Elise Thiébaut, dans Ceci est mon sang, qui m'a été envoyé par les Editions La Découverte, dresse une histoire des règles tout en alternant histoires personnelles et faits scientifiques, sociologiques et historiques autour des règles. Elle rappelle également les nombreuses représentations historiques et religieuses autour des règles.
Elle consacre tout d'abord un chapitre à une explication scientifique et médicale de ce que sont les règles, même si elle souligne qu'on ignore toujours pourquoi les femmes ont leurs règles chaque mois au contraire de tant de mammifères.
L'auteure témoigne de la violence qui entraîne l'apparition des premières règles avec par exemple la coutume de la gifle, ou le fait qu'on en parle publiquement alors qu'on ne fait rien de tel pour les premières éjaculations. Elle rappelle qu'on n'hésite pas à évoquer ses problèmes de transit et ce publiquement mais jamais ses règles. De nombreux médecins, philosophes ont ainsi contribué à véhiculer des préjugés sur les règles comme Hippocrate ou Pline l'Ancien.
A travers ce livre, elle montre combien les règles sont utilisées pour exclure les femmes de la société en rappelant l'idée de l'anthropologue Alain Testart pour qui la division sexuelle du travail, en prenant comme exemple les armes utiliser pour chasser (capables de faire jaillir le sang pour les hommes au contraire de celles des femmes) est due au fait qu'il ne fallait pas mélanger sang menstruel et sang jaillissant issu de la chasse.
Elle évoque ensuite le nombre de termes pour désigner les règles ; ragnagnas (du gascon arrouganh qui signifie désir ou envie), avoir ses ourses (certains pensent que c'est lié à un glissement linguistique d'"avoir ses jours", d'autres que cela renvoie à Artémis, dont le nom signifie "ourse puissante"). On parle aussi du "débarquement des anglais ou de russes" ou d'"avoir ses fleurs".
Elle rappelle que dans plusieurs sociétés, les hommes tentent d'imiter les règles en s'infligeant des blessures rituelles par exemple au pénis. Elle souligne que selon certains kabbalistes les règles seraient en quelque sorte l'équivalent de la circoncision masculine.
Elle montre les interdits autour des règles dans les trois grandes religions monothéistes qui sont assez forts pour l'islam et le judaïsme.
Les règles sont tellement stigmatisées que les femmes se retrouvent à demander le plus discrètement possible des tampons ou des serviettes et à taire leurs douleurs dues aux règles. Le fait de ne pas pouvoir parler de son propre corps est une forme claire d'oppression.
Dés la fin du XIXème siècle, il existe des serviettes non jetables. Les serviettes jetables apparaissent au début du XXème siècle alors que les tampons apparaissent en 1937. Le marché annuel des protections féminines représente 30 Milliards de dollars (26 milliards d'euros). En France il est de 423 millions d'euros. Le marché mondial se partage entre 3 leaders : Procter & Gamble, Johnson & Johnson et Kimberly-Clark. La composition réelle des tampons a été longtemps ignorée malgré le problème du choc septique.
En France, les protections hygiéniques ont longtemps été taxées à 20% alors que les produits de première nécessité sont taxés à 5.5%. Il a fallu un scandale autour de cette taxe rose pour que la taxe soit baissée.
L'auteure évoque les différents autres modes de protection hygiénique comme la coupe menstruelle, les serviettes lavables ou le flux instinctif.
Elle termine son ouvrage par un chapitre consacré à l'endométriose et les recherches scientifiques autour des cellules souches dans l'endomètre.
L'ouvrage permet de constater combien les tabous absurdes autour des règles restent présents dans notre société et combien cela influe sur notre rapport au corps.
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