Il y a si longtemps que les survivants de la catastrophe vivent dans la colonie souterraine que plus personne ne sait rien du monde d’avant, alors des sections spéciales analysent les archives retrouvées pour tenter de reconstituer le puzzle du passé. Ce travail fascine Ura, qui lui dédie bien plus de temps que ce qu’il doit, au contraire de nombre de ses collègues pour lesquels cette tâche ne présente plus aucun sens, au point que le département de recherche se vide toujours plus. Un jour, Ura découvre un document mystérieux…
Quel sens donner aux images d’un passé révolu et que, par définition, on ne comprend plus ? Non les images créées par des spécialistes du domaine, qui choisissent avec soin leur sujet et la manière de le présenter en influençant ainsi la perception du spectateur, mais celle issues de la vie de tous les jours et qu’on montre dans leur forme la plus brute, sans aucun prisme interprétatif. On pourrait penser la question résolue depuis longtemps par les historiens, et pour autant qu’une telle problématique puisse vraiment l’être un jour, mais alors que les moyens de fixer le présent se généralisent toujours plus dans la vie quotidienne, par l’intermédiaire des téléphones portables en particulier, ce questionnement prend soudain une valeur inattendue.
À dire vrai, de tels documents, que peuvent à présent produire n’importe qui et pas seulement des gens assez haut placés dans la hiérarchie sociale pour utiliser des instruments bien coûteux il y a encore peu, de telles archives permettront sans nul doute aux chercheurs de demain de disposer de données bien plus informatives que celles d’hier. La technologie, encore une fois, rendra possible une évolution de la pensée, en l’occurrence à travers la possibilité pour chacun de témoigner à sa manière de ce qu’il a vécu, et ce d’une manière beaucoup plus objective que si la personne concernée décidait d’évoquer ses ressentis, c’est-à-dire d’influencer la perception du spectateur comme évoqué ci-dessus. Comme toujours, le progrès prend les formes les plus surprenantes…
Bien sûr, nombre de ces témoignages involontaires se recouperont, voire se superposeront en finissant ainsi par donner une impression de répétition, pour ne pas dire de radotage. Loin de devenir une source d’ennui, ils pourront constituer une base statistique à partir de laquelle on pourra envisager de représenter le passé par des données chiffrées, du moins dans des proportions telles qu’on ne l’a encore jamais vu. Je ne digresse pas tant que ça puisque ce qu’on trouve à la base de Pale Cocoon, outre les mises en garde à présent bien classiques concernant les dérives de la technologie et les préoccupations écologiques, parmi d’autres sujets tout aussi intéressants, consiste bien à savoir comment on peut sonder hier pour tenter de comprendre aujourd’hui et ainsi donner forme à demain.
Bien plus qu’un avertissement sur les dangers d’une science devenue hors de contrôle, un autre thème typique de la culture populaire japonaise d’après-guerre et qui tend à une certaine redondance, ce court-métrage se veut surtout une réflexion sur l’histoire et sur la manière dont chacun y joue son rôle, y compris une fois le rideau tombé pour toujours.
Récompense :
Prix du meilleur scénario au Sapporo International Short Film Festival and Market en 2006.
Pale Cocoon, Yasuhiro Yoshiura, 2006
Dybex, 2008
23 minutes, env. 10 €