[Critique série] THE OA

Par Onrembobine @OnRembobinefr

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Titre original : The OA

Note:
Origine : États-Unis
Créateurs : Brit Marling, Zal Batmanglij
Réalisateur : Zal Batmanglij
Distribution : Brit Marling, Emory Cohen, Scott Wilson, Phyllis Smith, Alice Krige, Patrick Gibson, Brendan Meyer, Jason Isaacs…
Genre : Fantastique/Drame
Diffusion en France : Netflix
Nombre d’épisodes : 8

Le Pitch :
Prairie Johnson, une jeune femme, réapparaît brusquement sept ans après avoir disparu. Autrefois aveugle, désormais, elle voit. Au centre de toutes les attentions, Prairie refuse de raconter ce qui lui est arrivé, mais semble poursuivre un mystérieux objectif. Alors que ses parents adoptifs sont de plus en plus démunis, elle se tourne vers quatre élèves du lycée local et une professeure, qu’elle tente de rallier à sa cause afin d’accomplir une tâche qu’elle ne peut remplir seule…

La Critique de la Saison 1 de The OA :

Portée par la comédienne Brit Marling et par le réalisateur Zal Batmanglij, qui ont écrit ensemble tous les épisodes, tandis que Batmanglij se chargeait de les mettre en scène, la série The OA débarque sur Netflix auréolée d’une aura des plus mystérieuses, quelques mois après Stranger Things le hit du network. Il est question dans les deux shows d’une héroïne qui semble être dotée de pouvoirs particuliers et de plusieurs personnages qui gravitent autour. On évoque des expériences, des univers fantasmagoriques mais par contre, pas de monstres. Peu importe, car The OA fut directement comparé à Stranger Things. Dans les faits, c’est un peu plus compliqué…

Il était une fois Brit Marling

Complètement investie, Brit Marling porte The OA. Elle joue le premier rôle, celui d’une femme qui a recouvré la vue après avoir disparu de la circulation pendant plusieurs années, elle a co-écrit l’histoire, et l’a créée avec son comparse Zal Batmanglij. Devant la caméra donc, elle cristallise le mystère qui habite l’intégralité du show et se charge de disséminer ici ou là des indices censés nous amener doucement vers le dénouement. Une actrice qui se présente à nous avec sa sensibilité à fleur de peau et son charisme certain, et qui arrive, alors que parfois les péripéties auraient pu le favoriser, à éviter le piège du cabotinage. On a ainsi du mal à dissocier Prairie Johnson, son personnage, de la comédienne. The OA lui doit alors beaucoup. On sent que Brit Marling joue gros. Son jeu est habité d’une puissance qu’elle sait maîtriser, entraînant dans son vortex tous les autres comédiens de premier plan qu’elle côtoie. Quand le scénario prend des détours, elle est celle qui nous empêche de décrocher. Elle surprend et émeut. Irrite même un peu parfois quand les circonstances l’exigent. Pour résumer, elle est insaisissable et c’est une excellente chose car c’est précisément cela qui confère à la série une grande partie de sa force. Qui est-elle ? Que veut-elle ? Pourquoi a-t-elle recouvré la vue ? Autant de questions que l’actrice porte en son sein avec une pertinence de tous les instants et ce mélange de force et de fragilité qu’elle incarne tout du long sans se départir d’une puissance renouvelée.

