Graffiti: rencontre avec Amikal à l’occasion de la sortie du livre « Behind the wall »

Par Haykel

Le graffiti reste l’enfant pauvre de l’édition en Suisse. Rares sont les livres qui traitent sur le street art helvétique. C’est pourquoi il faut saluer toutes entreprises qui tendent à encourager, à faire connaître et à vulgariser le graffiti genevois. En 2016, Joule de la Jonxion a publié à compte d’auteur un livre sur son œuvre, Amikal, une graffeuse au don certain lui emboite le pas en ce début d'année 2017 avec un livre qui fait office de carnet de croquis pour 11 artistes graffeurs. Et c’est l’occasion de faire le point avec elle en marge de la sortie de « Behind the wall » tiré à 250 exemplaires et dont le vernissage a eu lieu la semaine dernière à la galerie The Square.
-Comment t’es venu l’idée pour faire ce livre?
Je trouve que les blackbooks représentent quelque chose de magique, non seulement on découvre un artiste de façon plus authentique (le mur c'est le show ou le hasard et l'impulsif est bien moins présent que dans le carnet de croquis) mais en plus la qualité des tracés y est bien plus spontanée et parfois moins crispée que sur les murs qui tentent de reproduire le croquis.


-Pourquoi ton choix s’est porté sur ces 10 artistes précisément ? Quel est le point commun que tu partages avec eux?

Il s'agit principalement de 10 artistes dont j'admire particulièrement le travail, nous avons probablement en commun une passion pour le graffiti qui s'exprime de différentes façons.


-Les dessins qui sont publiés ont déjà été graffés sur des murs? Ou ce sont des graffitis en devenir?

Ils ont été spécialement réalisés pour ce livre? Je ne saurais le dire, chacun était assez libre de faire comme il l'entendait, il y a probablement des dessins qui sont déjà apparus sur des murs, certains ont été également produits pour le livre c'est d'ailleurs mon cas pour quelques pages, mais il n'y a pas de vraies raisons, j'aurais pu prendre uniquement des pages de livre de croquis.


-Qu’y a-t-il derrière le mur?

Nous, peut-être...


-Tu participes en tant que contributrice et éditrice comment tu as travaillé avec tes 10 collègues? Tu as fait des choix? Ou tu as donné carte blanche? Raconte-nous la genèse de ce livre.

Chacun a contribué financièrement au livre, les 10 ont couvert la moitié des frais d'impression et je me suis chargée du reste avec des fonds propres et en démarchant des sponsors. Les contraintes graphiques concernaient uniquement les deux premières pages, pour les 8 suivantes il n'y avait que la recommandation de ne pas trop mettre d'infographie pour rester au plus proche de l'esprit "carnet de croquis". C'était intéressant parce que j'ai eu la surprise des choix de chacun au moment de la reddition des travaux, mais aussi un peu stressant parce que je ne maîtrisais pas l'entier du processus et étais par conséquent tributaire des impulsions graphiques des participants. Je ne trouve pas facile de s'en remettre à des gens que l'on ne connait presque pas.


-A Genève, l’année dernière Joule de la Jonxion a publié un livre à compte d’auteur et en ce début d’année c’est ton tour. Comment expliquer la pauvreté éditoriale dans le domaine du graffiti à Genève alors que chez nos voisins français l’édition sur le street art est florissante? En France plusieurs livres de graffitis sont publiés chaque année sans parler de revues spécialisées vendues en kiosques.

Je pense qu'en Suisse on est encore très frileux au niveau du graffiti, souvent associé à tort à l'insécurité et la saleté, deux concepts que la Genève internationale cherche à tout prix à cacher à ses visiteurs fortunés. Il y a aussi un passé historique étroitement lié au graffiti en France, c'est dans ce pays que ce sont rendus beaucoup d'artistes qui ont importé le graffiti en Europe. Cela fait donc partie de la culture française. Au contraire, en Suisse, l'art ne se veut pas populaire et est souvent réservé à une élite fortunée, donc pas de place pour les graffeurs une fois de plus. Je présume qu'il y a encore une tonne d'autres raisons sociales, historiques et financières la question est en tout cas très intéressante.


-Grâce à une impression en Italie tu as pu proposer la vente de ce livre à un prix raisonnable de 15.- chf pour 115 pages tout en y insérant 3 pages de publicité. Est-ce le meilleur moyen de parler du graffiti made in Genève tout en gardant une trace pour l’histoire?

Ce n'est sans doute pas le meilleur, mais c'est un moyen (notre livre est du reste archivé à la Bibliothèque nationale) et puis un beau livre ça fait plaisir à feuilleter et ça va toucher des personnes qui n'iront pas forcément errer sur les terrains de jeu urbains des artistes. En ce qui concerne le prix, il s'explique aussi par le fait que le livre n'a pas été engendré dans une optique de profit mais à l'instar de notre art en extérieur, pour montrer ce que nous savons faire.


-Suite au succès de cette belle aventure, y aura-t-il une suite maintenant qu’on sait ce qu’il y a derrière le mur?

Oui, mais cette fois-ci, on va regarder plus loin. Je peux déjà dire qu'il y aura quelques artistes du premier volume et d'autres provenant d'autres pays, certains graffeurs sont connus, d'autres moins mais tous ont en commun qu'ils font de très jolis dessins qui méritent d'être partagés.

Les 11 artistes qui ont participé à ce livre:

Wozdat

Moru

Grock

Doer

Amikal

Padkol

Zcäpe

Sevenlab

Kornflex

TCK

Slamer

Pour prendre contact avec AMIKAL: http://amikal.xyz/

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