Magazine Cinéma
Découverte du film de Elem Klimov « Vas et Regarde » (1985), dont la lamentable adaptation du titre en français est « Requiem pour un massacre », qui donnerait à penser à un médiocre polar de série B française des années 60, alors que c’est un film magistral sur les actions et exactions des Einsatzgruppen sur le Front de L’Est en 1943…
Les Einsatzgruppen étaient des formations SS chargées de l’extermination des Juifs, Partisans, Communistes, prisonniers de guerre, civils hostiles aux Allemands et qui agissaient conformément aux directives de « l’Ost Plan « sur la liquidation de la population Juive et Slave à l’Est. Ces Einsatzgruppen agissaient immédiatement sur les arrières de la progression de la Wehrmacht. La grande force de ce film, est de faire de nous des témoins, au travers le regard d’un jeune partisan de 15 ans, et cela sans aucune complaisance morbide dans la descriptions des massacres, et sans pathos non plus, juste un regard humain sur l’inhumain : la joie et le plaisir des unités SS à massacrer, (joie aussi des unités de la Wermarcht à assassiner les Juifs, lors par exemple du massacre de Berditchev relaté par V.Grossman dans ces carnets de guerre), leur impunité morale forgée par la « Weltanschauung » (la vision du monde) Nazi, qui s’exprime dans leur actes et leurs discours : c’est la première fois que j’entends dans un film un dialogue exprimant explicitement la volonté normale, légale, idéologique, d’extermination des Juifs et des Slaves pour le Lebensraum, l’espace vital, Nazi. Un film magistral à plusieurs points de vue sur la Guerre à l’Est - scénario, réalisation, photographie, interprétation, dialogues- , loin des Stalingrad d’Annaud et consorts et évidemment, et hélas, bien moins connus.
Les Waffen SS, les troupes combattantes de la SS, est resté, par la réécriture Americano_Franco-Allemande de l’Histoire lors de la Guerre froide, dans le conscient collectif comme la seule expression du « mal » Nazi, forgeant un mythe simplificateur de l’idéologie Nazi par une dualité trompeuse : La Wehrmacht est représenté comme des preux guerriers, à l’esprit chevaleresque, aux officiers cultivés, aux hommes de troupes obéissants et valeureux, à l’opposé les Waffen SS sont des êtres malsains à la pathologie sadique et meurtrière, agissant dans la pulsion des combats.
Mais cette histoire à l’eau de rose, servie à satiété par les états et les médias, se relève être mensongère. Sur le front de l’Est, où il y eut 15 millions de morts civils, donc 2, 5 millions de Juifs, la Wehrmacht a participé aux actions d’extermination de son propre chef : logistique pour le regroupement des population à exterminer par les Einsatzgruppen, exactions, pillage , extorsion de la nourriture, destruction des villages, prisonnier de guerre Soviétique condamnés sciemment à la famine. Cette dualité, « preux guerriers » vs guerriers « sans foi, ni loi », n’existe pas dans les faits, les soldats et officiers Allemands tous corps confondus, étaient unis par l’idéologie Nazi qui en faisait un groupe homogène, avec une pensée commune et unique, quant aux buts de la Guerre à l’Est : extermination humaine, économique, culturelle, militaire de l’URSS, pour constituer le Lebenraum Allemand, et une conscience partagée qu’ils faisaient le bien du Peuple Allemand en exterminant le Peuple Russe.
La réecriture Americano_Franco-Allemand de l’Histoire a aussi réduit la SS à sa seule composante combattante, la Waffen SS, laissant de côté la partie civile et administrative de cette organisation. Mais la SS était l’infrastructure même de l’Etat Nazi, son Elite idéologique édificatrice du III ème Reich, qui a conceptualisé, théorisé, planifié, ordonné, organisé, appliqué, optimisé l’Ost Plan, la colonisation génocidaire de l’URSS.
Richard Walther Darré était General SS et Ministre de l’Agriculture et à ce titre il a participé à l’élaboration de l’Ost Plan dans sa dimension de re-organisation agraire des territoires conquis, celle çi impliquait la disparition de 30 millions de personnes qui était planifié par une famine organisée. Konrad Meyer-Hetling, Herbert Backe, eux aussi était des hauts gradés de la SS et ont été au sein du Ministère de l’Agriculture des zélés technocrates de la colonisation génocidaire de l’URSS. Ici pas de SS psychopathes, abrutis, sadiques. Non ici que des intellectuels cultivés, des brillants universitaires, des diplômés en économie, en mathématique, en agronomie, en physique, en histoire, des dignitaires distingués aux belles manières.
Méconnaître cela c’est méconnaître le Nazisme dans ces aspects fondamentaux. Après les procès de Nuremberg (procès dit des Ministères) on s’est empressé de reconstruire une Allemagne « propre », de gommer, de mettre sous silence, d’atténuer tout cela, comme si le 9 mai 1945, 20 ans idéologie Nazi s’effaçaient du jour au lendemain. La Pax America dans l’Europe de l’après guerre s’est faite au détriment des sacrifices humains et matériels des Russes (15 millions de mort civil, 11 millions de morts militaire), en faisant des vainqueurs du Nazisme, et pour lesquels nous étions redevable de notre liberté retrouvée, le nouvel ennemi.