Impurs, qui reparaît au format de poche dans la collection « Totem »
des Editions Gallmeister, est le troisième
roman de David Vann traduit en français, après Sukkwan Island et Désolations.
Et la troisième grande claque qu’il nous met dans la figure, selon une méthode
désormais bien éprouvée : il endort son lecteur dans la première moitié du
récit, installant un cadre plaisant sous lequel percent déjà les germes de ce
qui va suivre ; puis il détruit ce qu’il a construit avec une rage
impatiente et conduit vers un abîme fascinant. On note cependant, dans Impurs, une mise en place plus visible
des éléments de la catastrophe. Mais la claque est aussi violente.
Galen est un jeune homme
de vingt-deux ans. Il vit avec sa mère, au rythme des saisons, dans une
exploitation agricole dont les noix sont la principale récolte. Ses contacts
avec l’extérieur se résument aux visites qu’ils rendent à sa grand-mère, placée
dans une maison de repos et pourvoyeuse malgré elle des principaux revenus de
la famille. Ainsi qu’au passage régulier, chez eux, de la tante Helen avec sa
fille Jennifer, dix-sept ans. Mais le monde extérieur ennuie Galen. Il n’y
voit, malgré l’affection qu’il porte à sa grand-mère, que futilités contre
lesquelles il s’élève de manière puérile, lâchant à intervalles réguliers les
mots dont il connaît l’effet urticant sur sa mère. Il cherche sa voie
personnelle dans la communion avec la nature, selon une vague philosophie new age construite sur des lectures
sauvages. Et compte ainsi atteindre la sérénité.
Cette sérénité devient
cependant de plus en plus inaccessible, tant elle est contrariée par les
érections persistantes provoquées par la présence de sa cousine, qui joue avec
talent et perversité de son jeune pouvoir de séduction. Galen est vaincu par le
désir, et le désir provoque une réaction en chaîne aux conséquences
imprévisibles. La folie douce qui l’habitait se transforme en pulsions
mortelles, dans des pages hallucinées et hallucinantes dont on sort la tête à
l’envers, avec le besoin de laisser passer du temps pour la remettre à
l’endroit.
On sera bousculé
autrement, dans une construction du récit plus complexe, par le dernier roman
traduit de David Vann, Aquarium, paru
chez le même éditeur. L’écrivain s’y renouvelle avec bonheur sans rien perdre
des inquiétudes qu’il nous transmet.