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Cédric Herrou est un récidiviste. En août 2015 il avait déjà été inquiété par la justice pour avoir transporté des réfugiés, des sans-papiers, des bannis de la Terre. Le parquet avait classé sans suite mais, cette fois ci, huit mois de prison avec sursis ont été requis à son encontre. De quoi s’agit-il ? Cédric, jeune agriculteur, casquette vissée sur le haut d’un visage barbu qui n’inspire pas le terrorisme tant il s’entiche d’une paire de lunettes d’intellectuel gauchiste et humanitaire, ne supporte pas l’indifférence. Alors, dans sa vallée de la Roya (Alpes-Maritimes), il ne se contente pas de récolter des œufs et des olives. Il recueille des jeunes hommes et des femmes perdus dans le tourbillon migratoire de ces années d’exil. Cédric les héberge, les soigne si besoin, leur redonne des ailes pour s’envoler de nouveau vers des horizons d’espérance. Si on est obligé de se mettre en infraction pour soutenir les gens, allons-y !", s'est exclamé Cédric Herrou, ce mercredi 4 janvier. Le délit de solidarité colle à la peau de notre république. Une loi de 2012 est venue juste un peu amoindrir ce délit, mais il existe toujours, bel et bien. Cette loi, nappée d’hypocrisie, se contente de préciser que l’aide doit être apportée « sans contrepartie directe ou indirecte". Et cette aide doit concerner des conseils juridiques, de la restauration, un hébergement, des soins médicaux destinés à assurer des conditions de vie digne et décentes à l’étranger, ou bien tout autre aide visant à préserver sa dignité ou son intégrité physique. On le sent : tout est sujet à interprétation. Des policiers zélés peuvent très bien vous poser la question : « Etes-vous sûr que la personne que vous aidez ne contribue pas quelque peu à faire le ménage ?" En bref, il y a toujours matière à vous chercher des poux dans la tête. Aider autrui n’a pourtant rien de scandaleux. L’engagement de Cédric ne fait que combler des manques flagrants dans la politique d’accueil de notre pays. Les mineurs sont particulièrement exposés. Or l'obligation d’un Etat comme la France -les conventions internationales l’obligent également-, est de considérer un mineur comme une personne foncièrement fragile, à protéger prioritairement, indépendamment de sa couleur de peau, de sa nationalité ou de son lieu de naissance... Cédric Herrou ne fait que remplir, humainement, des tâches hospitalières qui incombent à notre Nation. Mais celle-ci, frileuse, voit dans la politique des bras ouverts comme un appel d’air, une incitation à l’immigration clandestine ! Et donc, Marianne n’est pas près d’abolir totalement le délit de solidarité.
Le procès de Cédric devient, dès lors, politique. A travers son jugement on stigmatise les élans humanitaires auprès des réfugiés dans un contexte de méfiance vis-à-vis des étrangers qu’attise, de surcroît, les flambées de terrorisme djihadiste. Dans la vallée de la Roya Au pied de paisibles montagnes Cédric de bon cœur accompagne L’étranger dans un long combat
L’interminable affrontement Contre la faim, le désespoir Les pas trébuchant dans le noir Le sort injurieux des migrants
Il est à toi ce blanc sonnet Cédric aux élans condamnés Comme un délinquant politique
Toi paysan qui sans façon Donna du sourire à foison En dépit de nos lois iniques.