L’album est donc un hommage vibrant à l’œuvre de Nina Simone. Immense artiste qu’on ne présente pas. Chacun des 14 titres exposés sur l’album apportent leurs lots d’anecdotes historiques, d’investissements moraux et politiques de la part de Nina Simone, et sont chargés, pour les versions originales, par l’interprétation très personnelle et riche en émotion de la diva. C’est d’ailleurs là que cet album prend tout son sens, Nina Van Horn et ses musiciens n’ont pas essayé de faire du Nina Simone pâle et peu profond. Non ! Ils se sont emprunts de l’univers, de l’historique chargé, et des sentiments originels de la chanteuse, ils sont allés au bout, et sont descendus très profondément dans cette culture unique. Ce qui leur permet de ressortir une âme, une essence unique, doublée de leur interprétation personnelle en total respect de l’esprit de l’artiste originale. Ne s’approprie pas l’univers de Nina Simone qui veut. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le contrat est véritablement réussi ici.
L’album est presque indissociable du live, et c’est là que ça devient difficile de faire une chronique uniquement du disque. Tant la prestation scénique et le fait que les musiciens soient si habités par leur sujet, rend la tâche difficile. Lors du live chaque titre est introduit par l’histoire qui a poussé Nina Simone à écrire ces lignes. De "Revolution", à "Old Jim Crow", en passant par "Backlash Blues" et par le cultissime "Mississipi Goddam" avec son résonnement historique. Tout y est, la profondeur du message, expliqué en live, la personnalité de la chanteuse tant dans les enregistrements vocaux puissants sur l’album que dans le show lors du concert. La qualité musicale bien sûr, Masahiro Todani qui arrive d’ailleurs avec aisance à trouver une place pour sa guitare électrique, sur ce répertoire réputé difficile et peu accessible tant il virevolte aux limites du Jazz, du Rock et du Blues. Léa Worms apporte sa touche personnelle sur le clavier, qui est très présent dans cet album. Nina et Léa deviennent d’ailleurs une seule entité tant leurs interprétations se mêlent véritablement dans une personnalité qui rappelle les deux parties que forme la musicienne Nina Simone : son talent au chant et son style unique au piano. La section rythmique irréprochable que forment Denis Aigret et Mathias Bernheim s’illustre au fil des morceaux, tantôt dans des ambiances mélodramatiques sur "He Needs Me", et tantôt sur des groove inattendus tel que le "I Put A Spell On You" très funky, ou sur le très affro "Be My Husband". C’est d’ailleurs dans ces morceaux où l’on sent vraiment l’équipe au complet qui s’amuse et qui prend plaisir à jouer ce répertoire.
Bien sûr, les plus grands titres de la belle sont interprétés, comme "My Baby Just Cares For Me" et "Feeling Good". Encore une fois rien de gratuit, ce ne sont pas des interprétations « facile » de ces grands classiques, mais de réels arrangements innovants et habités. Bref, vous l’avez compris, ce NINA SINGS NINA mérite que l’on s’y arrête. Même plus que ça, l’expérience live sera l’introduction de cette aventure musicale qui tournera longtemps dans votre voiture ou sur votre système d’écoute favoris. Si cet album vous intéresse, c’est lors d’un concert du groupe qu’il faut aller le chercher, nul par ailleurs, afin de goûter à toute la dimension des artistes qui ont fait l’inspiration et la réalisation de ce disque.