travail en répondant au questions de Xavier Guilbert, notre collègue de « Du 9 ».
Par rapport à tous ces avis contradictoires des fondateurs du hip hop, Ed Piskor ne tranche pas. Il présente les différentes pistes, les conflits du milieu et quand il met en avant certaines versions, c'est parce qu'il a des sources solides qui lui permettent d'affirmer ce qu'il dit. Il est prêt ainsi à recevoir tous les retours et peut se justifier de tous ces choix. Pour lui, c'est capital. Il se doit d'être honnête vis-à-vis de son travail, d'être authentique. Il précise que l'authenticité est une partie essentielle de la culture hip hop. « Tu es sincère, ou te te fais dégager ». Il a aussi conscience que les attitudes de ce milieu reposent beaucoup sur le fait de se faire mousser, de s'imposer et de détruire l'ennemi. Ce qui influence forcément la teneur des propos et la vision des faits. Cette prise de conscience lui a permis de pouvoir éviter d'être manipulé par les gens qu'il interviewe. Mais Ed Piskor pense aussi que le fait d'avoir trente ans à ce moment-là l'a aidé. A vingt ans, il aurait été sans doute plus manipulable et certains ne se seraient pas privé de lui imposer leur point de vue. Ed Piskor a pris soin de les écouter, en faisant le tri des paroles, car il sait que ces artistes sont tous importants, ils sont tous des micro-organismes d'une structure globale, plus grande qu'eux.
Une double page que Ed Piskor et Xavier Guilbert nous ont présenté lors de la rencontre :
Xavier Guilbert en profite pour noter le sous-titre initial de la série qui ne réapparaît pas sur la version papier « A Look into the viral propagation of a culture ».
Mais de deux pages en deux pages, au bout d'un moment, Ed Piskor se retrouve avec soixante pages ! Là, il relit tout et commence à chercher les liens et travaille la cohérence sur encore vingt pages. Il aboutit enfin à un tome de quatre-vingt pages. Bien vite, il se rend compte que ces tomes – il y en a quatre jusqu'à présent – couvre des périodes de plus en plus courtes. Il pourrait presque faire un tome par année, voire deux tomes pour couvrir une période de un an de hip-hop. Ed Piskor se rend bien compte de la densité de ce qu'il raconte. Il comprend parfaitement que certaines personnes aient du mal à s'y plonger et à accepter ce foisonnement, même dirigé. Il s'en excuse mais n'y peut rien, car c'est là sa manière de raconter. Une manière adaptée aussi à un foisonnement d'artiste, chacun apportant sa petite pierre à l'édifice globale. Pour en revenir à la version enligne, le phénomène incroyable a été qu'au lancement du premier post (celui présenté plus haut), Ed Piskor a refusé de regarder les statistiques et est sorti prendre l'air. Quand il est revenu, deux à trois heures plus tard, il a cédé à la curiosité et a constaté plus de trente mille visites. Le succès est donc arrivé d'emblée. Et puis des sommités du rap ont relayé ses histoires, comme Ice-Cube, Ice-T et d'autres, donnant ainsi une certaine caution à son travail. Bien sûr, cela lui a rajouté une pression sur les épaules. Ed Piskor a toujours été dur avec lui-même, mais suite à tout cela, il l'a sans doute été encore plus. Mais alors, tiendrait-on enfin l'histoire de la réussite miracle par internet ? Le gars qui met un truc en ligne une fois dans sa vie et POUM, explosion et succès phénoménal ! Ne parlons pas trop vite. Ed Piskor est tombé dans le dessin tout petit, en découvrant des documentaires à la télé, présentant Stan Lee puis Robert Crumb. En voyant Crumb dessiner, il s'est rendu compte que lui aussi, avec une feuille et un crayon, il pouvait commencer. Autodidacte, il a dessiné et dessiné puis est allé (quelques années pus tard, je suppose, pas à l'âge de dix ans, hein) présenté ses travaux. Et là, ça s'est mal passé, personne n'a voulu de ses travaux. Alors Ed Piskor est allé à la rencontre d'autresartistes pour leur montrer ce qu'il dessinait. C'est Harvey Pekar, l'auteur de American Splendor, qui lui a donné sa chance en le faisant travailler sur certains tomes de la série. Pour Ed Piskor, ce fut comme intégrer une école d'art, il a appris au contact du maître. La narration parallèle sur deux bandes, le rythme et plein d'autres choses. Puis Pekar lui a proposé de travailler sur Macedonia, une BD traitant des problèmes d'Europe de l'Est et non, comme s'y attendait Piskor, d'Alexandre le Grand. Là aussi, période formatrice.
Influencé par ed Piskor, notre héros, Zéda rencontre Grand Master Flash et Afrika Bambaataa, les pères fondateurs dans un petit strip maison "HIC HOP" !
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