"Les conjurés de Florence" Paul J. Mc Auley. Roman. Editions Denoël, 1999.
Traduit de l'anglais par Olivier Deparis et Marie-Catherine Caillava.
C'est dans les premières années du XVIème siècle que nous entraîne le roman de Paul J. Mc Auley, et plus précisément dans la République de Florence, perle de la Toscane. Mais cette Florence là n'est pas celle que nous connaissons au travers de nos manuels d'Histoire.
En effet, dans cette vision décalée de l'Italie de la Renaissance, le grand Léonard de Vinci a renoncé à la peinture pour se consacrer entièrement à la réalisation de ses machines. Grâce à lui, la République florentine vit sa première révolution industrielle, les rues de la cité voient circuler des véhicules à vapeur, le cours de l'Arno est sillonné par des bateaux à aubes et les machines de guerre créées par le grand inventeur ont fait de la ville une grande puissance économique et militaire qui attire bien des convoitises de la part de ses rivaux. La confrérie des peintres – qui, dans notre Histoire a fait la célébrité de Florence – a ici cédé le pas devant celle des ingénieurs et des industriels appelés « artificiers ».
C'est cependant dans cette confrérie des peintres que Paul J. Mc Auley va nous introduire en la personne du jeune héros de ce récit : Pasquale, disciple de Giovanni Battista Rosso.
Au moment où débute le récit, la cité florentine est en effervescence à l'approche de la visite du Pape Léon X, second fils de Laurent le Magnifique. L'évenement est de taille puisque le Pape est de la lignée des Médicis, chassés de Florence par les disciples de Savonarole quelques décennies plus tôt. Cette visite annonce un assouplissement des relations entre Florence et Rome, devenues rivales suite à l'éviction des Médicis qui a eu pour conséquence un long conflit entre les deux cités, Florence l'ayant emporté grâce à la suprématie de son ingénierie militaire. Rome et le Vatican ne sont pas seules à s'être opposées à la puissance florentine; le Royaume d'Espagne mène une guerre sans merci en Méditerranée contre la République, sous le commandement d'Hernan Cortès qui n'a pas pu débarquer au Nouveau-Monde, repoussé par les forces coalisées des florentins et des indiens.
À quelques jours de l'arrivée du Pape, arrive en avant-garde de celui-ci son ambassadeur, le peintre Raphaël. La ville s'apprête à accueillir le célèbre peintre lors de la procession de la Saint-Luc et Pasquale, fervent admirateur de celui-ci, ne cache pas son impatience de l'apercevoir et peut-être d'échanger quelques mots avec lui au cours de la cérémonie.
Mais les festivités s'achèveront sur une note dramatique par le mystérieux assassinat de Giulio Romano, l'assistant de Raphaël, puis par l'empoisonnement du maître lui-même.Pasquale va alors se retrouver propulsé dans une enquête policière où il aura fort à faire pour démêler la vérité sur ces assassinats au sein d'une société florentine où fleurissent intrigues, complots et machinations de toutes sortes. Au péril de sa vie il va tenter de faire la lumière sur ces mystérieux évenements, aidé en cela par la sagacité d'un journaliste de La Gazette de Florence, un certain Niccolo Machiavel.
Avec ce roman, Paul J. Mc Auley nous livre avec talent une uchronie qui nous plonge dans un univers baroque et fascinant où de célèbres personnages historiques évoluent dans un monde qui aurait pu exister si le cours de l'Histoire avait été différent.On y côtoiera bien évidemment les personnages cités plus haut mais aussi une quantité d'autres dont Nicolas Copernic, Michel-Ange , ainsi qu' une certaine Mona Lisa Giocondo.
Remarquablement documenté sur les techniques picturales et sur les acteurs de l'époque, ce roman, situé dans un contexte fascinant et riche en images, souffre quand même d'une intrigue assez longue et alambiquée qui laisse le lecteur perplexe sur les motivations réelles de ces assassinats. Mais ce petit défaut est largement compensé par la profusion de personnages et rebondissements qui émaillent le récit.
Entre roman-policier, roman de science-fiction et roman historique, « Les conjurés de Florence » est un ouvrage débordant d'imagination qui malheureusement s'attarde sur une intrigue somme toute assez classique au détriment de la description d'un univers somptueux et fascinant.
Croquis de Léonard de Vinci