Une histoire un peu opaque

Cela dit, The OA, parfois, manque quand même un peu de clarté. Non pas qu’il ne pas agréable de se laisser porter par cet étrange récit, mais une fois passée l’émotion dévastatrice que dispense le huitième et dernier épisode, difficile de ne pas voir le caractère un peu roublard de l’entreprise, dont le but semble parfois de nous perdre pour le simple plaisir de nous perdre sans forcément, par la suite, arriver à retomber sur ses pieds. C’est un peu le piège dans lequel tombe The OA. Brit Marling et Zal Batmanglij ont écrit un script remarquable sur bien des points, notamment dans sa construction et sa faculté à télescoper le présent et le passé afin de tracer des parallèles et d’entretenir un rythme assez soutenu pour ne pas ennuyer, mais au fond, tout ceci s’avère un peu trop flou. Le problème, c’est qu’on attend beaucoup de la fin. Cette histoire promet un dénouement qui dans les faits, peine à vraiment convaincre. Du moins dans le strict cadre de cette première saison. Peut-être la suite se chargera de nous éclairer et de conférer un peu plus de consistance à tout cela mais pour l’instant, avec ces huit épisodes, il y a de quoi rester un poil circonspect.
The OA ne réussit pas avec autant de flamboyance à justifier ses choix narratifs que The Leftovers par exemple, qui elle non plus ne répondait pas à toutes les questions mais savait ne pas diluer sa puissance ou avoir recours à des mécanismes un peu trop opportunistes. Pour ce qui est de la comparaison avec The Stranger Things, c’est d’autant plus vite réglé, puisque les deux shows n’ont en commun que ce pitch mystérieux et quelques petits détails. Tout le reste est différent. The OA ne fait pas nécessairement référence à la pop culture des années 80 et s’avère quoi qu’il en soit plus adulte et plus métaphysique. On le sait dès les premières minutes et jamais ce n’est démenti.
Habité d’un désir de juxtaposer des thématiques, dont certaines relèvent de la philosophie et de la psychologie, The OA est parfois un peu écrasée sous le poids de ses ambitions. De quoi prendre le risque de décevoir quand la saison 1 s’achève et d’encourager des critiques qui ne manqueront pas de souligner le côté un peu vain… À chacun de se faire son avis. The OA peut fasciner ou décevoir et c’est l’une de ses grandes qualités. Une œuvre clivant comme celle-ci doit de toute façon être considérée. On aime ou on déteste.

Une partition onirique

The OA assume son statut de série exigeante mais essaye d’être divertissante. En cela, la partie où Prairie raconte ce qui s’est passé entre sa disparition et sa réapparition, s’avère la plus stimulante. C’est aussi dans cette partie que l’on rencontre Emory Cohen, un excellent acteur vu dans le film Brooklyn ou encore le grand Jason Isaacs, connu pour avoir interprété de patriarche de la famille Malfoy dans les Harry Potter. Mais au fond, tout est lié. Quand le brouillard commence à se dissiper, The OA adopte un rythme croissant. Elle met un peu de temps à démarrer mais une fois qu’elle est lancée, elle ne s’arrête plus. Grâce à Brit Marling mais aussi à des acteurs comme Scott Wilson (The Walking Dead) et plus globalement tous ceux qui constituent le groupe auquel est raconté le mystère au centre de tout, la série sait ne pas faire du surplace. Le fait que cette première saison ne compte que 8 épisodes contribuant aussi à une certaine rapidité d’exécution. De quoi favoriser également l’émergence d’une émotion propre aux œuvres qui savent mettre le doigt sur des choses universelles. Ce qui est assez rare pour le souligner et pour pardonner à The OA ses petites prétentions. Sa poésie et la conviction avec laquelle elle nous conte son histoire s’avèrent assez convaincantes. Tout comme la réalisation de Zal Batmanglij, pleine d’une sensibilité parfaitement en accord avec les intentions initiales et nourrie d’un lyrisme omniprésent. The OA est une belle série c’est certain. Atypique également et pétrie de qualités qui font oublier ses défauts.

En Bref…
The OA se détache sans mal des autres séries fantastiques américaines grâce à quelques partis-pris plutôt audacieux. Un peu trop opaque, elle a aussi un peu de mal à passer la seconde mais assume et sait néanmoins aller jusqu’au bout sans se départir d’une poésie indéniable et d’une force croissante. Une série qui doit beaucoup à ses formidables acteurs, Brit Marling en tête. Elle qui incarne l’essence même de cet ambitieux projet.

@ Gilles Rolland

   Crédits photos : Netflix