de Laurent Mauvignier
Roman - 230 pages
Editions de Minuit - juillet 2016
Sibylle, la quarantaine, chirurgienne, a tenté le tout pour le tout. Récemment divorcée, elle est installé dans un appartement de Bordeaux avec son fils Samuel, 16 ans, qui enchaîne les conneries. Alors, elle met la maison familiale en vente, prend un congé et décide de partir plusieurs mois parcourir à cheval les montagnes et les vallées du Kirghizistan avec Samuel. Monter à cheval devrait les rapprocher, les luttes quotidiennes au milieu de la Nature devrait refaire prendre raison à son fils qu'elle ne veut pas voir glisser cette pente dangereuse. Autant que pour lui, c'est aussi pour elle ce voyage, pour qu'elle cesse d'être une femme absente pour elle-même.
Continuer est un très beau roman, une histoire forte entre deux êtres, dans une famille, au milieu des éléments. Un cheminement physique et psychologique dans l'isolement, pour un parent et son enfant. Moins apocalyptique que La route de Cormac McCarty, Continuer n'en est pas moins angoissant, avec une dernière partie de roman qui nous délivre un suspense absolu. Dangers, hostilités, défiances, rencontres, hospitalités, racisme montant, peurs post terrorisme, il y a tout cela dans ce roman, distillé d'habile façon. Chaque jour sera différent, le roman nous réserve une lente et dangereuse progression. Extrait :"Sa mère se faisait des illusions si elle pensait qu'elle pourrait changer quelque chose en lui, de lui, si elle croyait qu'il lui suffirait de prendre quelques semaines de grand air, accompagné de chevaux et de montagnes, de silence et de lacs, pour que soudain tout dans sa vie se déplie et devienne simple et clair, pacifié, lumineux, pour qu'il cesse enfin de se sentir écrasé à l'intérieur de lui-même, comme si on allait arrêter un jour d'appuyer sur son cœur, sur son âme, sur sa vie, comme si l'étau pouvait un jour se desserrer." C'est vers la fin qu'on lit "continuer", que l'ascension prend un tout autre air. C'est un roman très attachant, une histoire de rapprochement, d'apprivoisement, de nature sauvage à dompter, nature humaine ou nature animale. La seule déception serait le manque de réalisme de la dernière partie, le manque de crédibilité pour que les 2 se retrouvent, perdus dans la steppe... Cela dit, un régal de lecture. L'avis de Brigitte Lannaud Levy - OnLaLuL'avis du Pr Platypus - Les carnets du Pr Platypus