Dans cet article, je vous parle de ce qui pourrait être le premier livre porno français, il date de 1655. Évidemment, il y a déjà eu des livres érotiques (voire obscènes), mais ce n’était jamais dans le même registre. Le roman de la rose est un manuscrit coquin, les lettres entre Héloïse et Abélard ou encore les sonnets luxurieux de Pierre l’Arétin sont aussi très explicites, mais L’école des filles ou la philosophie des dames dépasse tout ça. D’ailleurs, pour ne pas risquer la sanction, l’auteur ne s’est jamais révélé officiellement !
Dans la version anglaise, le texte est accompagné d’illustrations pour le moins explicites… Tu peux cliquer pour les agrandir…
L’auteur inconnu de L’École des filles
Encore aujourd’hui, on ne sait pas qui a écrit L’École des filles. Il semblerait que ce soit l’un des deux éditeurs (ou peut-être les deux?), Jean L’Ange et Michel Millot. C’est L’Ange qui a écrit le manuscrit qui a été porté à l’imprimeur parisien Louis Piot au printemps 1655, mais c’est Millot qui paie les trois quart des coûts d’impression. A une époque où la censure est assez sévère concernant la publication des livres, l’imprimeur se renseigne auprès des communautés des corps de libraires et des imprimeurs et de fil en aiguilles, le livre est qualifié de « scandaleux » par le procureur… Et bim, il faut tout détruire et trouver les coupables.
La censure de L’École des filles
Le 12 juin, Millot s’est fait la malle, en revanche L’Ange est arrêté chez lui et tous les exemplaires de L’École des filles sont saisis dans l’appartement de Millot. Le procès a lieu le 7 août. Le jugement prononce la confiscation de tous les biens de Millot (or, il s’est barré avec la plupart des objets de valeurs et son fric) et L’Ange doit payer une amende de 200 livres et reste en prison jusqu’au 8 octobre. En réalité, il ne devait pas rester aussi longtemps en prison, mais le tribunal est toujours en congé en septembre (tradition des vendanges dans tous le pays…) alors les juges l’ont oublié dans la cellule… Bon ben ça va, ça arrive ! En revanche, Millot est pendu en effigie. C’est à dire qu’il n’est pas là, mais qu’on le brûle quand même. Il perd ses droits civiques. Il n’existe plus en tant que Français.
Malheureusement, aucun des livres perquisitionnés chez Millot n’a survécu, tout a été détruit, il ne reste que ceux qui avaient déjà été vendus et des impressions illégales étrangères. Mais alors, il s’y passe quoi dans ce livre ?
Qu’est-ce qu’il raconte ?
C’est l’histoire de Robinet, un jeune homme fou amoureux de Fanchon et ami de Suzanne. Suzanne est une cousine plus âgée de Fanchon, elle décide de guider sa cadette dans les bras de Robinet et dans le monde de la sexualité… Clairement, elle ne prend pas de gant et parle ouvertement de cul. Le livre se divise en trois parties.
Première partie
La première partie est très courte, elle explique l’intérêt du livre. Pourquoi les mères cachent-elles les choses du sexe à leurs filles ? Par peur qu’elles pratiquent bêtement et avant l’âge, mais les filles se retrouvent alors bien bêtes et naïves lorsque le moment arrive de passer à la casserole.
Deuxième partie
Dans le premier dialogue, Fanchon et Suzanne discutent des hommes, du mariage, du sexe des hommes et des pratiques de l’amour…
Comment faire bander un homme ? Comment le faire rentrer dans le con ? Comment le faire jouir ? Suzanne explique qu’il existe plusieurs positions sexuelles… La levrette (texte), l’amazone, le missionnaire… Elle parle clairement de sodomie, de fessée, de masturbation mutuelle et de branlette espagnole.
Troisième partie
Dans la dernière partie, c’est le second dialogue. Fanchon a couché plusieurs fois avec Robinet et lorsque sa cousine vient lui rendre visite, elle raconte en détail toutes ses petites aventures. Comment Robinet jouit, comment elle jouit… Comment elle pense à Robinet même lorsqu’il n’est pas là, et là, Suzanne lui explique l’intérêt des godemichés, mais les filles discutent aussi de grossesse, de flagellation, de dirty talk… Bref, c’est un vrai manuel d’éducation sexuelle.
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L’École des filles, un livre subversif ?
A une époque où la société est à la fois puritaine, misogyne et patriarcale, le livre L’école des filles ou la philosophie des dames offre une part de modernité par l’affranchissement du plaisir de la femme. Eh oui ! Dans ce livre, les cousines parlent de plaisirs solitaires procurés avec les doigts et même avec des sextoys ! Déjà, le fait que des femmes puissent se masturber offense les hommes, mais si en plus, elles substituent les vraies bites par des godemichés, là, c’est le pompon !
Manquerait plus qu’elles travaillent sans demander l’accord du mari ou qu’elles puissent voter ! Ce serait la fin d’un monde… Suzanne, n’hésite pas à dire que le monde s’en trouverait meilleur si les femmes gouvernaient l’Eglise et la société…
On peut même noter une référence, un peu floue au clitoris… Et différentes méthodes contraceptives ! Malheur ! Au bûcher !
La version anglaise, celle qui comporte les illustrations. La version en vieux français. Et la version moderne, celle qui est facile à lire.
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