Paris, Ile de France, France
Jeudi 15 décembre 2016. 21h30.
Fred Hersch: piano
La chronique du concert de Fred Hersch à 19h30 le jeudi 15 décembre 2016 au Duc des Lombards se trouve sur le blog Ca va Jazzer de Bruno Pfeiffer hébergé par Libération.
Le podcast du concert de Fred Hersch au Duc des Lombards est disponible grâce à la radio TSF Jazz.
Lectrices inspectrices, lecteurs fureteurs, vous avez noté que j'ai déjà parlé du pianiste Fred Hersch en trio au Duc des Lombards en 2016 après en avoir parlé, déjà en trio, déjà au Duc des Lombards en 2009. Je retourne l'écouter en 2016 en solo, toujours au Duc des Lombards, car c'est en solo qu'un musicien aussi intimiste livre la quintessence de son art. De plus, on parle toujours trop du disciple, Brad Meldhau, et jamais assez de son Maître, Fred Hersch.
" Thank You very much for sharing this evening with me and this piano here ". Avec Fred Hersch et un piano à portée de ses mains, nous sommes forcément en bonne compagnie.
Il commence par une ballade d' Antonio Carlos Jobim, comme lors du concert de 19h30. Le toucher frappe tout de suite. Grave, élégant; Fred Hersch sait vous déchirer l'âme dès les premières notes. Ca ne sonne pas du tout Bossa Nova mais totalement Fred Hersch. C'est insupportablement beau. Il joue le manque, l'absence.
Deux compositions personnelles dédiées à des personnes. " West Virginia Rose " pour sa mère et sa grand-mère originaires de Virginie Occidentale. Puis " Down Home " dédié au guitariste Bill Frisell.
Fred Hersch aime tellement sa mère et sa grand-mère qu'il semble jouer à tâtons. Il semble effleurer une rose. Un morceau proustien d'un artiste ultra sensible. Puis il enchaîne sur un air entraînant , dansant même, dédié au guitariste Bill Frisell.
Fred Hersch était adolescent dans les années 1960. Voici une composition du plus grand mélodiste de la Pop Music, Sir Paul Mac Cartney. Tiré de l'album " Revolver " des Beatles (1966), " For no one ". une ballade. Je ne connais pas cette chanson mais c'est évidemment une belle mélodie car Sir Paul Mac Cartney est un mélodiste de génie. Berceuse très efficace. Elle me donne envie d'aller me coucher au son de cette musique. Mon lit est bien trop loin du Duc des Lombards. Je reste donc éveillé ici et maintenant. " Yeah ", " très beau ", disent mes voisins de derrière. Rien à ajouter.
Pour une fois, il enchaîne, sans présenter le morceau, sur un thème rapide. " Duet " (Fred Hersch).
Retour à un standard. " After You've gone ". Fred Hersch revisite le stride en l'allégeant sans qu'il ne perde rien de son rythme implacable. Cet homme si sensible peut aussi faire preuve d'une poigne de fer au piano.
Un morceau plus moderne et plus dissonant. Au milieu coule une rivière. Il arrive à un standard. Une ballade archi connue. " The Peacocks " du pianiste Jimmy Rowles. Le barman derrière le zinc se balance au rythme de la musique en confectionnant ses cocktails.
" Dulce de coco ", un choro brésilien. Un air enjouéé, entraînant, dansant mais toujours avec une pointe de nostalgie.
" Sarabande ", titre éponyme d'un album en trio (1986) de Fred Hersch avec Charlie Haden (contrebasse) et Joey Baron (batterie). La sarabande danse sous des doigts, légère, gracieuse comme un châle de soie coloré qui s'envole au vent.
Comme au premier concert de ce soir, après avoir commencé par Antonio Carlos Jobim, Fred Hersch finit par Thelonious Sphere Monk. Il ne sait pas par quel morceau encore. C'est bien du Monk mais adouci tout en conservant ses aspérités. Je ne reconnais pas le thème. ah si peut-être. Ma jambe gauche bat frénétiquement la mesure comme le faisait Monk. C'est donc bien du Monk. Tellement transformé que cela en devient du trafic. Je finis par reconnaître le thème sans retrouver le titre. Trop simple, sinon. Monk est inépuisable.
RAPPEL
" Valentine " ( Fred Hersch). Une ballade pour calmer le jeu. Traduire Valentin pour Fred Hersch. De la salle vient un chut contre le barman dont les glaçons viennent ponctuer le flux de la musique. Ne pas confondre club de jazz et salle de concert. Des dernières notes de piano sur un fond de glaçons remués et c'est fini. Pas tout à fait car nous en voulons encore.
" Thank You. I will play something else " nous dit Fred Hersch. Cela ne signifie pas qu'il nous jouera du Ornette Coleman ( dont un album se nomme " Something else " pour ceux qui ne suivent pas). Main gauche lourde sur les graves, légère sur les aigus. Sur le boulevard de Sébastopol, la sirène de pompiers ponctue la musique. Fred Hersch avance tranquille. Joli blues final. Un standard.
La photographie de Fred Hersch est l'oeuvre de l'Impavide Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.
Fred Hersch par Juan Carlos HERNANDEZ