Le titre est assez surprenant. C'est un jeu de mots célébrant l'originalité de Paul Bigo (1930-2015), prêtre, président de la Commission diocésaine d’Art sacré et collectionneur principalement d'oeuvres d'artistes contemporains dont il fut l'ami.
Il avait souhaité que quelques-unes de ces pièces rejoignent les collections du musée d’Évreux. La visite de cette exposition, qu'il faut mener en parallèle de celle du fonds contemporain dont il fut un partenaire dans la création et l’animation de son dans les années 1980, témoigne de la personnalité audacieuse de ce sacré bonhomme.
Paul Bigo était ce qu'on appelle un humaniste, un bon vivant, généreux et fidèle en amitié. Il avait déployé sa collection au sein de la maison jouxtant l’église Saint-Taurin (où je me suis rendue aussi), qui lui avait été affectée dans l’exercice de son dernier ministère.
Sous l’armoire, de l’autre côté de la pièce, un carton à dessin renfermait des études de vitraux signées Lauté, Rezvani et Pierre Lafoucrière ... à qui l'on doit ce portrait du collectionneur, aquarelle, fusain et sanguine sur papier, exécuté vers 2012.
Certaines pièces ne sont pas très "classiques" comme ce carnet de recettes, extrait d'un ensemble de quatre, illustré par des oeuvres d'art ancien et contemporain. On découvre par exemple au fil des pages Adam et Eve de Lucas Cranach l'Ancien (1472-1553) voisinant avec une peinture de Hans Hartung (1904-1989) ou bien encore la Vénus d'Urbino du Titien (vers 1488-1576) dialoguant avec une oeuvre de Vasarely (1906-1997).
S'il témoigne de la grande ouverture d'esprit de Paul Bigo en matière d'art, de son humanisme et de sa culture, ce carnet nous rappelle qu'il fut aussi un bon vivant et que la bonne chère qu'il aimait et dont il régalait ses amis était aussi au rang des nourritures spirituelles ... ce dont je ne peux pas douter puisque c'est intentionnellement que le blog est alternativement culturel et culinaire.
Un tableau de Bernard-Marie Lauté, posé à plat (Sans titre, 1987 huile sur toile) témoigne de leur intérêt commun pour la problématique de la lumière. Il a passé son enfance à Gisors, dans l'Eure, où il a été initié à la peinture par Paul Bigo lui-même.
Une aquarelle d’Alexandre Hollan était posée sur une étagère de la cuisine. On peut admirer une oeuvre immense de cet artiste, né à Budapest en 1933, peintre des arbres et des vies silencieuses, intitulée Le Grand Chêne de Vigis-le-Fort, (acrylique sur toile, 2015).
Parmi celles-ci, cet Opus 95-E, (huile sur toile, 1961) de Gérard Schneider (1896-1986), un des grand maitres de l'abstraction lyrique qui triompha à Paris après la seconde Guerre mondiale. Dans sa pratique picturale, il laisse toute la place à la spontanéité du geste et à l'expressivité de la couleur. Parce que, disait-il : "Il faut voir la peinture abstraite comme on écoute la musique, sentir l'intériorité émotionnelle de l'oeuvre sans lui chercher une identification avec une représentation figurative quelconque. Ce qui est important, ce n'est donc pas de voir l'abstrait, c'est de le sentir".
Après la seconde guerre mondiale l'impressionnisme qui avait été rejeté par les avant-gardes du début du siècle, était donc devenu source d'inspiration pour une nouvelle génération d'artistes comme Joan Mitchell, membre de l'expressionnisme abstrait américain.
Sacré Paul ! exposition temporaire jusqu'au 8 janvier 2017Musée d'art, d'histoire et archéologie d'Evreux 6 rue Charles Corbeau - 27000 Évreux 02 32 31 81 90
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