Méditer, tout le monde a ce mot à la bouche … alors quand les éditions de l’Iconoclaste m’ont proposé de participer à une séance pilotée par Christophe André j’ai immédiatement accepté. Cette soirée, très fermée, était organisée dans le contexte de la sortie en librairie de 3 minutes à méditer, en coédition entre l’Iconoclaste et France Culture.
La méditation est un terme générique qui englobe le zen, dont l'image est plus austère, la vipassana pratiquée en Inde, et des techniques tibétaine, chrétienne ou soufi.
Voilà plus de deux mille ans que l’on médite, en Orient comme en Occident.Autrefois on faisait une retraite chez les Bénédictins, ici il s'agit d'une méditation laïcisée (ce qui la rend plus accessible), scientifiquement validée, correspondant à une méthode facile à apprendre et qui se pratique désormais dans les cabinets des médecins, à l’école, dans l’entreprise ou chez soi. Nous offrant sérénité, force et lucidité, elle nous aide aussi à résister aux maux de notre époque : égoïsme, matérialisme, dispersion digitale.La vulgarisation a commencé il y a dix ans avec, Méditer, c’est se soigner (publié aux Arènes). Pour la première fois en France, un ouvrage démontrait les bénéfices thérapeutiques de la méditation. Selon son auteur, le psychiatre Frédéric Rosenfeld, méditer n’est pas un traitement en soi, mais c'est une activité qui est bonne pour la santé, autant celle du corps que de l’esprit.
Puis est arrivé Jon Kabat-Zinn, dans une démarche scientifique pure et dure. Et enfin Christophe André qui a décidé d’utiliser la méditation en prévention des rechutes dépressives dans le service où il exerce à l’Hôpital Sainte Anne à Paris, au sein d’une Unité de Psychothérapie Comportementale et Cognitive, spécialisée dans le traitement et la prévention des troubles émotionnels, anxieux et dépressifs (phobies, dépressions, paniques …). Il fait néanmoins figure de précurseur car son service aura été le premier service universitaire à se pencher sur le sujet.
Depuis 2004 il a instauré des groupes de suivi pour les patients volontaires. Un travail qui intervient en prolongement d’un apprentissage qui aura été effectué auparavant pendant 2 à 3 mois une fois par semaine. Son premier livre,Méditer jour après jour, a convaincu plus de 500 000 personnes. l reprenait l'expression de pleine conscience déjà employée par Frédéric Rosenfeld.
On peut donc considérer que la méditation n’est pas une mode mais une lame de fond qui investit tous les secteurs. Je connais des entreprises qui ont choisi de proposer ce type de soins à leurs employés pour lutter contre le stress négatif.
Un certain nombre de personnes ont néanmoins encore besoin d’être confortées par rapport à la méditation qui conserve une image new age, baba cool, voire même de secte. Pour beaucoup de personnes c’est une activité qui ne peut avoir lieu que dans les monastères. En proposant des moments brefs sur un média de large audience, Christophe André entreprenait cet été, en collaboration avec France Culture, une démarche rassurante, signifiant combien la méditation était à la portée de tous, pourvu qu’on parvienne à se rendre un peu disponible.
C'est pourquoi il a choisi des séances de 3 minutes d’exercices brefs qui devraient aider à se recentrer dans l’activité dans le même état d’esprit qu’un cuisinier n’arrête jamais de gouter ce qu’il cuisine. Rien ne remplace les retraites de méditation longue mais ces exercices, au nombre de 40, devraient faciliter le réajustement de sa posture. L'objectif principal est de demeurer concentré dans l'activité, (alors qu'on a si souvent tendance à faire autre chose) pour acquérir ce qu'on appelle la pleine conscience.
L'hypnose et la sophrologie ont en commun de modifier le fonctionnement habituel de notre conscience. La finalité n'est pas celle de la méditation. De la même façon si une séance peut aboutir à un état de relaxation ce n'est pas l'objectif visé qui est de se rendre présent à ce qui est là, pour par exemple affronter différemment la souffrance, ou mieux savourer ce qui est agréable. La pleine conscience est un outil pour mieux rencontrer tout ce que la vie peut nous amener à vivre.
Les 40 chroniques qu’il a faites sur France culture tout l’été ont été podcastées par plus d’un million d’auditeurs, ce qui est un record. Elles restent téléchargeables dans un délai de 3 ans, mais vous les trouverez intactes dans le livre.
Elles répondent au besoin de nos vies contemporaines carencées d'une part en continuité (il est fréquent de remarquer des joggueurs répondre au téléphone sans s'arrêter de courir), d'autre part en moments "où on prend le temps".
Il ne s'agit pas de se couper du monde mais de se rendre présent au monde. On ne préconise pas de porter sa zénitude en bandoulière, ni d'être cool sans discernement. Le but est de connaitre une autre manière de vivre, dans le discernement et le recul. Pour le dire autrement, on ne peut pas bloquer l'arrivée de pensées négatives mais on pourra les empêcher de "nicher" dans notre cerveau en leur accordant de l'importance.
L'ouvrage comporte un texte original qui explique les différents aspects de la méditation (la dimension thérapeutique, la dimension personnelle, la dimension pratique), des citations mises en exergue. Et il est accompagné d’un CD (les pistes sont téléchargeable sur un site internet). La voix de Christophe Andre joue un rôle déterminant. Les deux moments de méditation qu'il nous a fait vivre ce soir l'ont démontré.
Tout en étant complémentaire des autres livres du même auteur 3 minutes à méditer représente un programme complet pour commencer ou approfondir la méditation.
Il s'adresse donc aussi bien aux néophytes, tentés par la méditation mais encore intimidés par son approche, comme aux nombreux lecteurs de Christophe André. Le format court, la multiplicité des sujets et le fait qu’ils sont reliés à la vie quotidienne en font un ouvrage simple à utiliser.
Chaque "chapitre"' commence avec une citation qui lance le sujet et on trouvera sans surprise un adage zen. Une introduction approfondit le thème. Vient ensuite l'exercice proprement dit suivi de quelques conseils.
9 fois sur 10 il est préconisé de s'arrêter un moment et le souffle tient une place prépondérante dans la majorité des exercices. Mais quelques-uns sont différents comme la recommandation de manger en pleine conscience (p. 97) ou de faire la cuisine (p. 135), ce que, avec un blog alternativement culturel et culinaire, je ne peux que encourager.S'entrainer à la compassion (p. 115) et s'exercer à la gratitude (p. 157) ne sont pas assez fréquents dans nos vie surchargées. Apprendre à accueillir une émotion douloureuse (p. 103) pour pouvoir s'en libérer ensuite ou mettre l'anxiété à distance (p. 145) sont des exercices fondamentaux que l'on ne sait pas faire spontanément. Ce livre a le grand mérite de nous les pointer.
J'y ai retrouvé aussi des principes de bon sens (on disait sagesse autrefois) comme la mise en garde contre la consommation excessive d'écrans (p. 129) ou des recommandations que je connaissais comme celui du repérage de 3 moments de bonheur chaque jour (p. 189) auquel je me livre depuis cinq ans.
3 minutes à méditer de Christophe André, chez l'Iconoclaste, en librairie le 11 janvier 2017