Cérès n’est pas une simple boule rocheuse de la ceinture d’astéroïdes. Elle contient beaucoup d’eau. Partout et tout près de sa surface. La glace d’eau semble s’être séparée très tôt des couches rocheuses. Des indices suggèrent aussi qu’à une période, les matériaux en surface furent altérer par de l’eau à l’état liquide.
Cérès, la planète naine la plus proche de la Terre, est le plus grand corps de la ceinture d’astéroïdes. À première vue, cet astre sphérique de quelque 940 km de diamètre relativement sombre et arborant des centaines de cratères d’impact est de nature comparable aux objets plus petits et patatoïdes qui circulent dans cette région. À première vue seulement car en y regardant de plus près, à travers des télescopes spatiaux comme Herschel et, surtout, la sonde Dawn qui la survole depuis plus d’un an et demi maintenant, il en est autrement.
En cette mi-décembre 2016, à l’occasion des rencontres de l’AGU (American Geophysical Union) qui se déroulaient à San Francisco, les scientifiques de la mission ont dévoilé leurs nouveaux résultats (par ailleurs publiés dans Science et Nature Astronomy), nous offrant un portrait toujours plus détaillé de cet astre plein de mystères.
De la glace d’eau à la surface et aussi juste en-dessous
Les mesures réalisées avec l’instrument GRaND (Gamma Ray and Neutron Detector) jusqu’à quelques mètres de profondeur pour caractériser les abondances d’hydrogène, de fer et de potassium suggèrent que l’eau (H2O) est présente en quantité aux latitudes moyennes et hautes.
L’eau, plus exactement la glace d’eau, est partout et donc pas seulement dans une poignée de cratères (voir plus bas). Pour les chercheurs, la glace se serait séparée de la roche dès le début de l’histoire de Cérès. Il y aurait donc une couche riche en eau sous la surface depuis environ quatre milliards et demi d’années.
« Ces résultats confirment les prédictions faites il y a près de trois décennies que la glace peut survivre pendant des milliards d’années juste sous la surface de Cérès, a déclaré Thomas Prettyman, directeur scientifique du détecteur. En outre, ces preuves renforcent le cas de présence de glace d’eau près de la surface d’autres astéroïdes de la ceinture principale ».
Attention toutefois, la glace ne serait pas répartie uniformément mais installée dans des poches de la roche. Il s’agirait d’un mélange poreux.
Les concentrations relevées par GRaND soutiennent aussi l’hypothèse que la couche supérieure fut altérée par de l’eau à l’état liquide. Comment cela a-t-il pu être possible ? Vraisemblablement grâce à l’énergie dégagée par la désintégration d’éléments radioactifs au centre de la planète naine au cours de sa jeunesse. Cela intéresse les scientifiques car les météorites de type chondrites carbonées présentent aussi des indices d’une altération par de l’eau. Toutefois, le fer y plus présent que sur Cérès. Sans doute que dans le cas de cette dernière, il a migré vers le centre. Une autre possibilité propose que ce serait la planète naine elle-même qui aurait migré.
Une partie de l’intérieur de ce cratère d’impact sur Cérès reste perpétuellement dans l’ombre. Les astronomes l’appellent « cold traps », pièges à froid. Les mesures de Dawn montrent que de l’eau y est accumulée depuis des milliards d’années — Crédit : NASA, JPL-Caltech, UCLA, MPS, DLR, IDA
De la glace en surface piégée dans dans des ombres permanentes
Une seconde étude fait le point quant à elle sur la glace d’eau piégée dans certains cratères de Cérès plongés en permanence dans les ténèbres. Une caractéristique que l’on retrouve aussi sur d’autres corps criblés de cratères comme Mercure et la Lune. Pour ces dernières, les chercheurs pensent que l’eau a pu être apporté par des astres glacés qui s’y sont échoués. Dans le cas de la planète naine, il a pu en être de même, à moins qu’elle ne provienne de sa croûte gelée. Un mystère qui reste à éclaircir.
Enfin, dernier point, l’eau à la surface de Cérès a la capacité de se déplacer… Des observations d’Herschel dévoilées début 2013 en témoignent. Bien qu’une partie de l’eau sublimée s’évade dans l’espace, il reste probablement une petite partie qui se re-dépose à la surface et parfois elle se retrouve piégée dans l’ombre perpétuelle des cratères aux hautes latitudes.