Le récit des deux auteurs lyonnais débute dans « leur » ville et invite à suivre les pas d’un employé à la Sécu au bord du burn-out et développant de surcroît une obsession morbide pour les défenestrations. Depuis les attentats du 11 septembre 2001 et ces gens qui se jetaient du World Trade Centre en flammes, il est en effet captivé par l’architecture verticale des hauts immeubles du quartier de la Part-Dieu et est persuadé qu’un corps tombera un jour à ses pieds lors de son passage quotidien. Lorsqu’il est pris à parti par un ancien mercenaire du Mozambique devenu proxénète et que ce dernier se jette dans le vide seulement quelques heures après leur altercation, Michel tombe dans la paranoïa totale. Fasciné par cette mort, il se fait mettre en arrêt de travail pour dépression et enquête sur le passé de ce malfrat…
Le lecteur se retrouve embarqué dans une étrange histoire mêlant alcool, antidépresseurs, prostitution, guerres civiles africaines et trafics de diamants. Voguant entre la réalité et les hallucinations de Michel, tout en passant régulièrement de la France à l’Afrique, le récit peut prêter à confusion, surtout que les auteurs entretiennent volontairement le flou entre vérité et délires. Excepté cette narration parfois un peu déconcertante et quelques passages didactiques un peu trop bavards, la folie et l’enquête de Michel ne manquent pas d’intérêt. Le scénario s’avère donc certes exigeant, mais il vaut certainement le détour.
Visuellement, ce bel ouvrage édité par les éditions Tanibis est une réussite absolue. Le trait brut et réaliste d’Ivan Brun accompagne les errances du personnage principal avec grand brio. Des décors urbains lyonnais aux paysages africains, le dessinateur livre un véritable sans-faute, notamment en proposant quelques transitions d’une justesse impressionnante entre passé, présent, réalité et hallucinations.
Une belle surprise !