Je ne suis pas surpris du résultat du second tour des primaires de la gauche, bien que je n'aurais jamais vu surgir Hamon il y a encore deux à trois mois, mais bien plus, en revanche, par les effets de la dynamique dans laquelle il est.
Les premiers sondages post-victoire indiquent qu'il prend cinq points d'un coup à Mélenchon, ce à quoi je ne m'attendais pas.
A 15% pour Hamon, 21 pour Macron et 22 pour Fillon, beaucoup de choses peuvent encore bouger d'ici la présidentielle. Je vois mal Mélenchon se retirer pour Hamon, évidemment, mais il a commis une sacrée maladresse en déclarant dès dimanche soir que la victoire de Hamon avalisait ses propositions : ce-faisant, il a donné l'impression qu'il existait des convergences entre les deux projets et favorisé le retour au bercail d'une partie de l'électorat socialiste vers Hamon...Que cela se poursuive et Hamon deviendra à son tour un candidat au deuxième tour de la présidentielle.
Seule Marine Le pen semble indéboulonnable avec un socle d'électeurs sûrs de voter pour elle très important. Les déboires de Fillon lui ont permis de regagner les électeurs qu'elle avait perdus en novembre.
On attend toujours les propositions de Macron. Les Inrocks ont essayé de faire un point, mais il n'est pas concluant. Le problème, avec Macron, c'est que je ne supporte pas les gens qui se rallient à lui : les Minc, les Attali, les Bergé, toue la lie pseudo-intellectuelle qui n'a que du mépris et de la suffisance envers les gens ordinaires. Je ne peux pas les voir. Leur seule présence promet. Il y a aussi le ralliement des zappeurs, passés de l'aile droite du PS au MoDem, puis vers Hollande, puis à l'UDI, et qui se tournent maintenant vers Macron. Ces gens-là, sous couvert de rejoindre l'espace central, ne sont qu'à la recherche du succès. Je connais leurs idées. Ils partagent beaucoup avec les Socialistes. Politiquement, je les considère comme des adversaires. Ils dégoûlinent de cette bonne conscience satisfaite d'elle-même et moralisatrice que j'exècre.
Je lis Résolution Française de François Bayrou et je suis étonné de considérer par certains côtés une communauté de constats avec Benoît Hamon, bien que leurs solutions soient très éloignées entre elles.
Il y a chez les deux une même volonté d'humaniser le travail. Hamon rêve d'une société sans travail où les robots produiraient à la place des êtres humains, leur fournissant par les taxes un revenu substantiel. Bien que l'idée soit séduisante, elle occulte la structure de l'emploi. Nombre de taches ne sont pas automatisables. Bayrou, quant à lui, considère du même oeil la place grandissante de la mécanisation mais y voit une opportunité pour créer une nouvelle économie, tournée vers du service associé à l'industrie, indélocalisable : recyclage et remise en état des appareils produits par les robots, par exemple. En effet, les robots générant à peu près les mêmes coûts de production quel que soit leur environnement de travail, les entreprises peuvent relocaliser nombre de productions. Partant de là, si on attache à chaque produit des garanties qui ne peuvent être effectives et effectuées que sur le sol national, on s'assure d'y attacher l'emploi.
Bayrou a d'autres idées de ce type, et elles détonent, c'est le moins que l'on puisse dire, quand on considère les velléités de dérégulation, fût-elle protégée, de Macron et de Fillon.
J'espère que Bayrou percera à nouveau. Ce sera difficile, et pourtant, il le mérite tellement. C'est l'un des rares, sans doute le seul, par les temps qui courent, à prendre une vraie hauteur, à penser sans idéologie et sans devoir sa place à un appareil, des puissants ou à des promesses inconsidérées et irréalisables. Un trésor précieux et incomparable. Hélas, par les temps qui courent, la mode, le zapping, l'esprit de superficialité l'emportent par-dessus tout. Symptomatique : le compte-rendu de Résolution française par Valtimbella sur son site, le "centrisme" : c'est clair, il ne l'a pas lu ou alors les premières pages. Donc, avec une dizaine de pages et de ce qu'en dit Le Point, il se fait une idée. C'est affligeant de pauvreté et significatif de notre époque. C'est peut-être, et malheureusement, précurseur du sort qui attend les riches idées de François Bayrou. Je ferai de mon mieux pour les faire connaître car elles gagnent à être connues, et j'invite tous ses lecteurs à en faire de même.