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Sur mes chemins de l’Est, Vassili Grossman m’a fait bifurqué vers Treblinka, dont il est le premier à rendre compte en septembre 1944 dans un récit « L’Enfer de Treblinka ». Treblinka est un camp d’extermination, comme Sodibor, Belzec, Chemino, dédié à l’extermination des Juifs, c’est à dire qu’une partie d’un convoi, soit environs 2500 personnes arrivait à l’entrée du camps, 3 heures plus tard elles brûlaient sur les buchers à ciel ouvert.
Les Nazis prélevaient dans les convois des jeunes hommes forts pour servir de main d’oeuvre esclave : pour trier les bagages, couper les cheveux des femmes, sortir les cadavres des chambre à gaz, arracher les dents en or, jeter les cadavres dans les fosses et en 1943, pour déterrer des centaines de milliers de corps décomposés et les transporter sur les buchers pour faire disparaître toute trace du génocide. Un des ces hommes, Chil Rajchman, a réussir à survivre 10 mois à Treblinka. Quand la dernière fosse fut presque vidé de ces cadavres, présentant qu’ils seront tous assassinés et que personnes pourraient témoigner, ces hommes se sont révoltés et évadés de Treblinka, le 2 août 1943.
Après guerre il devait avoir une dizaine de survivants sur les 800.000 juifs assassinés à Treblinka. Child Rajchman fit parti de ces survivants. Il réussi à rejoindre Varsovie fin 1943, qui était à 90km de Treblinka et se cacher chez un ami jusqu’à la fin de la guerre. Durant cette période, c’est à dire alors que la guerre n’était pas encore finie, il a écrit son témoignage , « Je suis le dernier Juif » qui a été édité très tardivement, après sa mort en 2004.
C’est une écriture d’apocalypse, une écriture caméra qui enregistre, restitue sans fard la vérité nue, qui nous submerge. Nous envahit. Une écriture à perdre haleine, une écriture qui courre sans arrêt comme ces hommes étaient obligés de le faire dans l’exécution de leurs tâches, ne pas courir assez vite c’était les coups de fouet et de cravache, s’arrêter c’était une balle dans la tête.
Une écriture étrangement belle dans son aridité, son bousculement des mots, sa discontinuité narrative, sa fragmentation émotionnelle, son incomplétude et dans la description de ce temps de mort, des éclats de mot « les wagons tristes m’emportent vers ce lieu… », qui surgissent on ne sait comment, on ne sait d’où.
C’est une écriture cinglante, dégoulinante comme le sang qui sortait des fosses, à mille lieux de celle de Charlotte Delbo par exemple, tout aussi belle, toute aussi profonde et émouvante mais plus posée, plus littéraire. L’écriture de Chil Rajchman est à l’unisson de la vitesse de disparition d’un convoi à Treblinka et quand ces Hommes se sont lancé à l’assaut des barbelés le jour de la révolte, le 2 aout 1943, c’est aux cris de « Révolution Treblinka ! ». Ces cris résonnent dans ma mémoire comme un appel.
Je suis le dernier Juif de Chil Rajchman / Le Livre de Poche