J'avais entendu parler du livre de Béa Johnson qui semblait faire le tour de nombreuses questions. On parle d'elle dans les blogs et les revues bien en vue. Cela m'avait amené à me demander combien je produisais de déchets chaque mois. Compte tenu que je suis très attentif aux déchets recyclables, que j'ai mon bac de compost, mes poubelles ont véritablement fondu. J'arrive à environ 400 grammes de déchets mensuels ce qui semble plutôt bien. Idéalement, il faudrait aussi que je pèse mes déchets recyclables, car leur reconditionnement consomme de l'énergie.
Un jour, j'ai dû changer le sac de mon aspirateur. Et en jetant ce sac, je l'ai pesé. Horreur : 500 grammes à lui tout seul, alors que je vis dans un petit 2 pièces ! Là, je me suis évidemment posé la question : mais comment fait Béa avec une famille dans 140m² de plain-pied avec jardin ? Parce que mon demi-kilo, je ne le rangerai jamais dans son petit bocal de déchets annuels... alors j'ai lu son livre pour savoir comment elle faisait.
Et j'ai trouvé ! Elle met tout au compost... la belle affaire. Elle fait certainement des efforts incroyables sur plein de trucs, mais elle truande sur la poussière, pourtant pas négligeable : ce déchet est composé de fibres synthétiques, de métaux lourds, d'adjuvants, solvants, peintures et autres, il ne faut surtout pas le composter. C'est un déchet incinérable. La seule solution pour les rendre compostables serait de supprimer tout objet synthétique de son environnement : plus de vernis sur le bois, plus de semelles en caoutchouc, plus de textiles teints, plus de peinture sur les murs, pas de mastic ni de gaines en plastique... tout le contraire de ce qu'on voit en photo sur son blog.
Et puis je m'interroge sur certains déchets qui devraient nécessairement apparaître dans son bocal, mais n'apparaissent pas : essuie-glace à changer tous les ans ou pièces de vélo (chambre à air), petit matériel de bricolage pour les réparations usuelles (mastic, gaine électrique, joints usés...), pièces cassées d'objets en panne, etc... j'imagine qu'elle les refile à des réparateurs qui s'en débrouillent.
De plus, ce livre bien propre nous cache beaucoup de pollution « invisible » qui n'apparaît pas dans la poubelle : les pneus et autres pièces d'usure d'une voiture (ou d'un vélo), petit matériel médical (dentiste ou autre médecin), CO2 généré par l'utilisation de Google Drive ainsi que par de nombreux appareils électriques qu'elle utilise (j'y reviendrai), et naturellement ses voyages en avion, que je ne suis pas le seul à dénoncer.
Je vois sa mode du zéro déchet comme la mode Apple appliquée à l'écologie. Des murs blancs, une maison bien rangée, une cosmétique très lisse, et plus de poubelle. Mais cela ne suffit pas à faire un monde plus respectueux de l'environnement. Comme s'il suffisait de ne pas se salir pour être propre...
Un mythe s'est donc effondré. Béa est peut-être compatible avec l'écologie, mais ce n'est pas ce qu'elle cherche. À chacun de nous de mettre ses conseils dans une perspective plus globale.
Je ne battrai donc jamais le record du monde du zéro déchets. Car l'énergie à fournir pour tuer les derniers grammes phagocyterait l'énergie que je dépense déjà à économiser l'eau, le gaz, ou à sensibiliser mon entourage à des enjeux environnementaux.