Magazine
gerhard richter
allez hop le cadran du trente-et-un
et sur notre trente-et-un
on regarde en arrière quelques instants
en appliquant son rouge à lèvres
en relevant ses cheveux en se parfumant
un tout bref regard dans le rétroviseur
non pas pour se désoler de n'avoir pas fait
tout ce qu'on voulait faire
mais plutôt pour se féliciter d'avoir fait
tout ce qu'on a fait
et se donner un port altier
pour continuer la danse
pourquoi le trente-et-un décembre
plutôt que le vingt-trois mai
parce qu'on est la plupart d'entre nous en congé
reposés de deux ou trois jours de flottement
entre nos activités frénétiques qui ne donnent pour souffler
que quelques jours en été où il fait trop chaud pour penser
en décembre au moins avec la neige
qui nous aveugle de bonheur
qui nous pousse au cocon du foyer
et du chocolat chaud au rhum
ah oui ce cocon-là
on a le loisir d'errer entre deux oreilles un duvet et un oreiller
des fois entre bras jambes et corps chauds
mais on erre
certes
rétroviseur du fierce and glamourous
édition deux mil seize
quand j'avais des idées que j'ai quelque peu réalisées
lire chaque soir
oui pas mal réussi et près de trente titres dévorés
courir avec un plan
troqué un vingt-et-un kilomètres en avril pour un cinq
et couru un vingt-et-un en septembre
ramassé des fonds pour la fondation alpha en promettant
que je mettrais mes runnings
j'ai à peu près pas menti
boxer au mushin
pas pantoute
ce fut la première envie qui soit tombée à l'eau
et celle qui me révélait ma fatigue nouvelle
de cet état de préménopause
dont je vous reparlerai un autre tantôt
pas maintenant parce que c'est fucking dull
nager avec les charlots
je paye mon abonnement mais je ne nage pas
mon état fucking dull susmentionné
me fait passer tout droit chaque jeudi
lorsque mon réveil sonne à cinq heures
jeudi le douze janvier deux mil dix-sept
m'as le mettre à cinq heures et cinq
voir si ça fait une différence
étudier un cours par session
ah oui maudine
après avoir abandonné
mon cours du mercredi soir en janvier
parce que mon esprit n'avait plus d'espace pour réfléchir
j'ai pris les grands moyens
et suis retournée étudier à temps plein en septembre
ah ça oui donc
travailler en trouvant l'impact
je pense l'avoir trouvé et ça m'a fait changer de voie
j'ai envie de collaborer avec les toutes petites entreprises
les entrepreneurs les travailleurs autonomes
dans un quotidien plus concret
dormir en me couchant
je ne sais pas pourquoi j'ai pris cette résolution
je n'ai tellement aucun problème avec le sommeil
cuisiner une fois par semaine
c'est fou de penser qu'au début de l'année
je ne pensais pas cuisiner une fois par semaine
i've come a long way baby
c'est maintenant au moins trois fois par semaine
avec appétit et plaisir
manger mieux dont des légumes
ben oui en cuisinant c'est tellement plus probable
et je ne peux pas m'acheter de friteuse d'accord
okay je ne ferai pas de poutine maison
écrire le blogue
j'ai pas lâché
je pense avoir écrit mon trois centième dans l'année
bénévoler qui n'est pas un mot
oui j'y étais encore pour la fondation pour l'alphabétisation
j'ai été sacrée vice-présidente du conseil d'administration
et je suis très fière de la direction que prend cet organisme phare
aimer en le disant et en voyant mes kids plus souvent
ben ça t'sais c'était une maudite bonne idée
et faut que ça soit ongoing
méditer chaque jour
je l'avais oublié jusqu'à ce que mon abonnement
se renouvelle automatiquement
et que se débite mon compte de crédit
j'ai alors renoué avec andy puddicombe et headspace
pour le meilleur et pour le pire
et puis j'ai aussi fait d'autres choses
je me suis mise à apprendre l'italien
en tapant sur mon téléphone et conversant avec duolingo
j'ai recommencé à voir des amis et je continuerai à le faire
j'ai eu quatre-vingt-treize après avoir eu cinquante-quatre
j'ai quitté un emploi bien rémunéré
et signé mon premier contrat de consultation
j'ai couru six fois aller-retour de chez nous à la croix du mont-royal
vous l'avez vu me suis prise en photos
j'ai visité londres
j'ai fabriqué un banc en bois
je me suis immatriculée
j'ai pris une semaine de vacances
et deux mille huit cent dollars
et me suis payée la méga conférence c2mtl
j'ai roulé en bixi
j'ai gardé mon neveu
je me suis ouvert un compte instagram
un uber et un téotaxi
j'ai utilisé facetime facebook live et les moments d'instagram
j'ai payé sans le savoir l'app' de musique sur le iphone
puis me suis désabonnée sans broncher
j'ai obtenu mes récompenses de points
de mes cartes de crédit
j'ai appris tellement de choses
je me suis louée un casier à l'université
j'ai mangé dans ma cuisine face à l'orignal rouge de riopelle
j'ai fait des soupes ramen
et des biscuits de nowell
et demain
je vais continuer à faire tout cela
en appliquant une attention particulière
au ciel et à la couleur des yeux de mes interlocuteurs
comme je fêterai mon premier demi-siècle
un grand demi-siècle à me préparer pour le second
je me réserve de nombreux plaisirs
je vais essayer de chantonner en marchant
je vais écrire un livre
parce que c'est fini les chichis
parce que j'ai envie de raconter des histoires
je vais faire quatre cours d'université
et quelques autres aussi
et j'ai envie d'oeuvrer socialement
comme ce sera la dixième année du blogue
je pourrais en faire imprimer un recueil des best of
si j'ai assez d'argent j'irai manger la pasta à roma
et visiter les uffizi à firenze
j'ai envie de cuisiner pour les autres
je pourrais possiblement conclure mon premier cycle
en comptabilité et signer un diplôme de plus
je les aime ces trophées vous savez
sans eux nul besoin de me faire bouger
j'ai envie d'aimer de me promener
de rouler
de courir
de nager
d'embrasser
de manger la neige
et je vais continuer à vous partager
mes pérégrinations
car j'aime vous lire me dire
car je vous aime
et je vous souhaite la plus belle des deux mil dix-sept
qu'elle vous soit heureuse
et profitable
tchin tchin cawlice!
de gerhard richter grand peintre allemand
qui brosse la réalité mais jamais comme les autres
avec un autre regard
il frotte il gratte il repeint
il tourne les pages mais jamais brutalement
couche après couche
pour faire ressortir une autre vérité.